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Conférence des programmes en Droit et politique appliqués de l’État

Jean Charest aborde la place du Québec dans le monde

Photo : Jessica Garneau, collaboratrice

À l’invitation des programmes de Droit et politique appliqués de l’État (DPAE), dans le cadre de ce qui est devenu une tradition annuelle, l’honorable Jean Charest, avocat, Grand ambassadeur de l’Université de Sherbrooke (2003) et ancien Premier ministre du Québec, est venu parler de son parcours et de la situation politique du Québec dans le contexte particulier que nous connaissons. Et c’est devant une salle comble qu’il a pris la parole ce 27 mars.

Le professeur Guillaume Rousseau, directeur des programmes de DPAE, a d’abord survolé la grande contribution et la riche carrière d’un fier diplômé de la Faculté, avant de céder la parole au recteur sortant, le professeur Pierre Cossette, qui a réitéré le rôle capital des universités et, conséquemment, déploré les coupures que le plus récent budget provincial rendra inévitables.

Photo : Jessica Garneau, collaboratrice

« Je garde un souvenir impérissable de mon passage à l’Université de Sherbrooke et c’est avec grand bonheur que je vous retrouve aujourd’hui », a commencé M. Charest avant de féliciter le recteur élu, le professeur Jean-Pierre Perreault, et de saluer la députée de Sherbrooke et ministre fédérale, Élizabeth Brière, ainsi que la doyenne de la Faculté, la professeure Marie-Pierre Robert.

Il a ensuite lancé aux personnes étudiantes présentes qu’elles étaient privilégiées. « Si vous êtes assis dans cette salle, c’est parce que vous avez du talent, c’est parce que vous avez de l’intelligence. Ce n’est pas tout le monde qui se rendra où vous êtes et vous avez, devant vous, une vie que je vous souhaite intense et significative. »

De son passage sur les bancs de la Faculté de droit de l’UdeS, entre 1977 et 1980, jusqu’à la pratique juridique avec laquelle il a renouée suivant la fin de sa carrière politique active, en 2013, il aura accumulé des réflexions extrêmement pertinentes et des anecdotes savoureuses sur les coulisses du pouvoir, tant à l’échelle nationale qu'internationale.

De Stephen Harper à Brian Mulroney, en passant par le président français Jacques Chirac ou le président américain George Bush, il a eu l’occasion d’interagir, d’échanger et de collaborer avec de nombreux acteurs clés, et ce, sur de nombreux enjeux alors et encore d’actualité : l’immigration, le libre-échange, les changements climatiques, etc. Le Québec jouit d’une relation privilégiée avec la France, d’un statut unique au Canada et il importe d’apprécier et de consolider cette position stratégique. « La voix du Québec doit être entendue dans tous les forums. »

Photo : Jessica Garneau, collaboratrice

Pour comprendre la situation actuelle, il faut se rappeler que l’une des particularités du Canada est d’avoir un territoire immense et une population faible, d’où la nécessité d’aller vers l’extérieur. En 1867, le principal objectif était de créer un marché commun, puisque celui-ci était difficile à développer avec nos voisins du Sud. Les enjeux actuels ne sont donc pas nouveaux. Le Canada constitue l’une des fédérations les plus décentralisées au monde : « le défi consiste à faire fonctionner le système fédéral pour en tirer le maximum ».

Le réalisme grec?

Dans un article publié dans le Wall Street Journal pendant le premier mandat du président Trump, en 2017, deux de ses conseillers de l’époque évoquaient une approche inspirée de la philosophie politique du réalisme, remontant à la Grèce antique, selon laquelle le monde ne serait pas une communauté globale, mais bien une arène. Or, dans une arène, il y a des gagnants et des perdants. Il appartiendrait donc aux plus forts de gouverner et aux plus faibles de suivre. Huit ans plus tard, Donald Trump semble plus que jamais guidé par une vision du genre. « Nous sommes entrés dans une ère où les États-Unis ont pris la posture d’une superpuissance qui veut dicter l’avenir de la planète selon ses termes », ajoute l’ancien député de Sherbrooke. Il précise cependant qu’il importe de faire la distinction entre le président et le peuple américain, généralement merveilleux et amical, à qui il faut éviter d’envoyer le message que nous sommes hostiles.

On est chanceux d’être né dans ce quartier du monde!

Pr Guillaume Rousseau, Pr Jean-Pierre Perreault, recteur élu, Me Jean Charest, Pr Pierre Cossette, recteur sortant, Pre Marie-Pierre Robert, doyenne de la Faculté de droit, et Pre Anik Lessard, doyenne de la Faculté des lettres et sciences humaines.
Pr Guillaume Rousseau, Pr Jean-Pierre Perreault, recteur élu, Me Jean Charest, Pr Pierre Cossette, recteur sortant, Pre Marie-Pierre Robert, doyenne de la Faculté de droit, et Pre Anik Lessard, doyenne de la Faculté des lettres et sciences humaines.
Photo : Jessica Garneau, collaboratrice

Sur la question des tarifs douaniers, M. Charest souligne que les produits qui sont fabriqués dans un seul pays n’existent plus. Les chaînes d’approvisionnement sont bâties de sorte que les composantes voyagent d’un pays à l’autre pour éventuellement constituer un produit fini. Les tarifs ne pourront donc, selon lui, que nuire à l’économie américaine, entraînant l’économie canadienne avec elle. S’ajoute, entre autres, le discours sur le 51e État, d’abord perçu à la blague, mais qui s’apparente de plus en plus à celui de la Russie face à l’Ukraine, notamment en ce qui a trait aux frontières. Bref, selon M. Charest et de nombreux observateurs, « la relation de longue date entre nos deux nations ne sera plus jamais la même. »

Ça finit comment?

Je suis de ceux qui pensent que c’est un grand moment de vérité pour le Canada, incluant le Québec. Il faut revoir le fonctionnement de notre économie, le fonctionnement de notre fédéralisme. Il faut retrouver le mode d’emploi du système fédéral, notamment en matière d’immigration et sur les questions climatiques. Finalement, il faut aussi déterminer notre posture dans le monde : quel rôle voulons-nous jouer?