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Élaboré par l’équipe du professeur Philippe Mabilleau

Un algorithme conçu à l’UdeS pour contrôler les chauffe-eaux à distance

Philippe Mabilleau, professeur à la Faculté de génie
Philippe Mabilleau, professeur à la Faculté de génie
Photo : UdeS

Sept heures, le réveil sonne. Les lumières s’allument. Vite sous la douche pendant que le café se prépare et que les plinthes du chauffage s’activent! On met les croissants au four. On fait cuire les œufs. On se sèche les cheveux...

La scène se répète chaque matin. Et un autre scénario semblable se produit le soir après le retour à la maison. Pour les fournisseurs d’électricité, ces pointes de demande en électricité constituent un problème important. Tout le réseau électrique des villes, des provinces et des états est conçu pour y répondre. Donc inutilement cher et puissant 20 sur 24.

« Ça fait longtemps que l’idée de concevoir une façon de différer dans le temps une partie de la demande pendant les heures de grande consommation de matin et du soir me trotte dans la tête », se rappelle Philippe Mabilleau, professeur au Département de génie électrique et de génie informatique.

Il y a quelques années, avec un étudiant au doctorat, Simon Ayoub, le professeur Mabilleau a élaboré un algorithme, inspiré des logiciels de partage de fichiers pair à pair de type torrent, qui permet de gérer à distance plusieurs millions de chauffe-eaux rendus capables de communiquer et d’échanger des données entre eux. Grâce à un dispositif électronique placé sur les chauffe-eaux, cet algorithme allait permettre d’en contrôler la température et de s’assurer qu’ils consomment moins d’électricité pendant les périodes de pointe, tout en préservant la sécurité, le confort et la vie privée des utilisateurs.

« Nous estimons que 30 % de la pointe de consommation matinale est liée aux chauffe-eaux, explique le professeur Mabilleau. Si tous les chauffe-eaux du Québec étaient équipés d’un contrôleur, la réduction de la demande d’électricité en pointe qui en résulterait pourrait aller jusqu’à éviter la construction d’une unité de production comme un barrage. »

Une fois l’algorithme testé grâce à des simulations informatiques, Philippe Mabilleau s’est associé à CanmetÉNERGIE, un laboratoire de Ressources naturelles Canada situé à Varennes, pour une phase de test sur une vingtaine de chauffe-eaux.

À la suite de ce premier test, le laboratoire Canmet s’est associé à l’entreprise CaSA afin de tester la nouvelle technologie et analyser le potentiel de stockage d’énergie sur un parc de plusieurs centaines de chauffe-eaux résidentiels sur le territoire de Sherbrooke.

Les Sherbrookois invités à tester les contrôleurs

Les données récoltées durant cette seconde phase de test serviront à l’analyse du potentiel de stockage d’énergie des chauffe-eau résidentiels dans le contexte de cette nouvelle technique. Le laboratoire scientifique CanmetÉNERGIE pourra procéder à l’analyse des données et à la validation des stratégies de contrôle lors de périodes de pointes de demande en électricité.

CaSA et CanmetÉNERGIE sont d’ailleurs à la recherche de foyers dans la grande région de Sherbrooke pour participer à ce projet de démonstration du potentiel de techniques avancées de délestage des chauffe-eaux. En plus de contribuer à une meilleure gestion de l’énergie, les volontaires sélectionnés recevront un contrôleur de chauffe-eau intelligent de dernière génération qui leur permettra de réaliser des économies substantielles et un rabais sur les autres équipements vendus par CaSA.

Les gens intéressés à prendre part à ce projet, baptisé Projet Neptune, peuvent s’inscrire en ligne grâce au lien apparaissant au bas de cette page.

Bien plus que les chauffe-eaux

Les périodes de grande consommation du matin et du soir causent des maux de tête à l’ensemble des producteurs et distributeurs d’énergie, qui sont à la recherche de moyens de diminuer la demande lors de ces périodes. Une compensation financière pour les consommateurs qui accepteraient de se doter de tels contrôleurs est donc envisageable.

Dans un tel contexte, le professeur Mabilleau a plusieurs autres idées d’application en tête pour l’algorithme qu’il a développé.

Il pourrait par exemple être intégré à des thermostats et permettre de diminuer la consommation électrique liée au chauffage. Dans des régions plus chaudes qu’au Québec, il pourrait permettre de différer la demande d’électricité liée à la climatisation industrielle. Il pourrait aussi, lorsque le nombre de véhicules électriques augmentera, être intégré aux bornes de recharge.

Le professeur Mabilleau rappelle que certains producteurs d’électricité ailleurs dans le monde commencent même à moduler les tarifs en fonction de l’heure afin d’inciter leurs abonnés à minimiser l’appel en puissance durant ces périodes de pointe. Si ce type d’approche se développe, les entreprises de distribution d’électricité pourraient même aller jusqu’à acheter aux consommateurs l’énergie en trop stockée chez eux dans divers appareils, notamment les véhicules électriques, et la redistribuer dans leur réseau lors des périodes de pointe.

L’algorithme développé par le professeur Mabilleau pourrait alors effectivement se retrouver dans des millions et des millions d’appareils aux quatre coins de l’Amérique.


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