Grand Prix du livre de la Ville de Sherbrooke 2016
Le professeur Jean-Pierre Le Glaunec remporte les grands honneurs
Le professeur d'histoire Jean-Pierre Le Glaunec remporte le Grand Prix de la Ville de Sherbrooke, volet essai, pour son ouvrage L’armée indigène. La défaite de Napoléon en Haïti. Ce prix est accompagné d'une bourse de 4000 $, offerte par la Ville de Sherbrooke et par l’Université de Sherbrooke.
« Je suis très heureux! Écrire L'armée indigène n'allait pas de soi. J'ai commencé la recherche en janvier 2010, quelques jours après le tremblement de terre, sur un coup de tête, explique le professeur Le Glaunec. J'ai approché Lux et mon éditeur m'a cru jusqu'au bout en dépit de mes quatre années de retard. Je pensais écrire un petit livre, un essai, sans notes et avec très peu de sources. Je voulais écrire, développer une idée, provoquer. Finalement, j'ai fait de la recherche en Haïti, en Floride, à Washington, New York, Montréal, Boston, Londres, Aix-en-Provence, Paris et Vincennes! Mon livre comprend plusieurs centaines de notes et des sources très diverses. Il n'a pas toujours été facile à écrire dans un climat où la quantité est de plus en plus valorisée par le milieu. Écrire ce livre supposait de prendre le temps et j'avais donc besoin de la confiance de mes collègues. »
D'origine française, Jean-Pierre Le Glaunec considère ce prix comme une étape importante dans la construction de son identité sherbrookoise. « J'ai choisi Sherbrooke dès que j'ai vu la ville et son université. Je voulais élever mes enfants au Québec et développer mes projets de recherche ici. »
Spécialiste de l’histoire des États-Unis, d’Haïti et des Amériques noires, il travaille actuellement sur le développement de la plateforme marronnage.info, sur l'historiographie des résistances à l'esclavage en France et sur un nouveau projet de recherche CRSH sur l'histoire méconnue des résistances à l'esclavage à la Nouvelle-Orléans (1811-1836). Ce projet porte en particulier sur les formes culturelles de résistance à l'esclavage, par la danse et la musique notamment. Il s'intéresse aussi à l'histoire d'une pâtisserie, la tête-de-nègre.
Et a-t-il un autre ouvrage en chantier? « Peut-être! Je rencontrerai justement une collègue française prochainement à ce sujet, confie-t-il. Autrement, le prochain ouvrage sera l'adaptation de ma thèse sur les annonces d'esclaves en fuite en Louisiane, en Jamaïque et en Caroline du sud (1801-1815), à paraître aux Éditions Karthala. »
Notons que deux autres finalistes étaient en lice pour ce prix :
- Jacques Beaudry remporte le 2e prix pour Annemarie Schwarzenbach : la lutte avec l’Ange.
- Nathalie Watteyne remporte le 3e prix pour les Œuvres complètes d’Anne Hébert, v 5. Théâtre, nouvelles et proses diverses.
À propos de L’armée indigène. La défaite de Napoléon en Haïti
Valmy, Austerlitz, Ulm, Waterloo... autant de batailles dont les noms nous sont familiers. Mais qui, en dehors d’Haïti, a déjà entendu parler de la bataille de Vertières, point d’aboutissement spectaculaire et sanglant de la guerre d’indépendance haïtienne ? Qui sait que cet affrontement s’est soldé, en 1803, par l’une des pires défaites napoléoniennes ? Que les Noirs s’y réclamaient des idéaux de la Révolution ? Ceux qui connaissent cette histoire sont peu nombreux, car la France vaincue s’est employée à effacer les traces de sa déconfiture. Pourtant, cette bataille aurait dû faire date : son issue, désastreuse pour la puissance coloniale française, allait fissurer de manière irrémédiable les assises de l’esclavage.
Dans cet ouvrage, Jean-Pierre Le Glaunec décrit la violence inouïe de cette guerre entre maîtres et anciens esclaves, entre les forces des généraux Leclerc et Rochambeau, et l’armée, dite « indigène », de Jean-Jacques Dessalines. Il interroge le sens de son occultation par l’historiographie française, mais aussi le rapport trouble que l’élite du pouvoir haïtienne entretient avec sa mémoire, symbole d’émancipation parfois encombrant pour qui désire maintenir les populations asservies.