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Article sur la gestion du changement

Comment surmonter les résistances lors d’un changement organisationnel

Le changement est un sujet qui touche tout le monde, que ce soit dans sa vie personnelle ou dans sa vie professionnelle. Dans le monde du travail, le changement est perpétuel et essentiel à la pérennité d’une organisation. Or, en 2006, une étude1 révélait que 70 % des changements se résolvent à l’échec. Qui plus est, moins du tiers des personnes interrogées par la firme McKinsey & Company2 affirment que les transformations appliquées au sein de leur organisation ont permis d’améliorer leurs performances et de les maintenir dans le temps.

Pour certains auteurs3,4, le facteur humain, plus précisément les comportements qui vont contre le changement seraient l'un des principaux obstacles à la mise en œuvre du changement organisationnel. Ces comportements qui résistent au changement seraient-ils réellement si dommageables? Pourquoi se manifestent-ils? Comment devrions-nous y réagir? Nous tenterons de vous outiller davantage face à ce phénomène souvent appréhendé par les porteurs du changement.

Résistance au changement

Lors d’un changement significatif au sein d’une organisation, un moment occasionnant de l’incertitude et de l’instabilité, il est normal que des réactions émotives s’expriment chez les employés. 5, 6 Les employés peuvent exprimer des objections face au changement qui leur est imposé, notamment dues à de la peur, à de l’insécurité, à de la confusion, etc.5 Ces objections sont parfois jugées comme une menace, un obstacle ou un ennemi du changement. C’est une résistance! Dans cette vision traditionnelle, les résistances aux changements sont à éviter.7

Définition de résistance au changement.

La résistance au changement est une réaction comportementale au changement d'un bénéficiaire du changement (ou d'un groupe de parties prenantes) à l'égard d'une initiative de changement qui est généralement proposée par un dirigeant. Elle est d’intensité variable et se manifeste avant, pendant ou après la mise en œuvre d'un changement. Bien que souvent interprétée comme une opposition à l'initiative de changement (vision traditionnelle), cette réponse comportementale peut également être interprétée comme une ambivalence, une ressource, une inquiétude ou une préoccupation qui représente un retour d'information sur l'inconfort de l'initiative de changement (vision moderne).7

Une vision plus moderne a vu le jour depuis une vingtaine d’années :  les résistances sont des sources de rétroactions riches.8 En effet, les résistances au changement renseigneraient sur les tensions9, les inconforts8, 10, les préoccupations et les inquiétudes11, 12 ou l’ambivalence13 vécue par les destinataires du changement. Elles n’ont pas nécessairement une valence positive ou négativement, mais elles peuvent indiquer que les mesures prises n’ont pas réussi à rendre les destinataires réceptifs à du changement.14

L’importance de ne pas minimiser les résistances au changement

Les résistances jouent donc un rôle de système d’alarme. C’est pourquoi il est judicieux de les explorer au lieu de les ignorer ou de les dénigrer. L’instauration d’un dialogue sur les préoccupations des destinataires du changement permet de décoder les facteurs engendrant les résistances. En utilisant cette approche, il est alors possible de cibler des actions spécifiques au facteur, de les mettre en action rapidement et ainsi, facilitez l’engagement et l’appropriation du changement par les destinataires.7 Le modèle des phases de préoccupation15 est un bel outil à avoir en main afin d’y parvenir.

Modèle des phases de préoccupations (PoP)

Bareil voit la résistance comme une manifestation des préoccupations des destinataires.15 Elle propose donc le modèle des phases de préoccupations pour favoriser une utilisation positive des résistances au changement.5 Dans ce modèle vérifié empiriquement16, 17, les préoccupations des destinataires du changement évoluent selon 7 phases. En identifiant la phase où se trouvent les destinataires, il est facile pour un gestionnaire d’intervenir de manière ciblée afin de répondre à ces préoccupations. Il est également possible de comprendre pourquoi une intervention n’a pas eu les effets souhaités : possiblement qu’elle arrive trop tôt (les préoccupations ne sont pas encore présentes) ou trop tard (les préoccupations sont déjà passées)

Définition de préoccupation

Une préoccupation se définit comme un souci, une inquiétude, un questionnement par rapport à un élément spécifique. Ainsi, une préoccupation n’est pas nécessairement de la résistance. En fait, la résistance serait une manifestation lorsque les préoccupations ne sont pas prises en considération. Lorsqu’il y a une réponse à ces préoccupations, le destinataire et le changement progressent.18

Inspiré de Bareil, 2004, 2009, 2013; Bareil et Gagnon, 2005; Collerette et al., 2013.

Inspiré de Bareil, 2004, 2009, 2013; Bareil et Gagnon, 2005; Collerette et al., 2013.


Trucs et astuces pour gestionnaire : comment pouvez-vous identifier les préoccupations de vos employés?5

  • Soyez attentif aux conversations autour de vous et utilisez le tableau pour vous aider à décoder la phase de préoccupation dans les propos.
  • Créez des moments de rencontre informelle avec un employé ou une équipe et échangez sur le changement.
  • Écrivez un message pour prendre le pouls de vos employés plus discrets ou timides.

Poser la question directement : qu’est-ce qui vous préoccupe le plus, actuellement, à l’égard du changement?

  • Écoutez attentivement la réponse. Ne tentez pas de dissuader, mais cherchez à comprendre et à amener votre employé à cheminer et élaborer ses réponses.
  • Soyez empathique. Partez du point de vue de votre employé et non du vôtre.

Bref, arrimer la gestion de projet et la gestion humaine reste en soi un défi. Chacun progresse à son rythme qui peut être en discordance avec l’autre. Néanmoins, le modèle PoP propose un cadre d’analyse d’adhésion des destinataires au changement ainsi que des actions concrètes pouvant être mises en place afin de favoriser cette adhésion. Ainsi, en l’intégrant dans votre gestion du changement, vous saurez traiter les résistances au fur et à mesure qu’elles se manifestent.

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Références

  1. Vinson, M., Pung, C., et Muñiz González-Blanch, J. (2006). Organizing for Successful Change Management: A McKinsey Global Survey. McKinsey & Company. http://www.leadway.org/PDF/Organizing for successful change management.pdf
  2. MCKinsey & Company (2021). Losing from day one: Why even successful transformations fall short. https://www.mckinsey.com/capabilities/people-and-organizational-performance/our-insights/successful-transformations#/
  3. Bovey, W. H. et Hede, A. (2001). Resistance to organizational change: the role of cognitive and affective processes. Leadership & Organization development journal, 22(8), 372-382.
  4. Vales, E. (2007). Employees CAN make a difference! Involving employees in change at Allstate Insurance. Organization Development Journal, 25(4).
  5. Bareil, C. (2009). Décoder les préoccupations et les résistances à l'égard des changements. Gestion, 34(4), 32–38.
  6. Mohrman Jr, A. M., Mohrman, S. A., Ledford Jr, G. E., Cummings, T. G., et Lawler III, E. E. (1991). Large-scale organizational change. Jossey-Bass.
  7. Bareil, C. (2013). Two Paradigms about Resistance to Change. Organization Development Journal, 31(3), 59–71.
  8. Ford, J. D. et Ford, L. W. (2009). Decoding resistance to change. Harvard business review, 87(4), 99-103.
  9. Collerette, P., Schneider, R., et Lauzier, M. (2013). Le pilotage du changement (2e édition). Presses de l'Université du Québec.
  10. Bareil, C., Savoie, A., & Meunier, S. (2007). Patterns of discomfort with organizational change. Journal of Change Management, 7(1), 13–24. https://doi.org/10.1080/14697010701232025
  11. Bareil, C. et Gagnon, J. (2005). Facilitating the Individual Capacity to Change. Gestion 2000, 22(5), 177–194.
  12. Hall, G. E. et Hord, S. M. (2006). Implementing change: Patterns, principles, and potholes. Pearson/Allyn and Bacon.
  13. Piderit, S. K. (2000). Rethinking resistance and recognizing ambivalence: A multidimensional view of attitudes toward an organizational change. Academy of management review, 25(4), 783-794.
  14. Ford, J. D., Ford, L. W., et D'Amelio, A. (2008). Resistance to change: The rest of the story. Academy of management Review, 33(2), 362-377.
  15. Bareil, C. (2004). Gérer le volet humain du changement. Éditions Transcontinental.
  16. Bareil, C. (1998). Une nouvelle compréhension du vécu des acteurs en transition. Alain Rondeau (Éd.). Gestion des paradoxes dans les organisations. Actes du 9e congrès de l’AIPTLF, Tome 1. Le changement organisationnel, p. 59-68.
  17. Bareil, C., Savoie, A. (1999), «comprendre et mieux gérer les individus en situation de changement organisationnel», Gestion, 24(3), 86-94.
  18. Parent, C. (2019, 7 novembre). Résistance + Gestion des préoccupations des employés = Changement réussi [communication orale]. Le congrès de l’AQPP : le grand rendez-vous de la pharmacie communautaire! https://aqpp.opus3.com/images/2019/Presentations/Atelier_1-_PDF-Caroline_Parent.pdf

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