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Traduire le genre dans Je suis une maudite sauvagesse d'An Antane Kapesh

Ana Kancepolsky Teichmann et René Lemieux

En 1976, An Antane Kapesh fait publier en collaboration avec l'anthropologue José Mailhot le livre coup de poing Je suis une maudite sauvagesse - Eukuan nin matshimanitu innu-iskueu aux éditions Leméac. Le texte est alors révolutionnaire dans le monde de l'édition québécoise : c'est la première fois qu'une langue autochtone obtient, avec un écrit contemporain, le statut de "langue littéraire". Le bilinguisme de l'oeuvre amène à réfléchir à la traduction, ici en particulier par des femmes - Mailhot traduisant Kapesh et, dans une version récente en anglais, Sarah Henzi traduisant le texte français. La question qui anime cet article est l'enjeu que prend le genre (et le colonialisme) dans l'acte traductif d'une langue peu ou pas genré (comme l'innu-aimun) à une langue très genrée. L'objectif n'est pas de comparer les versions pour y déceler des "erreurs" de langue, mais plutôt, pour employer l'expression d'Antoine Berman, de comprendre la "position traductive" des traductrices face à un tel texte.