Quand qualité de l’eau rime avec science collaborative
«Les gens qui occupent le territoire sont ceux qui ont le plus d’informations sur celui-ci. Ils sont les mieux placés pour nous aider. Il est impératif que la population locale soit en première ligne de ceux qu’on implique dans la protection et la surveillance de leur territoire.»
Olivier Saint-Jean-Rondeau termine sa maîtrise en géomatique, profil physique de la télédétection (observation de la Terre par les satellites). Ce programme l’a amené à étudier les effets des changements climatiques sur le couvert neigeux de l’Arctique canadien. Lui et son camarade, Gaspard Durieux, ont ainsi imaginé WeTest, un projet qui propose de développer des méthodologies de collaboration entre les milieux scientifiques et les citoyens pour la réalisation de mesures de la qualité de l’eau et de l’état du manteau neigeux.
Un projet transdisciplinaire
L’innovation technologique du projet WeTest s’inscrit dans un partenariat interfacultaire : les étudiantes et étudiants de fin de baccalauréat de la Faculté de génie collaboreront au développement de capteurs de type laboratoire sur puce et aideront à leur connexion aux téléphones intelligents. Cette technologie servira à tester la qualité de l’eau. Les étudiants élaboreront ensuite la plateforme d’une application ludique qui guidera les utilisateurs dans la collecte de données par la réalité augmentée. Le défi est de connecter la technologie colorimétrique du capteur à un téléphone intelligent et de bâtir une interface de données décentralisée qui permettra à des milliers de personnes de consulter l’état des cours d’eau qui ont été testés. Ainsi, le changement de couleur du capteur, lorsqu’il est en contact avec des bactéries et des contaminants comme l’E. Coli, permettra à l’utilisateur de signaler la présence d’eau souillée et d’en informer toute la communauté par l’entremise de l’application.
Concrètement, toute personne dotée d’un téléphone intelligent et d’un capteur sera guidée, étape par étape, pour la réalisation de mesures dans le cours d’eau de son choix afin de collecter et partager ses informations. En plus d’être utiles aux communautés locales, ces données contribueront aux connaissances scientifiques sur la gestion de l’eau en permettant aux chercheuses et aux chercheurs de solliciter la participation citoyenne afin d’augmenter la quantité de données collectées. D’autre part, des étudiants du Département de géomatique auront pour mandat de concevoir une plateforme géomatique pour faciliter l’hébergement et la visualisation des milliers de données accessibles partout dans le monde.
Selon Olivier, l’expérience utilisateur est très importante : il faut rendre la collecte de données plus simple, incorporer des tutoriels et des capsules pédagogiques pour guider les actions du public et donner de la valeur aux actions entreprises par les citoyens. Ceux-ci seront invités à assumer la responsabilité de prendre soin de leur territoire et deviendront des acteurs de changement.
De Sherbrooke à Brasilia
En termes de contribution internationale, WeTest s’est également rendu au Brésil lors du Forum mondial sur la préservation de la qualité de l’eau. Le 5 novembre 2015, le Rio Doce a été affecté par une grave catastrophe minière. Des métaux lourds ont pollué plus de 600 km de la rivière touchant ainsi 1,2 million de personnes. Olivier et Gaspard ont proposé de distribuer à la population de cette région des détecteurs de métaux lourds pour que les personnes affectées puissent vérifier la qualité de l’eau.
« Un simple test fait par une personne peut en aider des centaines si ce dernier est partagé correctement sur une plateforme de géographie collaborative, explique Olivier. Doter les citoyens d’outils collaboratifs pour prendre conscience de l’état de santé de leur territoire pourrait contribuer à améliorer des millions de vies ».
La pertinence sociale d’une telle action est indiscutable.
« C’est nécessaire dans l’ensemble des pays en voie de développement comme l’Inde et le Brésil, soutient le jeune chercheur. Des initiatives de gestions décentralisées apportent des solutions beaucoup plus fonctionnelles et demandent moins de ressources financières tout en étant moins vulnérables à la corruption. »
La vision de leur projet est de changer le paradigme dans lequel les gens pensent que ce n’est qu’en changeant leurs habitudes de consommation qu’ils vont contribuer à la protection de l’environnement. Olivier croit qu’avec WeTest, les citoyens pourront incarner un rôle d’observateur en collaboration avec les scientifiques des institutions et ainsi avoir une voix dans cet enjeu alarmant.
Si vous aussi vous croyez au potentiel de cette vision et avez envie de contribuer à ce changement, visitez la page Facebook du projet WeTest et restez à l’affût de ses prochaines activités pour ne rien manquer!