Une équipe de recherche québécoise est la première à se pencher sur l’effet protecteur du vaccin BCG à long terme contre la COVID-19, utilisant les données d’un registre de vaccination
COVID-19 : Avoir reçu le vaccin BCG durant l’enfance procure-t-il un effet protecteur?
Montréal, le 25 octobre 2021 – Le fait d’avoir été vacciné durant l’enfance avec le vaccin BCG (ou Bacille de Calmette-Guérin) contre la tuberculose n’est pas un facteur protecteur à long terme face à la COVID-19, contrairement à ce qu’on a pu penser en début de pandémie. Une équipe de scientifiques de l’Institut national de la recherche scientifique (INRS), de l’Université de Sherbrooke, de l’Université de Montréal et de l’Université Laval a mené, auprès de la population québécoise, la toute première étude comparant le statut vaccinal dans l’enfance chez des personnes atteintes de la COVID-19 et chez un groupe témoin. Les travaux, publiés dans la revue Vaccine, apportent un éclairage nouveau sur le lien possible entre le vaccin BCG et la COVID-19.
Un message de santé publique important
À ce jour, la plupart des études publiées ont montré une corrélation entre la vaccination BCG dans la population et un plus faible taux de mortalité due à la COVID-19. Toutefois, selon l’équipe de scientifiques québécois, la méthodologie de ces études ne permettait pas de déterminer si les personnes ayant reçu le vaccin BCG étaient celles qui présentaient une meilleure survie ni de considérer certains facteurs qui auraient pu biaiser les analyses.
« Notre étude a démontré, de façon très convaincante, que le BCG, un puissant stimulateur de l’immunité innée, ne confère pas une protection à très long terme contre la COVID-19. Ce n’est pas le résultat que nous espérions, mais au moins cette question, qui était pertinente, surtout pour les pays du Sud, peut être éliminée des écrans radar », affirme le Dr Jacques Pépin, premier auteur de l’étude et professeur associé à l’Université de Sherbrooke et au Centre de recherche du CHUS.
« Même si nos résultats sont négatifs, il est important, d’un point de vue de santé publique, de les communiquer au public, puisqu’ils vont à l’encontre de ceux obtenus dans les études antérieures, qui présentaient des faiblesses méthodologiques importantes. À ce jour, ils sont donc les plus valides disponibles à ce sujet », précise Marie-Claude Rousseau, professeure-chercheuse en épidémiologie à l’INRS et auteure principale de l’étude.
La chercheuse rappelle que le potentiel effet protecteur du vaccin BCG contre la COVID-19 a fait l’objet d’un grand engouement scientifique et médiatique très tôt dans la pandémie.
« Au cours de la dernière année, nous avons relevé 25 fois plus de demandes de la part du public afin de vérifier s’il avait reçu le vaccin BCG durant l’enfance », lance celle qui est aussi la gestionnaire scientifique du registre québécois de vaccination au BCG hébergé par l’INRS, une ressource informatisée unique qui recense 4,2 millions de certificats de vaccination émis dans la province entre 1956 et 1992.
Pas de protection à long terme
L’équipe de recherche a recruté 920 individus qui avaient obtenu un résultat positif à un test par PCR pour la COVID-19 à l’Hôpital Maisonneuve-Rosemont (HMR), faisant partie du CIUSSS de l’Est-de-l’Île-de-Montréal, et au Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke (CHUS), entre mars et octobre 2020. En parallèle, le groupe témoin comptait 2123 personnes qui n’ont pas été atteintes de COVID-19 mais qui ont eu au moins une autre analyse réalisée au laboratoire de microbiologie pendant la même période.
« Ce projet a été mené entre autres grâce à l’implication d’une vingtaine d’étudiants en médecine de l’Université de Sherbrooke et de l’Université de Montréal. Ceux-ci ont communiqué par téléphone avec les participants afin d’administrer un questionnaire. Nous sommes d’ailleurs très reconnaissants envers toutes les personnes qui ont accepté de participer à cette étude », explique la Dre Annie-Claude Labbé, co-auteure de l’étude, microbiologiste et infectiologue à l’HMR.
Seules des personnes nées au Québec entre 1956 et 1976 ont été recrutées. Leur statut vaccinal a été vérifié dans le registre québécois de vaccination au BCG grâce aux informations qu’elles ont fournies à l’équipe de recherche. Parmi les personnes testées positives à la COVID-19, 54 % avaient reçu le vaccin BCG durant l’enfance. Cette proportion s’élevait à 53 % dans le groupe témoin.
Les scientifiques n’ont pu observer d’effet protecteur du BCG à long terme. Leurs analyses ont tenu compte d’autres facteurs comme le type d’emploi de la personne, le sexe biologique, l’âge, l’indice de défavorisation matérielle et le fait de résider dans une zone rurale ou urbaine.
« Même si nous nous attendions à observer un léger effet protecteur, nous n’avons pas été surpris par les résultats. Les participantes et participants vaccinés avaient reçu ce vaccin il y a plusieurs décennies. Chez les personnes ayant reçu le vaccin plus récemment, c’est-à-dire au début des années 1970, aucun effet protecteur n’a également pu être observé. Toutefois, le nombre de personnes était limité, diminuant grandement la possibilité de détecter un faible effet », explique la professeure Rousseau.
Un vaccin suscitant l’intérêt
La professeure Rousseau fait remarquer que quelques études ont suggéré un effet protecteur à court terme du BCG contre la COVID-19 et que des essais cliniques sont en cours à l’international, ce qui semble prometteur.
« C’est intéressant de voir le regain d’intérêt pour ce vaccin qui est vieux d’un siècle, particulièrement en ce qui a trait à ses effets non spécifiques, autres que sur la tuberculose, ces cinq à dix dernières années », conclut la chercheuse.
À propos de l’étude
L’article Does BCG provide long-term protection against SARS-CoV-2 infection ? A case–control study in Quebec, Canada, par Jacques Pépin, Annie-Claude Labbé, Alex Carignan, Marie-Elise Parent, Jennifer Yu, Cynthia Grenier, Stéphanie Beauchemin, Philippe De Wals, Louis Valiquette, Marie-Claude Rousseau (DOI: 10.1016/j.vaccine.2021.08.019), a été publié en ligne avant la version imprimée dans Vaccine, en août 2021, par Elsevier. Pour obtenir une copie de l’étude, merci de contacter la salle des nouvelles de Elsevier : newsroom@elsevier.com ou +31 20 485 2719.
Ces travaux ont reçu un soutien financier de la Fondation du CHUS.
À propos de Vaccine
Vaccine est la revue scientifique par excellence pour les personnes s'intéressant aux vaccins et à la vaccination. Il s’agit de la revue officielle de la Edward Jenner Society et de la Japanese Society for Vaccinology. Elle est publiée par Elsevier www.elsevier.com/locate/vaccine.
À propos de l’INRS
L’INRS est un établissement universitaire consacré exclusivement à la recherche et à la formation aux cycles supérieurs. Depuis sa création en 1969, il contribue activement au développement économique, social et culturel du Québec. L’INRS est 1er au Québec et au Canada en intensité de recherche. Il est composé de quatre centres de recherche et de formation interdisciplinaires, situés à Québec, à Montréal, à Laval et à Varennes, qui concentrent leurs activités dans des secteurs stratégiques : Eau Terre Environnement, Énergie Matériaux Télécommunications, Urbanisation Culture Société et Armand-Frappier Santé Biotechnologie. Sa communauté compte plus de 1 500 membres étudiants, stagiaires postdoctoraux, membres du corps professoral et membres du personnel.
À propos de l’Université de Sherbrooke
L’Université de Sherbrooke est au cœur d’un des trois pôles de recherche majeurs du Québec. Reconnue pour son sens de l’innovation, l’UdeS est un partenaire de premier plan des gouvernements supérieurs et régionaux pour favoriser le développement social, culturel et économique. Elle se démarque en outre par la forte croissance de ses activités de recherche au cours des dernières années, ses succès en transfert technologique ainsi que ses initiatives en matière d’entrepreneuriat et d’innovation ouverte en collaboration avec les milieux industriels et sociaux.
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Source : Institut national de la recherche scientifique (INRS)Renseignements :
Julie Robert
Service des communications de l’INRS
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