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Infrastructure de recherche de 17,2 M$

Rapprocher l’intelligence numérique pour réduire notre empreinte écologique

Le professeur Réjean Fontaine dirigera le projet « Réseau d’intelligence numérique distribuée : développement de microsystèmes disruptifs et à faible coût pour le traitement des données en périphérie ».
Le professeur Réjean Fontaine dirigera le projet « Réseau d’intelligence numérique distribuée : développement de microsystèmes disruptifs et à faible coût pour le traitement des données en périphérie ».
Photo : UdeS - Michel Caron

Et si la reconnaissance d'objets ou faciale sur votre téléphone s’effectuait directement dans votre appareil au lieu d’aller faire un tour dans l’infonuagique, vous verriez une différence? Peut-être pas. Pourtant, le fait de ramener l’intelligence qui est derrière cette opération directement dans les appareils aurait un impact majeur sur d’importants facteurs, notamment sur la sécurité de l’information et l’efficacité énergétique. Elle a beau être affublée de l’adjectif « artificielle », reste que cette intelligence transformera notre quotidien de mille et une façons d’ici une dizaine d’années, selon plusieurs experts.

Le professeur Réjean Fontaine, du Département de génie électrique et de génie informatique, dirige actuellement un projet d’envergure qui bénéficie d’une subvention de l’ordre de 17,2 M$ de la Fondation canadienne pour l’innovation (FCI) et du gouvernement du Québec. Ce projet, qui regroupe 5 institutions québécoises, porte le nom de « Réseau d’intelligence numérique distribuée : développement de microsystèmes disruptifs et à faible coût pour le traitement des données en périphérie ». Il veut permettre aux chercheurs utilisant cette infrastructure de ramener l’intelligence plus proche, directement dans les appareils, au lieu de faire voyager l’information à des centaines ou milliers de kilomètres vers l’infonuagique. Et pour réussir à faire cela, on doit développer des microsystèmes complexes et ultrasophistiqués. C’est ici qu’entre en jeu cette équipe multidisciplinaire.

C’est vrai que, d’ici environ 10 ans, l’intelligence artificielle, ou IA, contribuera à la résolution de certains des problèmes les plus urgents de l'humanité. En distribuant l’IA directement dans les petits objets, on observera de réelles avancées dans plein d’applications, comme la reconnaissance d'images, la conduite automatisée d'automobiles, l'agriculture automatisée et l'électrification des transports, pour n’en nommer que quelques-unes. Tout sera alors plus petit, plus puissant, plus performant et plus intelligent, mais moins coûteux et moins énergivore.

Réjean Fontaine

Ce dernier aspect est non négligeable : en effet, comme les travaux de recherche visent à la base à minimiser les échanges d’informations, on réussira à réduire l’empreinte écologique un peu trop profonde générée par la quantité phénoménale actuelle de données qui voyagent à travers les réseaux Internet. On anticipe de dépasser le zettaoctet en termes de transfert de données annuel en 2030... Un zettaoctet, c'est 21 zéros; c’est un milliard de téraoctets!

Infrastructures de prochaine génération

En route vers les infrastructures de prochaine génération
En route vers les infrastructures de prochaine génération
Photo : UdeS - Michel Caron

Le réseau d'intelligence numérique distribué (appelé aussi D2IN) permettra en réalité de mettre en place les infrastructures pour répondre à tous ces besoins-là. Il vise à développer le matériel et le micrologiciel de la prochaine génération d’informatique de pointe pour le traitement de signal en périphérie.

L’équipe de recherche concevra des microsystèmes capables de traiter les données localement, plus près de la source, et de les mettre en réseau sans interagir avec le cloud, résume le professeur. L'infrastructure développée par ce projet permettra de coordonner simultanément la conception, la fabrication et même la calibration de microsystèmes très complexes et hétérogènes. On poursuivra ensuite plus loin avec l’ajout de l’IA embarquée et le traitement du signal, ainsi qu’avec des liaisons de communication économes en énergie, comme le permettront notamment le 5G et le 5G+.

Combinaison des forces

Le projet D2IN regroupe cinq universités offrant des expertises complémentaires :

  • l'Université de Sherbrooke pour son expertise en conception de nano- et microsystèmes, en télécommunication et en intelligence artificielle;
  • l’École de technologie supérieure pour son expertise en IoT (Internet des objets), les circuits radiofréquences et l’électronique flexible;
  • McGill et Concordia pour l’IA photonique;
  • et l'Université du Québec à Trois-Rivières pour la mise en réseau des antennes et la transmission.

Sherbrooke : mode de fonctionnement attractif en recherche

L’agrandissement prévu de l’Institut interdisciplinaire d’innovation technologique (3IT) permettra d’accueillir la grande majorité de cette infrastructure nécessaire à la mise en place de ce projet et d'aligner les conditions pour réussir à faire des tests à différentes échelles. Ce projet majeur s’inscrit d’ailleurs comme un appui direct à la chaîne d’innovation intégrée, – de l’Institut quantique au Centre de Collaboration MiQro Innovation (C2MI) en passant par le 3IT –, mais également à tout l’écosystème québécois de microtechnologies numériques et quantiques, incluant les deux nouvelles zones d’innovation récemment mises de l’avant par le gouvernement québécois.

Ce qui est particulier à l’UdeS et qui contribue à son positionnement fort enviable en recherche, c’est je pense sa culture, affirme Réjean Fontaine. Ici, on ne se bat pas entre collègues. La collaboration est omniprésente et assez naturelle, et c’est un facteur tellement important pour faire avancer les choses. Avant la pandémie, il y avait environ 350 étudiantes et étudiants présents au 3IT. On se dirige maintenant vers les 500. Et ça continuera d’augmenter. Je n’ai pas peur de dire que notre mode de fonctionnement est attractif pour la communauté de recherche.

Seul réseau canadien qui met de l'avant les aspects éthiques et socio-environnementaux

L’UdeS apporte avec elle une solide expérience dans la conception de nano- et microsystèmes (capteurs, données des systèmes d'acquisition, télécommunication) et leur microfabrication. L'objectif technique de l'équipe est de réduire la latence, la consommation d'énergie, la taille et le prix des appareils intelligents. Mais on ajoute à cet objectif un autre moins technique mais tout aussi important : former la prochaine génération de personnel hautement qualifié sensible au développement socio-environnemental durable. D2IN est d’ailleurs le seul réseau au Canada considérant simultanément les aspects éthiques et socio-environnementaux en lien avec la conception de microsystèmes intelligents distribués.

Si je me permets de rêver, se projette le chercheur, avoir un jour une infrastructure appuyant la recherche sur les réseaux de microsystèmes distribués à la grandeur du Québec serait une belle réussite. À plus court terme, on pourra voir des retombées, on l’espère, dans l’intelligence que nous proposerons pour améliorer plusieurs objets qui font partie de notre quotidien. Une pinte de lait qui indique à votre cellulaire qu’il faut en acheter une autre ? Pourquoi pas!



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