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Recherches de la professeure Mélanie Levasseur

Éclairer les enjeux de la participation sociale des aînés

Mélanie Levasseur
Mélanie Levasseur
Photo : Robert Dumont

Briser l'isolement des personnes âgées et stimuler leur participation sociale est un enjeu majeur. Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), les aînés qui ont un mode de vie actif vivent plus longtemps et en meilleure santé. L'OMS a d'ailleurs fait de cet enjeu une priorité, en créant le projet Villes amies des aînés, dont Sherbrooke fait partie. Parmi les défis des prochaines décennies, l'arrivée des baby-boomers à l'âge de la retraite pourrait moduler et redéfinir la participation sociale. Or, même si les bienfaits de la participation sociale ont généralement été démontrés empiriquement, il n'y a pas de consensus scientifique sur une définition précise de ce concept. La professeure Mélanie Levasseur vient de publier une étude qui offre une nouvelle base conceptuelle aux chercheurs, et qui peut aider à créer des projets concrets pour stimuler la participation sociale des aînés.

Un concept, plusieurs approches

Professeure à l'École de réadaptation de la Faculté de médecine et des sciences de la santé, Mélanie Levasseur mène aussi des travaux au Centre de recherche sur le vieillissement du CSSS-Institut universitaire de gériatrie Sherbrooke. Elle explique que, depuis une bonne trentaine d'années, plusieurs définitions originales de la participation sociale ont été proposées dans les écrits scientifiques.

Puisque ces définitions provenaient de divers domaines ayant des approches très variées, tels que la santé publique, la réadaptation, la gérontologie, la psychologie, la sociologie et le travail social, il devenait difficile d'effectuer des comparaisons entre les travaux empiriques réalisés. Mélanie Levasseur et des collaboratrices de l'Université de Montréal et de l'Université McGill ont donc entrepris un vaste travail d'inventaire et d'analyse visant à faire la synthèse d'études publiées depuis 1980.

«Pour décortiquer le contenu de chaque définition, l'information a été déconstruite à l'aide de sept pronoms interrogatifs : qui? comment? quoi? où? avec qui? quand? et pourquoi?», explique la chercheuse. Ce travail a permis d'obtenir un classement des différentes définitions selon les éléments inclus. Les résultats de cette classification ont ensuite permis de créer une taxonomie, soit une organisation hiérarchique des activités sociales d'une personne selon différents niveaux d'implication avec autrui.

«Par exemple, lorsqu'une personne se prépare à entrer en relation avec les autres, par exemple, en se lavant ou en s'habillant avant de sortir de chez elle, cette activité comporte un faible niveau d'implication avec autrui», illustre Mélanie Levasseur. Dans les degrés suivants, la personne se trouve en présence d'autres individus, d'abord sans nécessairement interagir ou faire une activité avec eux, jusqu'à s'engager pleinement.

«Les degrés supérieurs concernent des activités faites avec d'autres, d'aider les autres et enfin, de contribuer à la société. Cette taxonomie permet aux projets sur la participation sociale de situer le niveau auquel l'implication de la personne est visée, et de fournir des comparaisons et des repères qui nous permettent de mieux planifier des interventions», poursuit-elle.

Vers un consensus

En ce sens, Mélanie Levasseur considère que son étude aura diverses répercussions pour ses propres travaux futurs et éventuellement pour ceux de plusieurs collègues. «D'abord, lors de l'analyse, nous avons constaté qu'environ le tiers des travaux ne proposaient pas de définition du concept de participation sociale, dit-elle. Notre étude n'a pas la prétention d'offrir un consensus sur une définition, mais permet d'ouvrir la discussion vers un consensus. La taxonomie permet aussi de guider les projets. Par exemple, si on veut intervenir pour modifier la participation sociale et étudier ses déterminants, la taxonomie permet de considérer plus facilement les résultats des travaux antérieurs, et de les classer selon le niveau d'implication avec autrui qu'ils ont utilisé.»

De la théorie aux projets concrets

Si l'étude publiée par Mélanie Levasseur est théorique, il ne faut pas penser pour autant que la professeure se tient loin des projets concrets. Au contraire! Par exemple, elle collabore actuellement avec des intervenants de la Ville de Sherbrooke qui œuvrent autour du projet Ville en santé et de la Société de transport de Sherbrooke. «Ces décideurs ont différentes préoccupations sur le transport, la sécurité, les services municipaux, ou les barrières architecturales qui peuvent influencer la vie des aînés. Ils sont déterminés à donner à nos aînés un environnement qui les aide à demeurer actifs», dit-elle.

Aussi, Sherbrooke accueille le projet Ville amie des aînés, initié par l'OMS, qui vise à prioriser un vieillissement actif et en santé. «Et pour y parvenir, il faut fournir aux aînés des ressources afin qu'ils soient stimulés physiquement et mentalement, dit la professeure. Ces collaborations créent donc des opportunités de recherches futures qui permettront d'intervenir, à la fois en santé publique et en clinique, pour améliorer la participation sociale des aînés.»

Conséquemment, Mélanie Levasseur planifie divers projets de recherche sur la qualité de vie des personnes aînées, dont une étude canadienne sur les déterminants de la participation sociale de personnes vieillissantes (45 ans et plus). Ce projet fait actuellement l'objet d'une demande de financement aux Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC).

Un autre projet, cette fois-ci déjà financé par les IRSC, vise à sensibiliser les aînés à la conduite sécuritaire de leur automobile. «On sait que la conduite automobile est liée à la participation sociale des aînés, explique la chercheuse. L'idée du projet n'est pas de priver les aînés de leur voiture, mais de faire une campagne afin de les conscientiser à l'importance d'adapter leur conduite à leur vieillissement. Une telle adaptation est cohérente avec ce que nous faisons en réadaptation, soit analyser les aptitudes requises pour accomplir une activité, observer ensuite les limites de la personne, pour enfin augmenter ses capacités ou adapter l'activité. Le financement d'un tel projet de sensibilisation illustre bien la volonté de promouvoir la santé de la population vieillissante par le biais d' une priorité nationale de santé publique : l'augmentation de leur participation sociale», conclut Mélanie Levasseur.


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