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Estime de soi

S'aimer mieux pour être plus heureux 

« Le regard que l’on porte sur soi n’est jamais neutre. »1 Certains ont tendance à se juger sévèrement et d’autres sont plus bienveillants envers eux-mêmes. Aussi, lorsqu’il est question de reconnaître sa valeur et ses forces, certains craignent de devenir imbus d’eux-mêmes. À l’inverse, d’autres se perçoivent grandioses et ne peuvent accepter de voir leurs propres limites. Avoir une estime de soi saine et ajustée ne passe ni par l’obsession de soi ni par l’excès de modestie.

Comme le mentionne l’auteur Christophe André, « la solution n'est pas de penser moins à soi, mais d’y penser différemment. »1 Votre estime, si elle est solide, peut être source de bien-être et d’épanouissement. À l’inverse, une estime fragile peut générer de la souffrance et affecter vos relations. Ce document vous invite à réfléchir au regard que vous posez sur vous-même. Elle pourra aussi vous proposer quelques pistes de réflexion et d'action, afin de développer un regard plus bienveillant à votre sujet, et une estime plus stable et plus élevée.

« L'estime de soi est un concept psychologique qui renvoie au jugement global positif ou négatif qu'une personne a d'elle-même ».2 C’est l’évaluation qu’une personne fait de sa propre valeur. « L’estime de soi n’est pas qu’une question de regard sur soi, elle est aussi ce ressenti émotionnel global qui nous envahit lorsqu’on pense à soi.»1 Elle inclut également notre perception des jugements des autres sur soi, et se manifeste à travers nos émotions (fierté ou honte), nos comportements (s’effacer ou s’affirmer) et nos pensées (auto-dénigrement ou valorisation intérieure). L’estime de soi peut fluctuer dans le temps et selon les événements vécus.

Une estime de soi positive est associée au bien-être, à la réussite et à la satisfaction. Une faible estime de soi peut augmenter les risques de développer des problèmes tels que la dépression, l’anxiété, et plusieurs autres conditions psychologiques, en plus d’affecter le fonctionnement social.3 Les spécialistes en santé mentale sont d’avis qu’une bonne estime de soi est l’un des meilleurs outils dont on puisse disposer pour faire face aux difficultés.4

Différence entre la confiance en soi et l'estime de soi

Plusieurs personnes associent estime de soi et confiance en soi. Ce sont cependant deux concepts différents. La confiance en soi, c'est lorsqu’on évalue qu’on a les ressources nécessaires pour affronter une situation particulière. Lorsqu’on a confiance en soi, on se considère capable. L’estime de soi, quant à elle, fait référence au sentiment d’avoir de la valeur en tant que personne. Lorsqu’on a de l’estime de soi, on se considère valable.5 

Plusieurs éléments complexes interviennent dans la construction de l’estime d’une personne. Pendant ses premières années de vie, l’enfant reçoit des informations sur lui (apparence, compétences, valeur, etc.) de la part de son entourage immédiat, en particulier ses parents. Ceux-ci agissent un peu comme des miroirs, lui reflétant, par des paroles et des comportements, une image de lui-même. Peu à peu, l’enfant apprend à mieux se connaître à travers ce regard, qu’il assimile.6  De plus, il perçoit et intègre les normes et les domaines qui sont jugés importants par son entourage. Par exemple, certains parents et groupes de pairs peuvent valoriser la performance sportive ou académique. Très jeune, l’enfant est en mesure, grâce aux connaissances qu’il a sur lui et sur les normes de son environnement, de s’évaluer et donc de juger de sa valeur.6

Cependant, si l’enfant ne reçoit une validation que lorsqu’il agit en conformité avec les attentes de ses parents, il peut intérioriser que sa valeur est conditionnelle à une  « bonne » manière d’agir.6  Pour satisfaire son besoin fondamental d’être aimé, cet enfant pourra donc aller jusqu’à agir uniquement en fonction des désirs de ses parents, qu’il aura intériorisés. Il se prive alors de l’affirmation de soi nécessaire à une bonne estime et au développement de son identité.6 De même, lorsque les comportements positifs de l’enfant sont rarement soulignés, et que ce sont surtout des messages négatifs qui priment, ce dernier peut en venir à se définir par ses lacunes, plutôt que par les aspects positifs de sa personne6

Les mots blessants lui étant adressés sont d’ailleurs susceptibles de contaminer son monologue intérieur, et de lui donner le sentiment d’avoir une faible valeur.6,7 De plus, la qualité et la stabilité de la relation d’attachement entre l’enfant et ses parents va moduler son estime personnelle.7 En effet, plus cette relation est stable et sécurisante, plus l’enfant se sent soutenu et aimé. Son estime s’en trouve alors consolidée. À l’inverse, s’il y a trop de froideur, d’incohérence, d’instabilité ou de rejet de la part du parent, l’enfant ne pourra s’appuyer complètement sur ce lien pour se sentir valable. Il risque de douter de sa valeur en associant ces comportements blessants à quelque chose venant de lui. Une peur du rejet peut alors apparaître.7

Aussi, l’enfant dont les besoins et les émotions n’ont pas été accueillis de manière adéquate par le parent (le parent critique la réaction de l’enfant, invalide ses émotions, ou devient distant affectivement), peut se sentir rejeté ou inadéquat devant eux.8  À l’âge adulte, cette personne risque de développer un sentiment de honte face à des besoins ou des émotions légitimes, car ils ont été invalidés par des personnes importantes. Cette même personne risque aussi de croire que quelque chose cloche chez elle, et peut ressentir une insécurité dans ses relations intimes, le tout affectant grandement son sentiment de valeur.8

À l’inverse, grâce à des interventions précoces adéquates, l’enfant en vient à comprendre que ses proches lui accordent de la valeur et l’aiment tel qu’il est. C’est ce qui l’aide à se juger lui-même de façon positive, et à se sentir aimable et valable tout au long de sa vie.

Voici quelques attitudes parentales qui contribuent au bon développement de l’estime de soi d’un enfant :

  • Être affectueux et attentionné envers son enfant;9
  • Mettre en place des règles et routines claires, et les respecter;9
  • Féliciter les bons comportements de son enfant;9
  • Accepter l’enfant tel qu’il est, en soulignant ses forces et en respectant ses limites;10
  • Offrir du soutien et accompagner l’enfant dans ses échecs;10
  • Accompagner l’enfant dans la réparation de ses erreurs, pour lui prouver qu’il a « droit à l’erreur »;6
  • Créer une relation stable, sécurisante et de qualité avec l’enfant.6

Il y a donc lieu de penser qu’un adulte qui, dans l’enfance, a pu compter sur des parents suffisamment aimants, soutenants et sécurisants, conservera plus facilement, malgré les difficultés auxquelles il fera face, le sentiment qu’il est quelqu’un de valable, et aura donc une meilleure estime de soi.

Cependant, le tempérament de l’enfant peut aussi influencer le développement de son estime personnelle. Par exemple, les enfants particulièrement sensibles vont davantage capter les attentes de leur entourage, et se mettre plus de pression pour y correspondre. Ils peuvent ainsi s’exiger beaucoup et se sentir plus souvent déçus d’eux-mêmes, ce qui peut affecter leur estime personnelle.10

Plusieurs phénomènes, liés au contexte interpersonnel dans lequel grandit l’enfant, sont susceptibles d’affecter le développement de son estime, encore en construction.

Rejet et intimidation durant l’enfance et l’adolescence

Puisque l’estime de soi évolue en parallèle avec notre environnement interpersonnel, le rejet est susceptible de la dégrader considérablement. En effet, il peut être particulièrement difficile de s’accepter tel que l’on est, si notre entourage, qui agit comme un « miroir social », nous renvoie une image qui nous semble décevante.1  Désirant s’éloigner de ce reflet de soi imparfait, nous risquons alors de réprimer des parties importantes de soi, qui sont perçues négatives, plutôt que de les accepter.1

De plus, l’effet néfaste du rejet sur l’estime de soi est si fort que, lorsque nous nous sentons rejetés par une personne que nous ne connaissons pas, et qui nous est invisible (par exemple, un inconnu via Internet), notre estime peut aussi être affectée.1

Il est à noter que le rejet en présence d’un public, souvent présent dans les cas d’intimidation, peut accentuer l’ampleur des dommages sur l’estime de soi. Dans ce cas, la victime peut ressentir de profonds sentiments de honte, de solitude et de trahison, surtout si les personnes qui l’humilient font partie de son entourage immédiat.1 Ces expériences, lorsqu’elles sont répétées, deviennent des rejets traumatisants, dont les victimes doivent souvent mettre des années à guérir.

Relations dans la vie adulte

Dans la vie adulte, certains événements peuvent aussi affecter l’estime de soi, même lorsque celle-ci est préalablement solide. Puisque l’estime de soi se construit en relation avec les autres, toute relation proche peut avoir un effet positif ou négatif sur l’estime de soi. Les relations intimes toxiques ont donc des effets dévastateurs. La violence verbale, psychologique et physique sont autant d’atteintes à l'intégrité de la personne, et risquent de détruire, petit à petit, l'estime de soi de celui ou celle qui la subit régulièrement.11 À l’opposé, les relations intimes soutenantes et authentiques contribuent au maintien de l’estime de soi.

Bien que l’estime de soi soit fortement influencée par les relations interpersonnelles, le contexte dans lequel une personne évolue, et les événements vécus ne sont pas à négliger9. En effet, la vie comporte son lot d’expériences positives et négatives. Que ce soit l'obtention d’un diplôme, d’un emploi, une rupture amoureuse ou une faillite, les réussites et les revers qui jalonnent le parcours d’un individu, vont aussi contribuer à faire fluctuer son estime personnelle. Chez les étudiants, le contexte des études et la pression sociale liée aux médias sociaux apparaissent donc particulièrement importants.

Contexte scolaire et l'estime de soi des étudiants

Le lien entre l’estime de soi et le contexte scolaire est très complexe. Effectivement, l’impact qu’aura l’école sur l’estime de soi d’un étudiant fluctue d’un individu à l’autre, et dépend de nombreuses variables, notamment son estime de soi initiale, la nature des expériences vécues dans le milieu scolaire et l’importance personnelle accordée à la sphère académique.12

D’abord, sachez que, plus votre estime initiale est forte, plus vous serez confiant en vos capacités de réussir, et plus vous aurez de chances de vous sentir motivé par l’école. Cela pourra augmenter vos chances de réussites, qui à leur tour, maintiendront la force de votre estime personnelle. L’inverse est aussi vrai : ceux qui ont une faible estime doutent généralement plus d’eux-mêmes, ce qui risque en retour de diminuer leur motivation et leur réussite scolaire. L’estime de soi se trouve alors fragilisée par leur expérience académique.13

Ensuite, le milieu scolaire lui-même, offre à lui seul, un lot de nouvelles expériences qui peuvent générer des réussites et des expériences positives, ou encore, faire vivre des échecs et affecter l’estime.14  

Finalement, l’importance qu’accorde une personne à l’éducation influencerait grandement l’impact des résultats scolaires sur son estime personnelle.9,12,15 En effet, bien que l’éducation soit une sphère très valorisée dans notre société, et que celle-ci soit souvent associée implicitement au fait de réussir dans la vie14,16, certains étudiants choisissent d’accorder moins d’importance à l’éducation, pour se définir. Ils apprennent à se valoriser par d’autres aspects d’eux-mêmes ou de leur vie17. Cela leur évite le piège d’associer leur valeur personnelle uniquement à leurs résultats académiques, et diminue l’impact de ceux-ci sur leur estime de soi.14,17

Médias sociaux et pression sociale

Un autre aspect de la réalité des étudiants pouvant faire fluctuer leur estime est l’utilisation des médias sociaux. En effet, au travers 1,8 milliard de photographies partagées chaque jour sur ces plateformes, les experts considèrent que les médias sociaux sont d’importants vecteurs de comparaison sociale et d’auto-promotion, deux stratégies qui peuvent influencer l’estime de soi et agir comme facteur de pression sociale.18,19

En premier lieu, les médias sociaux semblent influencer l’estime de soi, car ils favorisent la comparaison aux autres, par l’observation de leur profil virtuel. Ce type de comparaison est cependant risqué, car l’information présentée y est souvent biaisée : les images sont souvent retouchées, et présentent donc un idéal difficilement atteignable.20 Des études montrent que cela peut causer une diminution de l’estime de soi, en plus de contribuer à la dépression et à la diminution globale du bien-être.21,22

En deuxième lieu, les médias sociaux favoriseraient la promotion d’une version de soi idéalisée (photos rehaussées et retouchées). Donc, chez certaines personnes, le fait de publier des égoportraits serait une tentative de rehaussement d’une estime de soi négative.23 Bref, les médias sociaux, utilisés quotidiennement par la majorité des étudiants, auraient, implicitement, le pouvoir de générer une fluctuation de l’estime de soi, de plus en plus négative en fonction de l’augmentation du temps d’utilisation.24

Manifestations d'une estime de soi solide

À quoi reconnaît-on une bonne estime de soi? En premier lieu, elle est assez stable sur le long terme, et surtout, ne s’effondre pas face aux échecs. Voici 6 indicateurs d’une estime de soi solide1 :

  • Hauteur : une haute estime de soi se remarque dans les propos de la personne : elle peut parler d’elle positivement et accepter les compliments. Cela se mesure aussi à la réaction de la personne face à l’adversité : elle croit en ses capacités à surpasser les obstacles, mais reconnaît aussi ses faiblesses, et sait renoncer à certains projets sans se sentir humiliée.  
  • Stabilité : cet indicateur représente l’intensité de la réaction émotionnelle face aux événements. Une personne ayant une bonne estime ne s’emballe pas exagérément devant ses réussites, et ne se dénigre pas devant ses échecs : son estime reste assez stable. On peut donc dire que l’estime vient atténuer l’impact des événements extérieurs sur sa vie intérieure.  
  • Harmonie : la personne se comporte de manière cohérente en public et en privé. Elle ne change pas de personnalité dépendamment du contexte : elle reste authentique, car elle sait que ce qu’elle est a de la valeur.
  • Autonomie : la personne n’a pas besoin d’apparats, comme un poste prestigieux ou une voiture luxueuse, pour s’estimer et être estimée des autres. Il y a une certaine indépendance vis-à-vis des attentes de la société ou des idéaux de succès.
  • Coût : il est très demandant énergétiquement de devoir défendre son égo, de se justifier ou d’éviter les critiques. Ainsi, une estime de soi économe tend plus à apprendre des critiques, et à moins dépenser d’énergie dans l’autoprotection.

Concrètement, une personne ayant une estime solide :

  • Se considère comme quelqu’un ayant de la valeur, malgré ses imperfections,8 et malgré ses échecs;25
  • A une bonne connaissance de soi (ses forces, ses difficultés) et agit en accord avec elle-même;6
  • Accepte des compliments à son égard;1
  • S’affirme et sait se faire respecter;6
  • Peut accepter de ne pas avoir tous les talents et de ne pas tout réussir, sans se sentir dévastée;
  • S’attribue ses réussites (reconnaît ses capacités, ses qualités, etc.).10

Manifestations d’une estime de soi fragile

Une faible estime de soi peut se manifester de diverses façons, et la crainte de l’échec peut être l’une d’entre elles. D'abord, sachez que la peur de l’échec est, jusqu’à un certain point, normale. Il est utile de craindre, au moins un peu, les conséquences sociales ou matérielles d’un échec. Il faut donc tolérer un minimum de vivre avec cette crainte. Cependant, lorsque la crainte de l’échec devient presque une allergie, c’est que l’échec provoque une grande honte de soi, causée par la conviction profonde de ne pas avoir de valeur.1

Les sentiments de honte et de déception chroniques sont d’ailleurs des symptômes d’une estime déficiente. Ces émotions peuvent provenir de la perception qu’il y a un écart entre le soi réel (ce que je perçois que je suis réellement : par exemple, je n’aime pas mon apparence physique, car je ne me trouve pas assez mince) et le soi idéal (ce que je voudrais être : par exemple, ressembler à des mannequins dans les revues). Plus cet écart est grand, plus la déception et la honte de soi seront fortes.9 Il est normal de ressentir occasionnellement de la déception lorsqu’on n’atteint pas nos objectifs. Par exemple, il est habituel qu’un étudiant soit déçu, ou doute de lui, suite à un mauvais résultat d’examen.

 Cependant, lorsque cette déception se transforme en dévalorisation chronique et envahissante, cela indique une fragilité de l’estime de soi.1

Autres manifestations d’une estime de soi fragilisée

  • Obsession de soi : des préoccupations excessives pour son image;1
  • Une tension intérieure : une insécurité dans les situations sociales, un fort sentiment de surveillance du regard des autres, et des interrogations inquiètes sur sa conformité;1
  • Un sentiment d’exclusion : avoir l’impression d’être différent des autres (être plus fragile, moins compétent, plus vulnérable);1
  • Recevoir la critique de manière catastrophique;26
  • Un sentiment d’imposture : il se déclenche lors d’un succès (Est-ce que je mérite vraiment cela? Ce succès est-il dû à la chance ou au hasard?). En effet, les personnes ayant une faible estime attribuent leurs échecs à des caractéristiques personnelles et leurs réussites à des facteurs externes;1
  • Faire des choix de vie contraires à vos envies : par exemple, rester dans une relation amoureuse insatisfaisante, par crainte de ne pas trouver quelqu’un d’autre qui s'intéresse à vous;1
  • Confondre « avoir plus », « être plus », avec « valoir plus »;26
  • Avoir le réflexe de filtrer négativement ce que les autres vous disent ou vous font;26
  • S’attendre systématiquement à ne pas être aimé, ou à être rejeté;26
  • Rester sur la défensive avec les autres.26

Paradoxalement, certaines personnes, ayant une très faible estime d’elles-mêmes, auront une réaction à l’opposé de l’auto-dévalorisation. En effet, pour se protéger du sentiment de honte de soi, elles vont surévaluer leur propre valeur, et se considérer grandioses et supérieures aux autres. Elles développeront alors ce qu’on appelle le narcissisme pathologique.26

Il existe de nombreuses voies pour augmenter son estime personnelle. Sachez d’abord que vous n’êtes pas prisonnier de vos expériences difficiles du passé. Sachez aussi que vous n’êtes en rien responsable du fait que votre entourage n’a pas pu supporter, de façon optimale, le développement de votre estime durant votre enfance. Cela n’indique rien sur le fait que vous êtes une personne digne d’être aimée. Cela indique plutôt que, pour des raisons diverses et complexes qui ne vous concernent pas, ils n’avaient pas les outils, ou la disponibilité affective, pour le faire. Aujourd’hui, vous pouvez choisir de modifier le regard que vous posez sur vous-même, si vous êtes patient et que vous y travaillez. Bien que comprendre ce qui a modelé ce regard soit une étape très importante, arriver à un changement exige aussi de passer à l’action. En effet, le changement s’acquiert à travers la pratique, car il s’agit d’un apprentissage.

Christophe André1 propose l’amélioration de l’estime de soi par la pratique de l’acceptation de soi. La première étape consiste à reconnaître certains mécanismes de protection de l’estime de soi : par exemple, se justifier devant un commentaire, ou tenter de dissimuler des parties de soi par peur d’être jugé.

Souvent, nous sommes tellement habitués à ces mécanismes qu'ils sont automatiques et inconscients. Lorsque vous constatez ces mécanismes, soyez indulgent envers votre envie de vous protéger, c'est un mécanisme normal.

Ensuite, tentez d’assumer les limites qui vous sont reflétées : personne n’a dit que vous deviez être parfait! Vous réaliserez peut-être que cette nouvelle attitude vous rapprochera des autres, car vous serez moins défensif et plus authentique.

Puis, tentez de prendre conscience de votre discours intérieur : lorsque vous sentez monter la spirale des pensées négatives et dévalorisantes à propos de vous, tentez d'identifier ce qui a déclenché ce discours interne très critique.1 Il peut s’agir d’un commentaire à votre sujet, d’une comparaison que vous avez faite avec quelqu'un, d’une difficulté que vous rencontrez, ou d’exigences trop élevées envers vous-même. Sachez que les pensées négatives amplifient votre souffrance. Tentez donc de moduler votre autocritique. Cette dernière peut parfois être très utile, mais seulement si elle n’est pas porteuse d’un discours dénigrant, ou trop exigeant, ce qui est souvent le cas si vous avez tendance au perfectionnisme excessif.1

Essayez ensuite de développer un discours plus bienveillant à votre égard. Portez attention au vocabulaire que vous utilisez lors de votre verbalisation sur la situation : évitez les termes trop drastiques et définitifs (« Je suis nul, tout le monde va me juger, je ne suis pas intéressant… »).1  Cela entretient votre image négative de vous-même. Vous pouvez penser au discours qu’aurait une personne qui vous aime, et tenter de l’adopter à votre égard. Même si, dans un premier temps, cela vous paraîtra difficile, à la longue, cela pourra s’intégrer à votre discours intérieur, et contribuer à modifier positivement votre perception de vous-même.

Vous pouvez également essayer d’accepter les compliments, c'est-à-dire ne pas les invalider ou les minimiser. Profitez-en aussi pour demander à ceux qui vous aiment de vous partager les forces qu’ils perçoivent chez vous, ainsi que ce qu’ils aiment de vous. Cela vous fera peut-être découvrir des aspects de vous dont vous n’aviez pas conscience.

Vous pourrez aussi réaliser que le jugement des autres à votre égard, est souvent bien moins sévère que ce que vous anticipiez, et surtout, moins sévère que votre propre regard sur vous-même. En prenant conscience de vos forces, notez-les : lors de moments de doute, vous pourrez consulter à nouveau cette liste.

Aussi, travaillez à diminuer votre peur de l’échec en vous mettant en action : osez prendre des risques calculés et graduels, en amorçant de nouveaux projets. N’oubliez pas que tous sont confrontés à l’échec, à un moment ou à un autre. Il peut être bénéfique de vous montrer flexible lorsque les choses ne se passent pas en accord avec vos attentes : changer de direction ne signifie pas nécessairement échouer. Faites la liste de vos succès passés : cela vous aidera à ne pas les perdre de vue en cas de coup dur.

L’affirmation de soi est aussi un outil important dans le travail de l’estime de soi. Les personnes ayant une faible estime refoulent souvent leurs aspirations et besoins fondamentaux, parce qu’ils peuvent leur paraître en contradiction avec leur immense besoin d’acceptation sociale.1  Il est alors important de réaliser qu'en tant que personne digne de considération, vous avez le droit de dire non, de chercher à répondre à vos besoins, ou de décevoir.1  Rappelez-vous que la première personne qui peut vous traiter avec considération, c'est vous-même!

Finalement, tentez de résister à la comparaison, surtout avec des personnes qui possèdent des qualités à l’opposé des vôtres. La comparaison alimente la dévalorisation de soi. Et n’oubliez pas, personne ne possède toutes les qualités. Cela implique que vous fassiez peut-être le deuil de certaines qualités que vous auriez souhaité avoir.

Même si vous vous engagez pleinement dans l’amélioration de votre estime personnelle, sachez qu’il est normal de progresser, mais aussi de reculer durant ce cheminement. Parfois, certains événements peuvent vous fragiliser et vous épuiser. Ne baissez pas les bras devant ces difficultés, ils n’effacent en rien tous les avancements que vous avez faits.1

En terminant, rappelez-vous qu’une estime de soi infaillible est impossible à atteindre : c’est seulement un idéal dont on cherche à se rapprocher, si on le souhaite.1 Christophe André mentionne « qu’accepter l’imperfection, c’est aussi la preuve que le goût de la vie l’a emporté sur l’obsession de l’image de soi...».1

Si vous souhaitez poursuivre votre réflexion sur l’estime de soi, vous pouvez consulter les références à la rubrique suivant. Il peut parfois être nécessaire d’être accompagné dans cette démarche. Vous pouvez alors communiquer avec le Service de psychologie et d’orientation de l’Université de Sherbrooke à spo@usherbrooke.ca ou par téléphone au 819 821-7666.

Auteurs et références

Document préparé par Mélanie Thibault, psychologue, et l’équipe PE-SPO : Gabrielle Comtois, Jessica Lalande, Clara Longpré, Flavie Perron, Émilie Pigeon-Moreau et Joanie Poirier
© Service de psychologie et d’orientation de l’Université de Sherbrooke 2019


Références

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