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Nouvelle publication | Sous la direction de Maxime Cartron et Nicholas Dion

Édition et appropriation, XVIe-XVIIIe siècle (Mémoires du livre/Studies in Book Culture)

« Édition et appropriation, XVIe-XVIIIe siècle », sous la direction de Maxime Cartron et Nicholas Dion, Mémoires du livre/Studies in Book Culture, volume 15, numéro 2, automne 2024, 218 p.
« Édition et appropriation, XVIe-XVIIIe siècle », sous la direction de Maxime Cartron et Nicholas Dion, Mémoires du livre/Studies in Book Culture, volume 15, numéro 2, automne 2024, 218 p.

Le présent numéro de la revue Mémoires du livre/Studies in Book Culture, sous la direction de Maxime Cartron (FNRS-UCLouvain) et du Pr Nicholas Dion (UdeS), explore le lien étroit qu’entretiennent, pour les oeuvres publiées entre les XVIe et XVIIIe siècles, les deux notions d’édition et d’appropriation, et ce, plus particulièrement en vertu de trois entrées théoriques.

En premier lieu, les articles réunis dans ce numéro abordent la dimension réversible de cette interaction, ce qui revient à travailler l’appropriation par l’édition et l’édition par l’appropriation, soit à poser que les implications heuristiques et herméneutiques engagées par le rapprochement de ces deux notions ne peuvent se faire que sur les bases d’une lecture intégrative. Ce principe est déterminant, car il aide à rassembler des gestes et des marqueurs matériels pouvant passer pour de simples accidents de la publication lorsqu’ils sont appréhendés de façon isolée, en les indexant sur une intentionnalité.

Il devient alors possible de réfléchir à l’appropriation de l’édition, soit aux procédures mises en place par divers types d’intentionnalité visant à éditer en vue de l’appropriation. En d’autres termes, il s’agit de penser la possibilité d’éditions faites avant tout pour l’appropriation, soit d’un type de lectorat spécifique, soit, sur l’autre versant, du point de vue de l’instance éditoriale. Ces éditions configurées spécifiquement pour favoriser un certain type d’appropriation (mémorialisation, consommation…) bénéficient également des approches s’intéressant à la segmentation des marchés ; songeons notamment aux travaux de Christophe Schuwey, par exemple sur les livres édités exclusivement – ou presque – pour leurs paratextes.

De là découle une interrogation logique : pourquoi choisir telle édition plutôt que telle autre, c’est‑à-dire qu’est-ce qui fait que l’on s’approprie une édition en particulier? Cette décision a en effet des impacts parfois décisifs sur l’histoire littéraire, mais aussi sur l’appréhension des genres, des oeuvres et des textes.

Par exemple, si un texte suscite des interprétations à partir d’une édition fautive, la chaîne des appropriations qui sera entraînée pourra être réanalysée non du point de vue du seul discours, mais en remettant sur le devant de la scène l’histoire de la lecture et l’histoire de l’édition, qui sont encore aujourd’hui les grandes refoulées de l’historiographie, alors qu’elles permettraient de sortir de conceptions par trop textualocentrées, dont la critique littéraire telle qu’elle se pratique usuellement et aussi la génétique peinent à s’extraire, pour restituer la dynamique des appropriations au coeur même de la fabrique du littéraire, quoique pas uniquement : les articles réunis ici explorent en effet une vaste gamme de supports matériels, allant du document radiophonique éclairé par les archives (Nicholas Dion) à l’anthologie (Maxime Cartron), en passant par des Mémoires édités sur plusieurs époques (Annarita Palumu), des documents ecclésiastiques en latin (John Nassichuk) ou en langue vernaculaire (Manon Chaidron), ou encore ce qui a passé pendant longtemps pour un ouvrage philosophique hétérodoxe (Jean‑François Vallée).

Une telle diversité fait également état de la variété des disciplines concernées par ces appropriations, qui ne relèvent pas que de l’histoire de la littérature, loin de là : germanistique, histoire ecclésiastique, histoire de l’art, « grande » histoire, histoire de la libre pensée… Autant de domaines de recherche s’imbriquant grâce à cette dialectique de l’édition et de l’appropriation, qui fait apparaître de la sorte des phénomènes de croisements disciplinaires impossibles à mettre en lumière autrement. À cet égard, il n’est pas interdit de réfléchir à de nouvelles applications sur d’autres types de corpus, ce dossier revêtant avant tout une fonction exploratoire.


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