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Limitation des substances dangereuses dans les équipements électriques et électroniques

Les industriels tardent-ils à appliquer les normes RoHS et DEEE?

Saviez-vous qu’un écran d’ordinateur contient du cyanure, du mercure et du plomb et qu’un écran enterré pollue dix mètres cube de terre pendant 1 000 ans? Xavier Guillaud, le président fondateur de ppm métrologie inc., affirme que « la production sans conscience environnementale n’est que ruine économique ». Invité par le Département de génie électrique et de génie informatique en mars dernier, ce spécialiste de l’électronique aéronautique militaire et de la métrologie électrique appelle l’industrie québécoise de l’électrique et de l’électronique à éliminer des matières dangereuses de leurs produits pour se conformer aux nouvelles normes européennes. Son constat est particulièrement alarmant. Seulement 30 % des entreprises d’ici se sont conformées aux deux nouvelles normes environnementales européennes : les directives RoHS (Restriction of the use of certain Hazardous Substances) et DEEE (déchets d’équipements électriques et électroniques)!

La directive RoHS est entrée en vigueur le 1er juillet 2006 avec comme objectif de restreindre l’utilisation de certaines substances dangereuses dans les équipements électriques et électroniques comme le plomb, le cadmium, le chrome hexavalent, le mercure, les polybromodiphényles (PBB) et les polybromodiphényléthers (PBDE). Quant à la norme DEEE, elle a été mise en application le 13 août 2005 avec comme objectif prioritaire de prévenir les déchets d’équipements électriques et électroniques en favorisant leur réutilisation, leur recyclage et toute autre forme de valorisation afin d’en réduire la quantité à éliminer.

L’industrie électrique et électronique au Québec

Plus de 27 000 personnes travaillent dans l’industrie électrique et électronique au Québec qui réalise un chiffre d’affaires de 10 milliards annuellement dont les trois quarts proviennent de l’exportation. 5 000 emplois sont menacés en raison de l’inaction des entreprises québécoises qui n’ont pas adopté la directive d’éco-conception RoHS visant à réduire les métaux lourds et les retardants de flamme. Les multinationales comme IBM, Hewlett-Packard et Toshiba ont pourtant emboîté le pas! La Chine, la Corée, l’Australie et de 20 à 30 États américains adopteront incessamment ces deux normes contraignantes. Des contrats lucratifs seront perdus si les PME résistent et ne se conforment pas!

L’éco-conception

Le sommet de la Terre qui a eu lieu à Rio de Janeiro en 1992 a défini l’éco-conception comme étant la mise en œuvre d’une politique environnementale au sein des entreprises qui intègrera toute les étapes du cycle de vie du produit depuis sa fabrication jusqu’à son élimination.

Ces nouvelles directives de la Communauté économique européenne forcent les industries à revoir leur façon de faire dans une démarche d’éco-conception. Les entreprises adoptant cette philosophie se distinguent de la concurrence par les innovations apportées au cycle de production d’un bien en tenant compte des impacts environnementaux et sociaux tout en conservant la qualité d’usage du produit. L’ère de l’ensevelissement de déchets dans un trou est révolue. Les industriels ont maintenant des obligations à respecter, sans quoi, ils peuvent recevoir des amendes et même être emprisonnés s’ils font de fausses déclarations de conformité. Les amendes varient entre 11 000 $ et 21 M $.

Gestes à poser

Les industries devront s’attaquer rapidement aux contraintes imposées par ces normes. L’utilisation de composants conformes RoHS, l’amélioration du procédé de fabrication (mise à niveau des équipements, maîtrise des processus RoHS, formation de la main-d’œuvre) et l’éco-conception des produits et de leurs emballages (analyses de cycle de vie, diagnostiques, bilans et personnel qualifié) doivent être soutenues par des organismes de formation et de recherche ainsi que par des entreprises de services et manufacturières.

M. Guillaud a terminé sa présentation en mentionnant que les civilisations antiques ont fait grand usage de plomb dans la fabrication de produits provenant de l’industrie métallurgique avec comme conséquence une détérioration de l’environnement et de la santé humaine. Ludwig van Beethoven serait apparemment mort d’une intoxication sévère au plomb (saturnisme). À la même époque, du sel de plomb était ajouté au vin pour le rendre plus sucré. L’ère moderne n’a guère fait mieux en utilisant à outrance des substances dangereuses en raison d’impératifs militaires, économiques et techniques. Avec l’implantation imminente des nouvelles normes suivantes, la REACH (Registration, Evaluation, Autorisation and Restriction of Chemicals), la EuP (Energy-using Products) et la PPW (Packaging and Packaging Waste), le Québec devra intégrer l’éco-conception de produits dans la formation académique de l’ingénieur, du technicien et de l’opérateur pour ne plus répéter les erreurs du passé. « Science sans conscience n’est que ruine de l’âme », écrivait avec justesse Rabelais en 1532.

Source et renseignements :

Marty-Kanatakhatsus Meunier, agent d'information et chargé de cours

m.meunier3@usherbrooke.ca

819-821-8000 poste 62141