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Top 10 des découvertes scientifiques de l'année 2019 selon Québec Science

Poissons connectés à l’échelle du globe : un tampon face à l’extinction

Les poissons des océans du globe seraient connectés des tropiques aux pôles par un robuste réseau d’interactions prédateurs-proies. Grâce à cette importante connexion, le réseau de poissons marins pourrait absorber les extinctions d’espèces. C’est ce que révèle une étude réalisée par Pr Dominique Gravel et son équipe publiée dans Nature Ecology and Evolution. Un vent de fraîcheur à l’ère de l’Anthropocène où surexploitation des ressources et changements climatiques sont les acteurs principaux d’une scène plutôt désolante.

Pallier le manque de données : une prouesse méthodologique

Face à notre croissante dépendance aux ressources marines, il est crucial de comprendre la composition et la dynamique des communautés marines pour mieux anticiper les effets de la pêche. L’étude des réseaux permet de mesurer la propagation des perturbations et la robustesse d’un système à l’extinction d’espèces. Mais les océans sont vastes et donc très difficiles à étudier dans leur globalité. Par manque de données ou moyens logistiques, ce qui se passe sous l’océan reste souvent, malheureusement, sous l’océan.

Dans cette étude, les auteurs innovent en développant une méthode qui, plutôt que de nécessiter un échantillonnage supplémentaire onéreux, voire impossible, met à profit nos connaissances actuelles des interactions prédateurs-proies à plus fine échelle. En effet, en combinant les informations déjà connues sur la taille, le régime alimentaire et la distribution de pas moins de 11 365 espèces de poissons marins, les auteurs parviennent à prédire les interactions trophiques à travers le globe. Le processus est simple : considérer toutes les interactions interspécifiques possibles et procéder ensuite par élimination séquentiellement des interactions improbables. Par exemple, les relations de prédation entre les poissons de fond et de surface sont exclues. Le processus d’élimination complété, on obtient un « méta » réseau marin global.

Un réseau « méta » connecté

On peut diviser les océans en 56 provinces biogéochimiques. À cause de leurs caractéristiques distinctes, les provinces contiennent différents assemblages de poissons. Étonnamment, les poissons seraient autant connectés aux provinces voisines qu’à leurs provinces d’origine. C’est donc dire que les poissons marins du globe forment un seul grand réseau « méta » connecté. Cette forte connexion serait attribuable, en partie, à certaines espèces à très larges distributions recoupant ainsi plusieurs provinces.

Être connecté pour mieux persister

La surexploitation commerciale est une menace grandissante pour la pérennité de la faune ichytienne. On s’inquiète, avec raison, des répercussions de l’extinction d’espèces sur l’ensemble du réseau trophique. La forte connectivité du réseau marin global offre une lueur d’espoir quant à son potentiel de faire face aux extinctions d’espèces. En effet, comme le nombre d’interactions prédateur-proie au sein du réseau global est grand et que certaines d’entre-elles sont redondantes, l’extinction d’une espèce pourrait être plus facilement compensée. Toutefois, la grande connexion du réseau marin est à la fois sa force et sa faiblesse puisqu’une perturbation se propagerait à l’ensemble du réseau, telle une onde à la surface de l’eau. Reste donc à espérer que nos actions ne fassent pas trop de vagues.



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