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Refonte de la cartographie des zones inondables en Estrie

Mieux déterminer les régions à risque d’être inondées

Kayak, vestes de flottaison, GPS différentiel et courantomètre à effet Doppler étaient les outils à prévoir pour cette journée de travail somme toute très agréable sur le bord de la rivière !

Mélanie Trudel et Marie-Amélie Boucher, toutes deux professeures en génie civil et génie du bâtiment à la Faculté de génie, travaillent ensemble à refaire la cartographie des zones inondables en Estrie, plus précisément pour la MRC du Haut-Saint-François, la MRC de Coaticook et la Ville de Sherbrooke. Le projet est également réalisé en collaboration avec le professeur Richard Fournier, du Département de géomatique appliquée.

Depuis les inondations mémorables de 2017, le gouvernement du Québec a en effet octroyé du financement aux municipalités afin de refaire la cartographie des zones inondables de certaines régions. Les modèles hydrauliques qui émergeront de ces recherches seront intégrés aux schémas d’aménagement des municipalités. De plus, cette information indispensable aidera à prévoir, en situation de crise, les niveaux d’eau en fonction des débits prévus. On pourra ainsi mieux déterminer les régions à risque d’être inondées. L’impact des changements climatiques sur la cartographie des zones inondables sera également évalué.

Pour réussir à faire une cartographie la plus précise possible, les observations faites sur le terrain avec toute mon équipe sont essentielles, affirme Mélanie Trudel. Les modèles que l’on arrivera à construire le seront à partir des données de drones, de satellites, mais aussi beaucoup à partir des observations prises directement en rivière : mesures de niveaux d’eau, caractéristiques du fond de la rivière – la bathymétrie – et des berges, la rugosité, la végétation. Pour le débit, c’est plus complexe. On ne peut pas prendre de mesures directes de débit. On doit mesurer des vitesses en rivière en fonction des niveaux d’eau. C’est là que l’aide de Marie-Amélie est essentielle!

Intégrer l’incertitude dans les courbes prévisionnelles

La partie du projet qui est entre les mains de Marie Amélie Boucher touche le degré d’incertitude qui définit la relation entre le débit d’une rivière et le niveau d’eau correspondant. Cette relation se visualise avec une courbe niveau-débit, aussi appelée courbe de tarage.

J’aime quantifier les incertitudes, résume la Pre Boucher. La relation niveau-débit comprend énormément d’incertitudes. Tout d’abord à cause des outils utilisés, ensuite avec la configuration comme telle d’une rivière qui peut varier, changer, se déplacer, et, finalement, à cause de la faible quantité d’observations prises en période de crue, au cours de laquelle les niveaux d’eau sont extrêmement hauts. Cette période n’est pas sécuritaire pour faire des campagnes de mesures. Tout cela contribue à rendre incertaine notre courbe niveau-débit et à devoir fonctionner avec des extrapolations. L’idée est donc d’arriver à représenter, à intégrer l’incertitude dans les courbes niveau-débit pour pouvoir présenter plusieurs scénarios probables de débits. On utilise donc des probabilités pour arriver à la modélisation, qui servira ensuite à la cartographie des zones inondables, dans laquelle l’incertitude aura été considérée et intégrée. Au final, on aura contribué à identifier des zones possiblement inondables plus ou moins étendues en fonction de l’incertitude.

Nouveau satellite en 2021

Tel que mentionné par Mélanie Trudel, plusieurs observations sont obtenues par les sorties sur le terrain, mais également grâce à la télédétection, par drone ou par satellite. En 2021, un nouveau satellite sera lancé par la NASA et le Centre national d'études spatiales, en collaboration avec l’Agence spatiale canadienne et l’Agence spatiale du Royaume-Uni. La Mission SWOT - Surface Water and Ocean Topography - permettra de sonder 90 % des eaux de surface de la Terre, en mesurant par exemple leur niveau, leur largeur et leur pente. L’objectif est de mieux comprendre le cycle de l’eau, de mieux cerner la circulation des océans et d’améliorer les modèles climatiques.

Avec les satellites actuels, on peut avoir certaines informations en lien avec les océans. Mais ce sera la première fois qu’un satellite nous permettra d’avoir des données reliées aux eaux intérieures, comme les lacs d’au moins 250 mètres par 250 mètres et les rivières de 100 mètres de largeur minimum. Avec nos mesures et nos modèles, mon équipe va contribuer à la période de calibration du satellite. Quand un nouveau satellite entre en fonction, il y a toujours une période de calibration pour vérifier si ses données sont fiables. Et une fois calibré, il va inversement pouvoir nous aider à bonifier, ajuster les modèles, ici en Estrie, mais aussi partout dans le monde.

Afin d’être prête pour la Mission SWOT, l’équipe de Mélanie Trudel et de Marie-Amélie Boucher devra refaire la cartographie des zones inondables en Estrie d’ici la fin 2020. Court délai, oui, mais motivation et destination plutôt bien ancrées !


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