Prix Relève étoile Paul-Gérin-Lajoie
Internet et anxiété chez les ados : les filles plus vulnérables
Photo : Michel Caron - UdeS
Plus une adolescente passe de temps sur Internet à l’âge de 15 ans, plus elle aura de risques d’avoir des symptômes d’anxiété à 17 ans. Cela est vrai pour les filles, mais pas pour les garçons. C’est ce que démontre une étude du stagiaire postdoctoral de l’Université de Sherbrooke, Gabriel Arantes Tiraboschi, publiée dans la revue Preventive Medicine Reports qui lui a permis d’être récompensé du prix Relève étoile Paul-Gérin-Lajoie du Fonds de recherche du Québec.
Gabriel Arantes Tiraboschi, qui réalise un postdoctorat sous la direction des professeures Caroline Fitzpatrick et Gabrielle Garon-Carrier à la Faculté d’éducation, s’intéresse depuis sa maîtrise aux liens entre l’utilisation des écrans et la santé des jeunes.
Les jeunes générations sont nées avec les écrans et avec Internet. Or les effets ne sont pas encore bien compris. On constate une préoccupation grandissante au niveau international et une explosion des recherches.
Gabriel Arantes Tiraboschi
Analyser le sens du lien entre Internet et anxiété
Gabriel s’est basé sur les données de 1324 jeunes de l’Étude longitudinale du développement des enfants du Québec de l’Institut de la statistique du Québec. Les jeunes ont répondu à des questions à 15 ans puis à 17 ans sur le temps passé sur Internet (excluant les activités en ligne à l’école) d’une part, et sur les symptômes d’anxiété généralisée et d’anxiété sociale, d’autre part.
Il a alors utilisé une modélisation statistique de pointe afin de répondre à ces questions : est-ce le temps passé en ligne qui rend les adolescentes et adolescents plus anxieux? Ou existe-t-il une stratégie d’évitement des jeunes plus anxieux qui passeraient alors plus de temps sur Internet? Gabriel illustre ainsi la démarche : « C’est un peu comme répondre à la question de l’œuf et de la poule. Qu’est-ce qui arrive en premier? »
Photo : Michel Caron - UdeS
La littérature scientifique mettant en évidence une différence entre les filles et les garçons en ce qui concerne les effets de l’utilisation des écrans, le modèle développé pour cette étude a été conçu pour analyser les liens pour chaque sexe.
Pourquoi les filles, et pas les garçons?
Les résultats obtenus démontrent clairement que ce n’est pas parce que les ados vivent plus d’anxiété qu’ils vont passer plus de temps en ligne. En revanche, l’étude révèle que les adolescentes qui passent plus de temps sur Internet à 15 ans ont plus de risques d’avoir des symptômes d’anxiété généralisée et d’anxiété sociale à 17 ans.
Symptômes d’anxiété généralisée et d’anxiété sociale : quelle différence?
L’anxiété sociale se manifeste par une peur associée aux activités sociales ou à des situations où la personne est susceptible d’être observée. Dans ce type de situation, elle ressentira la peur d’être jugée négativement. Elle pourra vouloir éviter certaines interactions sociales, sources d’anxiété.
L’anxiété généralisée se caractérise par des préoccupations qui interfèrent avec la vie de tous les jours. Les inquiétudes persistantes et excessives sont difficiles à contrôler et ont une incidence sur la vie quotidienne (vie familiale, école, travail…).
Dans cette étude, aucun effet n’a été observé pour les garçons. Selon Gabriel, cela pourrait s’expliquer par le fait que les filles passent plus de temps sur les médias sociaux que les garçons, étant alors plus exposées à des contenus générant une pression importante, en lien avec le mode de vie ou l’apparence physique, par exemple.
Les médias sociaux semblent plus toxiques pour les filles, qui ont une tendance accrue à se comparer à ces contenus souvent irréalistes.
Gabriel Arantes Tiraboschi
Le chercheur aimerait d’ailleurs creuser cette question dans le cadre de futures recherches.
De São Paulo à Sherbrooke pour explorer les effets des écrans
Après avoir collaboré avec la professeure Caroline Fitzpatrick sur une recherche démontrant que la pratique des jeux vidéo est un facteur de risque pour le développement de symptômes du trouble du déficit de l'attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) au début de l'adolescence, Gabriel a décidé de poser ses valises à Sherbrooke.
J’étais très heureux de venir à l’Université de Sherbrooke et de me joindre à l’équipe des professeures Caroline Fitzpatrick et Gabrielle Garon-Carrier qui sont reconnues pour leurs travaux sur les effets de l’utilisation des écrans sur les enfants.
Gabriel Arantes Tiraboschi
Photo : Michel Caron - UdeS
Il contribue ainsi à plusieurs recherches en psychoéducation. Dans de nouvelles études, publiées en août 2025, Gabriel a, là aussi, utilisé une méthode d’analyse statistique visant à mieux comprendre certains effets de la pratique des jeux vidéo et résoudre la fameuse question de l’œuf et de la poule.
Une première étude démontre par exemple qu’entre 6 et 10 ans, il existe des liens dans les deux sens, et variants selon l’âge, entre le temps de jeux vidéo et les symptômes du TDAH, notamment pour l’hyperactivité et l’impulsivité. Une autre recherche met en évidence des associations entre les jeux vidéo et une baisse de motivation scolaire chez les garçons de 7 à 10 ans.
Ces études sont autant d’exemples qui éclairent un peu plus les effets du temps passé sur les écrans sur la santé des enfants et des ados. Devenu papa d’un petit Eric récemment, Gabriel le confirme : « Pour ce qui est du temps d’écran, je vais suivre les recommandations à la lettre et éviter les écrans avant deux ans. C’est tellement important! »
À propos du prix Relève étoile Paul-Gérin-Lajoie
Le prix Relève étoile Paul-Gérin-Lajoie, l’un des trois prix Relève étoile du Fonds de recherche du Québec, reconnaît l’excellence des productions réalisées par la relève québécoise en recherche dans le domaine Société et culture.
Une recherche qui s'élève à la puissance dix!
Ce n'est pas un hasard si l'Université de Sherbrooke se démarque en recherche. Son secret? Le mariage judicieux du partenariat, de la mutualisation et de l'interdisciplinarité, trois forces qui font désormais sa renommée. Apprenez-en plus sur ce qui a propulsé l'UdeS au rang des universités de recherche les plus prolifiques au Canada.
Informations complémentaires
- Article (en anglais) « Adolescent internet use predicts higher levels of generalized and social anxiety symptoms for girls but not boys »
- Bande dessinée « Léa découvre d’où provient son anxiété »
- Groupe de recherche et d’intervention sur les adaptations sociales de l’enfance (GRISE)
- En savoir plus sur les études en recherche à la Faculté d'éducation