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Biodiversité marine

Entre queues de poissons et jus de boudin : nos océans dans l’eau chaude

En raison des changements climatiques, les eaux se réchauffent de plus en plus, ce qui n'est pas sans conséquences pour les espèces et les écosystèmes marins.
En raison des changements climatiques, les eaux se réchauffent de plus en plus, ce qui n'est pas sans conséquences pour les espèces et les écosystèmes marins.
Photo : Michel Caron - UdeS

Moins de morues, mais plus de homards. Plus de sébastes, mais moins de crevettes. Si à quelque chose, malheur est bon – particulièrement dans l’assiette –, l’issue des grands bouleversements que traversent les écosystèmes marins à l’heure du réchauffement climatique, de la pollution et de la surexploitation des ressources demeure des plus incertaines. Exploiter nos eaux de manière durable : renversement de la vapeur, ou goutte d’eau dans l’océan?

Océanographe et professeur au Département de géomatique appliquée à la Faculté des lettres et sciences humaines, Yannick Huot étudie depuis de nombreuses années l’effet des changements environnementaux sur la vie aquatique. Le déclin mondial sans précédent que connaît actuellement la biodiversité marine résulte selon lui de deux problèmes principaux : la pollution et la surexploitation des ressources de nos océans.

Il aborde d’ailleurs les conséquences de ces enjeux dans le cadre de son cours GAE110 - Introduction à l'océanographie, qu’il enseigne au baccalauréat en géomatique appliquée à l’environnement. Réchauffement et acidification des eaux, surpêche, quantités mirobolantes de microplastiques dans les océans du monde…  les impacts dévastateurs de l’activité humaine pèsent lourd sur les écosystèmes marins. L’océanographe ne s’en cache pas : il n’y a pas grand-chose qui lui donne espoir sur ce plan par les temps qui courent, sauf peut-être l’intérêt de plus en plus manifeste des étudiantes et étudiants pour ces questions.

Voilà maintenant 13 ans que j’enseigne ce cours, et j’observe que les étudiantes et étudiants sont beaucoup plus conscientisés aujourd’hui par rapport aux problèmes environnementaux. Ils sont prêts à agir.

Professeur Yannick Huot

Ce texte est le onzième d’une série qui illustre chaque mois l'intégration du développement durable dans la formation à l'UdeS, par l'entremise d'initiatives et d'exemples liés à l'un des 17 objectifs de développement durable (ODD) de l'ONU. Le contenu dont il est question dans le présent texte se rattache à l'ODD 14 - Vie aquatique, qui vise la conservation et l’utilisation durable des océans, des mers et des ressources marines.

Nouvelles générations formées : espoir de changement

Pour le professeur Huot, l’université joue assurément un rôle clé dans la sensibilisation et la formation des prochaines générations par rapport aux enjeux environnementaux.

Le changement viendra par la formation de nouvelles générations, qui comprennent les enjeux et veulent trouver des solutions. Ces personnes-là entreront sur le marché du travail et occuperont des positions où elles pourront prendre des décisions stratégiques.

Professeur Yannick Huot

Le professeur Yannick Huot
Le professeur Yannick Huot
Photo : Fournie

En plus des problématiques liées aux océans, le professeur Huot s’intéresse également à la santé des lacs, qu’il aborde dans le cadre de son cours au baccalauréat ECL501 - Écosystèmes aquatiques. Il faut savoir que le Canada est le pays qui compte le plus de lacs au monde, notamment en raison de la topographie unique de la vaste région du Bouclier canadien, qui regorge de ces étendues d’eau douce.

Sous pression depuis une centaine d’années en raison des contaminants provenant de différentes sources et de la prolifération de cyanobactéries, la santé des lacs canadiens subit des menaces constantes. Souhaitant documenter de manière plus exhaustive l’état de santé des lacs en vue d’une meilleure gestion et d’une conservation durable, le professeur Huot a dirigé une vaste étude sur la question, de 2016 à 2023. Première enquête nationale portant sur les lacs à travers le Canada, LakePulse a permis l’analyse de plus de 660 plans d’eau aux quatre coins du pays.

Pour les étudiantes et étudiants, il s’agissait par ailleurs du plus grand programme de formation et de mentorat en limnologie – la science qui étudie les eaux douces – jamais développé au Canada. Avec LakePulse, plus d’une centaine de personnes étudiantes de plusieurs universités canadiennes ont pris part aux échantillonnages et aux analyses de données, une véritable expérience de formation pratique.

Et comment vont nos lacs canadiens?

Au terme de cette vaste campagne d’échantillonnages et d’analyses de nos lacs canadiens, qu’en est-il de leur état de santé général? La grande majorité de nos lacs va plutôt bien, révèle le professeur Huot… avant de préciser que c’est surtout parce qu’ils se trouvent en grande partie sur le territoire du Bouclier canadien, un secteur nordique peu populeux.

Toutefois, les lacs situés plus au sud, là où la vie humaine et l’industrie agricole sont bien présentes, connaissent diverses problématiques. Aussi essentielle qu’elle soit, l’agriculture est directement responsable d’une large part de la contamination des cours d’eau.

On le voit dans les zones agricoles, l’eau de pluie qui se retrouve dans les bassins versants autour des lacs y amène une quantité de pesticides, de nutriments et d’engrais.  De plus, avec les changements climatiques, les températures de tous les lacs se réchauffent, et c’est difficile de penser que certaines espèces pourront survivre à ça.

Professeur Yannick Huot

Même si l’enquête LakePulse est terminée, le professeur Huot entend bien continuer à documenter la santé des lacs. Il en est à rédiger une demande de subvention qui pourrait l’amener à investiguer cette fois du côté des lacs de l’Estrie.

Le professeur Yannick Huot entend bien poursuivre ses recherches en documentant la santé des lacs de l'Estrie.
Le professeur Yannick Huot entend bien poursuivre ses recherches en documentant la santé des lacs de l'Estrie.
Photo : Michel Caron - UdeS

Ce qui est intéressant avec l’Estrie, c’est qu’il y a des lacs très endommagés, et d’autres en parfaite santé, raconte celui qui se spécialise dans le domaine de la limnologie. Il s’agit là d’un laboratoire très intéressant pour la collecte de données.

Si le financement de cette recherche se confirme, il s’agira à nouveau d’une excellente expérience de formation pratique pour les étudiantes et étudiants en géomatique appliquée, qui contribueront à faire avancer les connaissances quant à l’effet des changements climatiques sur les lacs de la région. Et il s’agira bien sûr d’une excellente nouvelle pour le professeur Huot, qui pourra poursuivre la collaboration terrain avec cette génération curieuse et écoresponsable qui lui donne espoir en un avenir plus durable.

À propos de l’ODD 14 – Vie aquatique
L’objectif de l’ODD 14 – Vie aquatique vise à conserver et exploiter de manière durable les océans, les mers et les ressources marines pour les fins du développement durable. Plus concrètement, des résultats liés à la réduction importante de la pollution marine, à la gestion, à la protection et à la conservation plus durables des écosystèmes marins et côtiers, à la fin de la surpêche et à l’élimination des engins fantômes sont attendus d’ici 2030.


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