22 mars 2018 | Sophie Payeur
Pendant des décennies, les scientifiques ont estimé que chaque gène codait une seule protéine, et les chercheurs ont pensé et étudié les génomes en conséquence. Mais la donne a changé en 2013, quand Xavier Roucou et son équipe ont révélé au monde entier l’existence des protéines alternatives. Leur découverte a eu l’effet d’une bombe : chaque gène produit non pas une mais plusieurs protéines – peut-être même jusqu’à quatre. Et vlan! Des milliers de ces petites ouvrières indispensables aux fonctions du corps étaient passées «sous le radar» des chercheurs.
Au début, Xavier Roucou s’est frappé à l’incrédulité et au scepticisme de ses pairs, mais de plus en plus de biologistes lui donnent raison. Désormais, d’autres laboratoires, au quatre coin du monde, consacrent leurs travaux à la détection et à la compréhension de ces mystérieuses protéines fantômes. En plus d’obliger les biologistes à revoir leurs manuels, les protéines alternatives pourraient aider à déjouer des maladies comme le cancer et les maladies dégénératives.
Pour arriver à tirer un maximum de connaissance des protéines alternatives, l’équipe de Xavier Roucou a décidé de créer une plateforme web universelle qui décrit leur annotation fonctionnelle et qui permet leur détection. : la plateforme OpenProt.
Aujourd’hui, cinq ans après la découverte qui allait changer le cours de ses recherches, Xavier Roucou raconte la suite de ses travaux sur les protéines fantômes.
«On s’attaque à un nouveau monde. Notre équipe continue de détecter ces protéines fantômes. On s'efforce aussi de donner des outils à la communauté scientifique pour détecter ces protéines alternatives et identifier leurs fonctions.»
«Lors du séquençage du génome humain, on a établi de faire l’annotation fonctionnelle d’une seule protéine pour un gène. Depuis on a oublié cette convention et elle s’est transformé en dogme et plus personne n’a remis cela en cause.»
«Oui, c’est «trippant». Certains résultats expérimentaux devront être revus à la lumière de nos découvertes. Dans 10 ou 20 ans, j'espère qu'on aura réussi à faire tomber ces dogmes. Je pense qu'on aura fait évoluer la vision du gène et de la génétique.»