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Du nouveau sur le lien entre les pesticides et le cancer

L'étude s'est penchée sur l'effet combiné de petites doses de différents pesticides sur les cellules humaines.
L'étude s'est penchée sur l'effet combiné de petites doses de différents pesticides sur les cellules humaines.

Photo : Michel Caron - UdeS

Même à petites doses, les pesticides utilisés en agriculture seraient nocifs pour la santé, dévoile une étude conduite par le professeur de biologie Luc Gaudreau et son équipe.

Les pratiques agricoles modernes utilisent des pesticides pour éliminer plusieurs formes d’organismes (champignons, plantes, insectes) nuisibles aux cultures. Une fois les pesticides utilisés, les résidus voyagent dans le sol jusqu’aux différents plans d’eau. Cette eau contaminée est ensuite réutilisée en agriculture. Ultimement, ces résidus de pesticides se retrouvent dans la chaîne alimentaire et sont absorbés par les animaux et les humains.

La communauté scientifique sait depuis longtemps que l’utilisation massive de pesticides peut avoir des incidences sur la santé des populations. Une récente étude conduite par une équipe de recherche de Département de biologie de l’Université de Sherbrooke s’est penchée sur l’impact de l’alliance de plusieurs résidus de pesticides sur les cellules humaines.

Un problème majeur qui découle de l’utilisation de pesticide est que nous avons très peu de données sur les effets des résidus de pesticides qui interagissent entre eux sur les mécanismes cellulaires humains en général.

Luc Gaudreau, professeur au Département de biologie et chercheur à l'Institut de recherche sur le cancer de l'Université de Sherbrooke (IRCUS)

Le professeur Luc Gaudreau accompagné de Nadia Côté, candidate au doctorat en biologie, et Myriam Fauteux, diplômée de la maîtrise en biologie.
Le professeur Luc Gaudreau accompagné de Nadia Côté, candidate au doctorat en biologie, et Myriam Fauteux, diplômée de la maîtrise en biologie.
Photo : Michel Caron - UdeS

Les travaux de recherche se sont concentrés sur cinq principaux pesticides largement utilisés. Les manufacturiers de ces cinq pesticides indiquent les doses maximales recommandées lors de leur utilisation.

Nous connaissons les doses dites sécuritaires de chaque produit, précise le professeur Luc Gaudreau. Cependant, notre projet de recherche voulait mettre en lumière que plusieurs petites concentrations de plusieurs produits différents peuvent être aussi néfastes qu’une seule dose trop concentrée d’un seul pesticide. Les impacts sur la santé humaine ne sont pas connus.

Quantifier les dommages causés à l'ADN dans ces cellules

Les pesticides agissent de différentes façons sur les cellules. Leur action peut être directe ou indirecte. Dans l'ensemble, les résultats des travaux ont démontré que plusieurs pesticides présents dans l'environnement ont le potentiel d'interagir entre eux pour agir sur le système cellulaire. Les pesticides sont capables d’enclencher une réponse de réparation sur les cellules qui se détractent. Ultimement, ce dérèglement cause le cancer.

Le cancer est une maladie surtout liée à la vieillesse, estime le professeur Luc Gaudreau. Il est difficile de démontrer que l’exposition à des pesticides peut causer le cancer, parce qu’il y a tellement de facteurs d’incidence qui peuvent être déterminants.

L’utilisation de P53 pour comprendre les effets des pesticides

Pour comprendre les impacts des pesticides à petites doses sur les cellules, l’équipe a produit une série de sous-ensembles de pesticides largement utilisés pour activer des interactions avec des cellules. Grâce à la réponse de la protéine P53, présente dans la cellule et jouant un rôle lorsque la cellule est endommagée, l’équipe a constaté les effets des pesticides dans la cellule. Non seulement les différents pesticides peuvent activer des réactions dans la cellule, mais la plupart d'entre eux ont des effets réels lorsqu'ils sont combinés à de faibles doses.

P53 joue un rôle fondamental dans la suppression de cellules cancéreuses. Il contrôle la croissance et la division des cellules et envoie des signaux à d'autres gènes pour aider à réparer l'ADN endommagé. Si l'ADN endommagé ne peut pas être réparé, le gène P53 empêche la cellule de se diviser et lui dit de mourir.

Et pour la suite?

L’équipe du professeur Gaudreau a apporté un éclairage nouveau sur les pesticides et leurs impacts. Depuis des années, le potentiel toxicologique des pesticides est dans la mire de la communauté de recherche. Cette étude démontre que nous devons aussi prendre en compte l'interaction des différentes molécules de pesticides avec les cellules, et ce, de façon synergique et même à de très faibles concentrations dans l’environnement.

Par conséquent si plusieurs pesticides agissent ensemble à de faibles concentrations sur les cellules, pour perturber leur bon fonctionnement et même provoquer des dommages à l’ADN, il est possible qu’ils aient un effet (encore méconnu) sur les maladies génétiques. Les travaux du professeur Gaudreau se poursuivent.


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