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Publication dans Nature Cancer

Les médecins pourront donner des pronostics de cancer plus précis grâce à l’intelligence artificielle

Parmi les coauteurs de l’étude figure le professeur Martin Vallières, du Département d’informatique à la Faculté des sciences.
Parmi les coauteurs de l’étude figure le professeur Martin Vallières, du Département d’informatique à la Faculté des sciences.
Photo : Michel Caron - UdeS

C’est le choc : le cancer s’est invité dans votre vie. S’ensuit un déferlement de questions vitales à votre résilience : Vais-je m’en sortir? Quelles sont mes chances de survie? Ce traitement va-t-il fonctionner pour moi? Une équipe de recherche interuniversitaire a développé une infrastructure basée sur l’intelligence artificielle ayant pour but de prédire la réponse individuelle aux traitements oncologiques.

Cette avancée, qualifiée de majeure, porte le nom de MEDomics et fait l’objet d’une publication dans la prestigieuse revue scientifique Nature Cancer.

Dans l’article cosigné par le professeur Vallières, de la Faculté des sciences de l'Université de Sherbrooke, l’équipe de recherche présente l’infrastructure d’apprentissage continu MEDomics qu’elle a conçue pour soutenir la décision clinique en oncologie. Ce travail est le résultat d’une collaboration au sein d’un consortium international (nommé aussi MEDomics) formé de chercheuses et chercheurs provenant de quatre pays : Canada, États-Unis, Pays-Bas et Allemagne.

Ce qui retient l’attention dans cette étude, c’est l’impact potentiel qu’elle pourrait avoir sur la vie des personnes atteintes d’un cancer. En effet, avec une infrastructure comme MEDomics, il sera plus facile pour les médecins d'évaluer comment un cancer évoluera.

Ce cadre pronostique orientera de manière plus efficace les décisions médicales. Les traitements les plus susceptibles de prolonger la vie seront ainsi plus faciles à identifier pour une patiente ou un patient donné. On parle d’oncologie de précision.

Les médecins seront aussi mieux outillés pour se prononcer en faveur d’un traitement plus agressif ou des soins de confort lorsque les deux avenues semblent envisageables, par exemple chez les cas de cancer avancés.

Des exemples concrets
L'infrastructure MEDomics a permis à l’équipe de recherche de valider plusieurs nouvelles hypothèses cliniques.

Par exemple, le croisement des nombreuses données médicales a confirmé que l’immunothérapie s’avère très efficace pour traiter le cancer du poumon.

Les travaux ont également démontré qu’un score de Framingham élevé, un indicateur utilisé pour évaluer le risque de maladies cardiovasculaires, est fortement associé au décès chez les personnes atteintes de cancer à un stade précoce et avancé.

En somme, cette étude démontre l’importance, voire la nécessité d’exploiter les données massives existantes dans nos hôpitaux en utilisant notamment des méthodes d’analyses avancées, comme l’intelligence artificielle, afin de soutenir l’aide à la décision clinique pour les personnes atteintes du cancer.

Martin Vallières, Département d’informatique, Faculté des sciences

Des millions de données médicales croisées

Le projet vise la création d'une plateforme de calcul en libre accès qui permettra aux médecins et aux équipes de recherche de s'attaquer à un large éventail de problèmes médicaux à l’aide de l’intelligence artificielle.
Le projet vise la création d'une plateforme de calcul en libre accès qui permettra aux médecins et aux équipes de recherche de s'attaquer à un large éventail de problèmes médicaux à l’aide de l’intelligence artificielle.
Photo : Michel Caron - UdeS

Au cœur de l’infrastructure MEDomics se trouve MEDomicsLab, une plateforme de calcul qui est en développement dans le laboratoire du professeur Vallières, à la Faculté des sciences de l’Université de Sherbrooke. En partenariat avec le consortium MEDomics, le professeur Vallières vise à créer une plateforme de calcul en libre accès à partir de laquelle le personnel clinique et les équipes de recherche pourront s'attaquer à un large éventail de problèmes médicaux à l’aide de l’intelligence artificielle.

Dans l'étude publiée, le volume de données ayant été analysé pour donner vie à cette plateforme frappe l’imaginaire.

L’équipe de recherche s’est appuyée sur une base de données regroupant l’information médicale de 175 000 individus atteints de cancer. Ces données, colligées sur une période d’environ 10 ans, comprennent 15 millions de notes médicales, 200 millions de résultats de laboratoire, 1,7 million de rapports de radiologie et 0,86 million de rapports de pathologie, 15 millions d'entrées de médicaments et 3 millions de rencontres avec des patientes et patients.

C’est à l’Université de la Californie de San Francisco (UCSF) que ces données ont été recueillies. La base de données se veut évolutive : chaque année, l’information d’environ 10 000 individus y sera ajoutée.

« Je rêve du jour où nous pourrons faire la même chose au Québec, confie le chercheur. Pour permettre aux cliniciennes, aux cliniciens et aux équipes de recherche de Sherbrooke et du Québec de pleinement exploiter la puissance de l’intelligence artificielle dans le but d’améliorer les soins cliniques – comme le consortium MEDomics vient de le faire avec des données médicales de patientes et patients de San Francisco – il est, selon moi, urgent d’améliorer nos infrastructures au Québec afin de faciliter l’accès à ces données. »

L’accès aux données médicales numériques demeure un frein à ce type d’études. La recherche se heurte à des enjeux éthiques et d’organisation des données, notamment. Qui sait, peut-être que les travaux du consortium MEDomics ouvriront-ils la voie à la mise en place d’une telle infrastructure, ici, au Québec?

À propos de Martin Vallières
Martin Vallières se spécialise dans le développement de modèles prédictifs en santé. Ses recherches portent sur l’utilisation de l’apprentissage machine au service de la médecine de précision, en particulier en oncologie.

Titulaire de la Chaire en intelligence artificielle du CIFAR, une organisation de recherche mondiale basée au Canada, il déploie son expertise dans divers centres de recherche, dont le Groupe de recherche interdisciplinaire en informatique de la santé (GRIIS), le Institut de recherche sur le cancer de l’Université de Sherbrooke (IRCUS), le Centre de recherche du CHUS (axes Cancer et Imagerie) et le Mila – Institut québécois d’intelligence artificielle.


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