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Top 10 des découvertes scientifiques de l'année 2019 selon Québec Science

Les introns : de zéros à héros

Depuis notre tendre enfance, on nous dit de jeter les déchets dans les ordures, qu’ils ne sont bons que pour les poubelles. Imaginez si du jour au lendemain, des spécialistes découvraient une réelle utilité à ces déchets et leur donnaient une seconde vie. Voilà l’ampleur de la découverte du professeur Sherif Abou Elela et de son équipe.

Lorsque la cellule exprime ses gènes sous forme d’un messager ARN, c’est-à-dire lorsqu’elle recopie l’information de son gène ADN sous une autre forme (ARN), elle élimine des bouts d’information du messager, appelés introns. Les chromosomes sont comme un livre : un gène est un paragraphe,et l’ARN messager, une photocopie de ce même paragraphe.

La communauté scientifique a longtemps soutenu que ces introns étaient des fragments inutiles, communément appelés « ADN poubelle » ou « Junk DNA ». Or, l’étude du Pr Abou Elela prouve désormais que les introns sont essentiels pour l’adaptation et l’évolution des cellules, particulièrement lorsque les nutriments se font rares.

Sherif Abou Elela est professeur à la Faculté de médecine et des sciences de la santé de l’Université de Sherbrooke et chercheur de l’axe Cancer : biologie, pronostic et diagnostic du Centre de recherche du CHUS. Ses travaux portant sur les introns, publiés dans la revue américaine Nature (Les introns sont des médiateurs de la réponse cellulaire à la famine (en anglais)) figurent parmi les 10 découvertes scientifiques les plus exceptionnelles de la dernière année, selon le magazine Québec Science.

Professeur Abou Elela et sa collaboratrice, Mme Julie Parenteau
Professeur Abou Elela et sa collaboratrice, Mme Julie Parenteau
Photo : Martin Blache

Arrangé avec le gars des vues

Comparons les introns et les exons (une autre partie du gène) à un film que l’on regarde à la télévision. Si les publicités (les introns) sont retirées, le téléspectateur regarde le film comme il a été présenté au cinéma, sans pauses : il regarde les exons. Lorsque le métabolisme de la cellule se déroule bien, elle élimine les introns, comme si l’on retirait les publicités. Cependant, en période de famine, les introns détectent la diminution des nutriments. Ils s’accumulent alors dans la cellule et ralentissent son métabolisme, tel un mécanisme de survie. Comme la chaîne de télévision qui, pour survivre, conserve les pauses publicitaires afin de financer ses activités.

Les travaux de Pr Abou Elela permettent de confirmer l’utilité des introns :

En plus de servir à réguler l’expression des gènes, les introns aident les cellules à détecter un manque de nutriments dans leur milieu de croissance et à ajuster le taux cellulaire pour s’adapter à ce changement d’environnement, et promouvoir ainsi la survie cellulaire.

Sherif Abou Elela


L’équipe du professeur-chercheur conclut que, en plus de servir à réguler l’expression des gènes, les introns aident les cellules à détecter un manque de nutriments essentiels dans leur milieu de croissance, et à ajuster le taux cellulaire pour s’adapter à ce changement d’environnement. Leurs prochains travaux porteront d’ailleurs sur la compréhension de ce mécanisme. Et, qui sait, peut-être vont-ils découvrir une implication possible dans la croissance des cellules cancéreuses?

Ont aussi participé à la découverte : Julie Parenteau, Laurine Maignon, Mélodie Berthoumieux, Mathieu Catala et Vanessa Gagnon de l’Université de Sherbrooke.


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