Aller au contenu

Prise de décision

Nous prenons des dizaines de décisions chaque jour, des plus simples aux plus complexes : quoi manger, quelle activité planifier, quelles tâches faire en premier, quel programme d’études entreprendre, quitter ou non son conjoint. Nos choix sont le résultat de notre pouvoir personnel et de notre liberté.

La capacité de faire des choix satisfaisants qui tiennent compte de nos besoins et de la réalité est un défi qui n’est pas toujours simple à relever. Pour certains, prendre une décision devient un véritable cauchemar : ils tournent et tournent encore dans leur tête les différentes options et n’arrivent pas à se décider, paralysés par la peur de se tromper ou évitant tout simplement de faire des choix.

Prendre une décision ne se fait généralement pas de façon instantanée. La durée du processus décisionnel dépend souvent de l’impact qu’aura la décision sur notre vie. En effet, choisir quel vêtement acheter nécessite moins de temps de réflexion que choisir entre deux programmes d’études. Évidemment, plus la décision aura un grand impact sur notre vie, plus elle pourra générer du stress et de l’hésitation.

On peut diviser le processus décisionnel en 3 phases1 :

  1. Exploration : la première phase consiste en une période d’exploration et d’analyse de la situation pour identifier tous les éléments qui sont en jeu.
  2. Incubation : cette phase nous permet d’évaluer les avantages et les inconvénients des options possibles. À cette étape, une certaine ambivalence est quasi inévitable et tout à fait normale1. Être ambivalent, c’est osciller entre différentes options, sentir que ces options peuvent être valables et être hésitant, étant à la fois en faveur et en défaveur de celles-ci2. De l’ambivalence naît généralement un malaise, une insatisfaction, ingrédient essentiel, car il nous pousse vers la prise de risque qu’implique le choix2. Pour sortir de l’ambivalence, il faut savoir renoncer à l’une des options pour adhérer à l’autre. De plus, choisir des avantages et des inconvénients plutôt que d’autres amène son lot de conséquences et il faut pouvoir les accepter et les assumer3.
  3. Eurêka : au terme d’une période d’incubation plus ou moins longue, la dernière phase du processus décisionnel peut survenir. C’est le moment où le processus est achevé par une décision qui vous convient et qui a du sens pour vous. Un certain soulagement survient.

Ces six styles décisionnels comportent chacun leurs avantages et inconvénients selon les contextes. Nous avons généralement tendance à utiliser un ou deux styles plus fréquemment même si nous pouvons aussi tous les utiliser selon les situations auxquelles nous sommes confrontés4 :

  1. Logique : vous prenez votre décision en analysant rationnellement la situation, sans tenir compte de vos émotions.
  2. Inconsidéré : vous prenez votre décision de façon impulsive, sans perdre de temps, mais aussi sans examiner attentivement ce qu’elle implique.
  3. Hésitant : vous remettez souvent à plus tard votre décision parce que vous doutez fréquemment; vous êtes très prudent.
  4. Émotif : votre décision est basée principalement sur des sentiments, des préférences, des coups de cœur ou sur l’émotion du moment. 
  5. Accommodant : vous prenez votre décision de façon à vous conformer aux attentes des autres ou à ce qu’ils vous disent de faire.
  6. Intuitif : vous prenez votre décision en considérant votre « petite voix intérieure » plutôt que des facteurs externes. Vous attendez que cette voix vous indique la bonne décision.

Il peut être intéressant d’identifier votre style décisionnel habituel. Ainsi, vous pourrez vous ajuster aux différents contextes selon les avantages et inconvénients de chaque style pour faire des choix plus satisfaisants. 

Vous êtes du style à prendre 20 minutes à scruter le menu au restaurant avant d’arriver à faire votre choix et à douter de celui-ci dès que vous avez passé la commande? Tout le monde peut être indécis dans certaines circonstances. Cependant, l’indécision devient chronique lorsqu’elle se généralise et concerne tous types de décision, des plus simples aux plus complexes. Quels sont les enjeux qui se cachent derrière cette incapacité à choisir?

D’abord, certaines peurs peuvent vous freiner lorsqu’il est temps de choisir. Quatre d’entre elles sont particulièrement fortes chez les indécis5.

  1. La peur de se tromper est particulièrement présente chez les personnes perfectionnistes qui craignent de faire une erreur et croient qu’on attend d’elles la perfection. Elles vivent donc beaucoup d’anxiété décisionnelle et préfèrent alors ne pas choisir plutôt que de faire face aux conséquences de leurs choix6. Il peut être intéressant de se rappeler qu’il est rare qu’une décision ait des conséquences graves qui, par exemple, mettent la vie de quelqu’un en danger. Vous pouvez remettre en contexte votre décision et vous assurer de pouvoir vivre avec les conséquences de celle-ci. Rappelez-vous aussi qu’il existe plus d’une solution acceptable  à un même problème.
  2. La peur de l’échec, quant à elle, se présente lorsqu’on ne se sent pas à la hauteur et qu’on redoute de souffrir en cas d’échec5. Rappelez-vous que tout le monde fait face à des échecs à un moment ou un autre de sa vie. Profitez de vos expériences difficiles pour faire des apprentissages qui vous rendront plus solide.
  3. La peur de l’inconnu, de son côté, est souvent présente chez les gens qui supportent mal l’incertitude et les imprévus. Ils anticipent souvent ce qui pourrait mal tourner et vivent beaucoup d’anxiété devant les choses qu’ils ne peuvent pas contrôler.  Pour y faire face, prenez conscience que vous ne pouvez pas tout savoir ni maîtriser à l’avance5. Faire un choix implique de tolérer une part d’inconnu. Vous pouvez également être confiant que vous aurez les ressources personnelles nécessaires pour faire face aux imprévus et aux difficultés, le moment venu.
  4. La peur de déplaire relève du besoin d’être approuvé par son entourage, par ses parents par exemple. La personne ne choisit pas en fonction de ses besoins ou de ses désirs, mais en fonction de ceux des autres ou de ce qu’elle croit qu’on attend d’elle5. Or, décider, c’est accepter de ne pas faire l’unanimité7.

Ensuite, certaines pensées peuvent vous nuire quand vient le temps de choisir. C’est le cas notamment des fausses croyances. Par exemple, remémorez-vous votre processus de choix de programme universitaire. Vous êtes-vous dit des choses comme8 :

  • « Je n’ai pas le droit de changer d’idée une fois ma décision prise »,
  • « Les conséquences d’une mauvaise décision sont désastreuses »,
  • « Je veux avoir la certitude que je fais le bon choix »,
  • « Mon entourage doit absolument approuver ma décision ». 

Si oui, sachez que vous entretenez de fausses croyances à propos des décisions! Ces croyances rendent la tâche encore plus ardue lorsque vient le temps de décider parce qu’elles prennent le dessus et brouillent les pistes, ajoutant une pression et un stress supplémentaires5. En prendre conscience peut permettre d’identifier la cause de votre indécision, de remettre en question ces croyances pour oser faire un choix éclairé.

Faible estime de soi 

L'estime de soi se définit comme l’évaluation que fait un individu de sa propre valeur. Les individus possédant une faible estime de soi doutent de leur valeur personnelle de façon marquée. Ils sont plus sensibles à l'échec, car cela ébranle la perception qu’ils ont d’eux-mêmes : ils se croient moins valables.  Ils ont davantage de difficulté à prendre des décisions lorsque celles-ci sont observées ou jugées par autrui en raison de leur peur de l’échec et du jugement10. Les individus ayant une faible estime de soi tenteront d'augmenter celle-ci en cherchant à se faire accepter par les autres11.

Ainsi, ils peuvent prendre des décisions pour plaire à autrui plutôt qu'en se fondant sur leurs intérêts personnels. Ils sont plus hésitants et peuvent chercher à imiter les choix de leur entourage9. De plus, ils souffrent davantage de procrastination décisionnelle. En effet, ils préfèrent retarder le plus possible le moment de décider par crainte de faire le mauvais choix12. À l'inverse, les individus ayant une haute estime de soi ont plus de facilité à prendre des décisions et à s'y tenir9. Travailler à augmenter votre estime personnelle pourra donc vous aider à faire des choix plus satisfaisants.

Manque de connaissance de soi

Les personnes qui n'ont pas une bonne connaissance d’elles-mêmes sont plus enclines à l'indécision, car elles ne possèdent pas les connaissances requises pour savoir ce qui leur convient mieux. Une réflexion personnelle ou une démarche avec un professionnel peut vous permettre de découvrir vos intérêts, vos aptitudes, vos valeurs et votre personnalité. Ainsi vous pourrez prendre des décisions qui tiennent compte de vos besoins et qui vous conviennent davantage. 

1. Explorez en profondeur3

Il est essentiel d’étudier la situation en profondeur pour mieux comprendre les avantages et les inconvénients propres à chacune des options et ainsi, prendre une décision éclairée. Pour ce faire, il est possible d’attribuer à chaque avantage et inconvénient un pourcentage qui représente leur importance ou leur poids dans la prise de décision1.  Cette méthode permet d’établir clairement quelles sont vos priorités et de comparer vos options13.  Par exemple : vous hésitez entre deux emplois étudiants. Le premier vous offre un salaire intéressant (75 %). Cependant, l’horaire de travail du deuxième vous convient vraiment (100 %)1. De plus, si vous avez tendance à pencher vers une option, ne serait-ce qu’un petit peu plus, cela peut vous indiquer que c’est la bonne décision à prendre. Il peut également être aidant d’aller chercher  le plus de sources d’information possible (Internet, livres, personne ressource, etc.). Quoi de mieux qu’une décision éclairée1?

2. Visualisez1

La visualisation peut être utile pour faire un choix qui tient compte de vos objectifs à long terme, particulièrement si ce choix a un impact important sur votre avenir (choix de carrière, décision d’avoir des enfants, etc.). Vous pouvez vous visualiser dans 10 ans afin de vous permettre de contextualiser votre décision et de constater si oui ou non, vos choix concordent avec vos objectifs de vie. Par exemple, est-ce que vous vous imaginez travailler en relation d’aide dans 10 ans? Est-ce que cette décision concorde avec vos valeurs et vos désirs? Aussi, il est possible de visualiser la prise de décision à court terme et de porter attention à votre corps. En effet, en vous imaginant avoir pris votre décision, portez attention à vos réactions corporelles. Comment vous sentez-vous par rapport aux conséquences de votre choix (moins tendu, crispé, soulagé, etc.)? Les signaux corporels peuvent être un outil précieux pour prendre une décision13.

3. Demandez conseil1

Parfois, vous pouvez ressentir le besoin d’être accompagné dans votre processus de décision, surtout lorsqu’il s’agit d’une décision importante. Demander conseil peut vous permettre d’enrichir votre réflexion et de faciliter votre choix. Il est également possible de vous demander conseil à vous-même, comme si votre problématique appartenait à un ami : si un proche vivait une situation semblable, que lui conseilleriez-vous? Cette technique permet de prendre une certaine distance face à votre problématique.

4. Connaissez-vous vous-même13

Afin de prendre une décision qui vous convient, il est important de bien vous connaître : quels sont vos valeurs, priorités, intérêts, traits de personnalité, goûts, désirs, etc. S’il est difficile pour vous de vous définir, il est possible d’y aller à l’envers : qu’est-ce que vous n’aimez pas ou qui ne vous ressemble pas?

5. Assumez vos choix13

Si vous restez constamment coincé dans l’indécision, il peut être difficile d’avancer. Une fois une décision prise, ayez confiance en votre choix ; une décision est rarement parfaite, il est donc normal que certaines de ses conséquences vous conviennent moins.

6. Osez vous tromper13

Nelson Mandela disait : « Je ne perds jamais. Soit je gagne, soit j’apprends ». Il est essentiel de vous donner le droit à l’erreur. D’une part, vous pourrez généralement vous reprendre et la réparer. D’autre part, vous apprendrez de vos moins bonnes décisions et elles pourront vous permettre de devenir plus expérimenté. Savoir rire de soi-même peut être une façon de diminuer l’anxiété ressentie face à un choix qui s’avère finalement moins satisfaisant.

7. Croyez en vous : vous avez de l’expérience6

Rien ne sert de vous étiqueter et de penser que vous êtes un mauvais décideur, vous êtes peut-être meilleur que vous le pensez. En effet, plusieurs fois par jour, vous êtes invité à prendre des décisions. De l’expérience, vous en avez!

8. Accordez-vous un délai

Si vous avez tendance à être impulsif, le fait de vous laisser quelques jours avant de prendre une décision importante vous laissera le temps de réfléchir et de confronter votre choix à la réalité, et ce, avant de vous engager1. Par contre, devant une décision qui implique moins de conséquences (choisir comment s’habiller le matin), vous pouvez vous imposer une limite de temps pour ne pas gaspiller d’énergie inutilement.

9. Divisez en étapes

En divisant en étapes ou en petites décisions ce que vous voulez entreprendre, la pression de prendre la bonne décision et la peur diminuent. Par exemple, avant de choisir une université, un étudiant pourrait choisir un programme qui l’intéresse.

10. Changez-vous les idées

Durant le processus de décision, il peut être important de vous accorder des temps de répit pour arrêter d’y penser et vous changer les idées. En laissant de côté vos soucis et en vous investissant dans des passe-temps que vous appréciez, vous serez plus calme et posé lors du retour à la prise de décision.

11. Dédramatisez et envisagez tous les scénarios13

Vous êtes parfois envahi par la peur des conséquences possibles reliées à une décision à prendre? Lorsque vous envisagez le pire, il est possible d’utiliser cette technique : séparez une feuille en deux, à gauche, inscrivez le pire des scénarios qui pourraient arriver et à droite, comment vous pourriez faire face à ces embuches1.  Cette technique vous permettra de constater qu’il est possible de survivre, même au pire.

En guise de conclusion, la conseillère en orientation et psychologue Isabelle Falardeau propose la réflexion suivante : « Lorsqu'on prend une décision, on prend un risque puisqu'on ne sait pas vraiment quelle est la meilleure solution. Si on le savait, on n'aurait tout simplement pas de choix à faire. La réponse s'imposerait par son évidence. À moins de connaître l'avenir, choisir représente un saut vers l'inconnu. Décider, c'est à la fois prendre du pouvoir sur sa vie tout en acceptant de perdre momentanément le contrôle sur les événements à venir. Décider, c'est s'ouvrir aux impondérables de la vie5. »

Auteurs et références

Document préparé par Mélanie Thibault, psychologue, et l'équipe PE-SPO : Myriam Côté, Marianne Deneault, Véronique Lachance, Krystel Libert-Morneau, Éléonore Sabourin-Guardo et Alexis Thibault
© Service de psychologie et d'orientation de l'Université de Sherbrooke 2016


Références

  1. Laurier, A. (1994, Septembre). Des méthodes efficaces pour prendre de bonnes décisions.
  2. Miller, W. R., & Rollnick, S. (2013). L’entretien motivationnel: Aider la personne à engager le changement. Paris: InterEditions.
  3. Larivey, M. (2000) L’ambivalence: une pseudo émotion.
  4. Fournier, G. (1995). Interagir : une stratégie efficace d’orientation et d’insertion socioprofessionnelle, de la théorie à la pratique, programme d’intervention. Les éditions Septembre.
  5. Falardeau, I. (2007). Sorti de l’indécision.
  6. Marchi, C. (Octobre 2001). Cause de l’indécision: Être ou ne pas être?
  7. Carrefour Jeunesse Emploi Beauce-Nord (Octobre 2013). L’indécision et les peurs qui paralysent. Consulté à cjebn.com
  8. Services à la vie étudiante UQAM (mars 2010). L’indécision et l’anxiété vocationnelle. 
  9. Lelord, F. et André, C (1999). L’estime de soi : s’aimer pour mieux vivre avec les autres.
  10. André, C. (2002). L'estime de soi au quotidien. Sciences humaines, 131 p.
  11. Falardeau-Alain, S. (2013). Le rôle des facteurs individuels, relationnels et contextuels pour expliquer l'indécision de carrière et la motivation scolaire des cégépiens. Thèse de doctorat inédite. Université Laval.
  12. Fabio, A. D., & Busoni, L. (2006). Covariation des styles décisionnels: perception d’échec cognitif, estime de soi ou traits de personnalité? L'orientation scolaire et professionnelle, (35/3), 363-385.
  13. Simoneau, J. (2015, Juillet). Toujours indécis? Voici comment vous décider! Bel Âge. Consulté à lebelage.ca