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Concours de vulgarisation scientifique 2015 | finaliste

La lutte contre les infections hospitalières continue

Une équipe de Sherbrooke a identifié les 7 facteurs de risques de développer des complications à la suite d'une infection au Clostridium Difficile. 

Une équipe de Sherbrooke a identifié les 7 facteurs de risques de développer des complications à la suite d'une infection au Clostridium Difficile. 


Photo : Robert Dumont | UdeS

Lorsqu’un problème de santé nous amène à l’hôpital pour y être soigné, il est malheureusement possible de développer des infections. Ces infections, dites nosocomiales, touchent les personnes ayant une santé fragile et en particulier les personnes âgées.

Elles sont la conséquence d’une contamination par certaines bactéries. Les infections se développent généralement 48 heures après l’admission et peuvent avoir des conséquences importantes, parfois même dramatiques. Ces infections sont responsables d’un grand nombre de décès au cours des 10 dernières années et continuent de sévir dans les hôpitaux du Québec. Il y a pourtant moyen d’en diminuer encore plus la fréquence.

La crise Clostridium difficile de 2003 et 2004

La Clostridium difficile appartient à ces bactéries responsables des infections nosocomiales. Les patients infectés sont affectés de diarrhée dans les cas les moins graves, mais peuvent développer des complications pouvant même mener à leur décès.

Les infections par Clostridium Difficile en quelques chiffres

  • Entre 2003 et 2004, cette bactérie a infecté près de 7000 patients et causa la mort de près de 1000 d’entre eux.
  • Il y a près de 3500 contaminations dont 500 décès dans les hôpitaux du Québec chaque année.
  • Entre 2 et 5 % de la population est porteuse de cette bactérie sans être malade et près de 20 % chez les personnes âgées.

C’est ce qui est arrivé entre 2003 et 2004, période durant laquelle une souche très virulente de ce microbe a fait son apparition. Celui-ci, résistant aux antibiotiques, est capable de produire des toxines extrêmement dangereuses pour l’humain. Cette forme de C. difficile est responsable de la grave épidémie infectieuse survenue dans les hôpitaux du sud du Québec et qui reste présente, mais sous contrôle, depuis.

Les suites à cette crise sanitaire

En réponse à cette grave épidémie, le gouvernement canadien a mis en place plusieurs mesures préventives pour limiter le nombre d’infections. Au même moment, une équipe de recherche au Département de microbiologie et d’infectiologie de l’Université de Sherbrooke essayait de comprendre les raisons des complications les plus graves de ces infections. Le professeur Louis Valiquette, M.D., microbiologiste-infectiologue à l’installation CHUS du CIUSSS de l’Estrie-CHUS, professeur-chercheur à la FMSS et au CRCHUS, a pu identifier plusieurs facteurs de risques favorisant le développement de ces complications.

C’est la plus grande étude faite à ce jour sur les complications d’une infection au C. difficile. Elle a ainsi été menée dans plusieurs hôpitaux du Québec et de l’Ontario, en collaboration avec d’autres équipes de recherche de Montréal et de Toronto.

Plus de 1367 patients contaminés ont été testés positivement à cette bactérie et ont été suivis pendant 90 jours. Près de 10% d’entre eux ont vu leur état de santé se dégrader mettant en lumière l’existence de facteurs spécifiques favorables aux complications.

Parmi ces patients, les plus âgés (plus de 80 ans) ont plus fréquemment été atteints. Mais l’âge n’est pas le seul facteur. Il y a d’autres facteurs de risques, entre autres, les patients souffrant de problèmes respiratoires ou les patients ayant des problèmes cardiaques, la présence d’une quantité anormale d’azote uréique dans le sang, une production trop faible d’une protéine appelée albumine, un taux de globules blancs trop bas ou trop haut et un fort taux de protéine-C réactive.

Au total, pas moins de sept paramètres ont ainsi été mis en évidence par cette nouvelle étude menée par l’équipe de recherche de l’Université de Sherbrooke.

Les 7 facteurs de risques de développer des complications à la suite d'une infection au Clostridium Difficile 

  • Âge >80 ans
  • Nombre de respirations élevé (>20 par minute)
  • Rythme Cardiaque au repos élevé (>90 pulsations par minute)
  • Taux de globules blancs trop faible ou trop élevé
  • Quantité de protéine-C réactive élevée
  • Taux d’azote uréique sanguine élevé
  • Faible quantité d’albumine 


Une fréquence respiratoire ou un rythme cardiaque trop élevés favorisent le développement de complications. Un système immunitaire affaibli ou au contraire trop actif peut également avoir un rôle à jouer. Les globules blancs, ou leucocytes, sont un des éléments de la réponse de l’organisme à toute agression par un agent infectieux.

Un niveau de globules blancs trop bas est synonyme d’un système de défense affaibli. La lutte efficace contre une infection et ses complications en est alors affectée.

À l’inverse, une trop grande quantité de globules blancs ou d’un autre élément du système immunitaire dans le sang, la protéine-C réactive, suggère une inflammation sous-jacente qui favorise l’apparition de complications. Il en va de même pour une diminution d’albumine ou une augmentation du taux d’azote uréique sanguine.

L’albumine est connue comme étant un signe de bonne santé. Elle est produite par le foie et sa présence dans le sang est vitale pour permettre le transport de nombreuses hormones dans notre organisme. Néanmoins, en cas d’altération du foie, sa quantité peut chuter dangereusement.

Finalement, une dégradation de la fonction des reins peut, quant à elle, altérer sa fonction de filtre de l’organisme. L’élimination des déchets de l’organisme dans nos urines, en particulier l’azote uréique, est alors diminuée. Ce déchet n’est plus éliminé du sang par les reins et son taux dans le sang sera alors trop élevé.

Un seul de ces facteurs suffit à favoriser l’apparition des complications. Les patients âgés de plus de 80 ans ont souvent une santé plus fragile et sont plus fréquemment atteints par ces maladies suite à une infection au C. difficile. Par ailleurs, quel que soit leur âge, les personnes ayant un système immunitaire perturbé ou ayant une défaillance d’organes importants comme les poumons, le cœur, les reins ou le foie sont des patients à risques.

Chacun de ces facteurs pris indépendamment semble donc être en corrélation avec l’apparition de complications. Ainsi, dès que l’infection est confirmée, ce groupe de patients plus à risques devraient faire l’objet d’une surveillance accrue, d’une réhydratation intensive et d’un traitement agressif contre l’infection. Ces recherches permettent de faire un pas de plus dans la prévention des complications et de la dégradation de l’état de santé des patients.

La responsabilité de chacun

La présence de la bactérie C. difficile dans les selles d’une partie de la population et sa résistance à des conditions extrêmes en fait une bactérie que nous pouvons retrouver dans notre environnement quotidien. Par ailleurs, ce microbe est aisément transmissible avec un mode de contamination par voie oro-fécale ou par simple contact avec une surface contaminée.

Nous pouvons très bien visualiser le transport de ce germe microscopique de la salle de bain à nos mains qui iront toucher le bouton d’un ascenseur, la poignée de porte d’un magasin ou tous types de surfaces, surfaces qui seront à leur tour touchées par quelqu’un se rendant à l’hôpital.

Les infections par la bactérie C. difficile peuvent être très dangereuses. Ces infections peuvent toucher n’importe qui, mais grâce aux sept facteurs de risques identifiés, la prise en charge précoce des patients à risques permettra d’identifier de façon précoce les complications importantes.

Nous pouvons tous limiter ce genre d’infection. Le moyen le plus radical afin d’éliminer cette bactérie est une combinaison d’eau et de savon. Il est donc de la responsabilité de chacun de simplement de se laver les mains!