Concours de vulgarisation scientifique FMSS 2016 | lauréat
Recherche sur le cancer colorectal : Surveiller la circulation à partir de la Lune
Imaginez-vous sur la Lune à regarder vers la Terre tout en étant capable de surveiller les déplacements de milliers de véhicules pris dans la circulation.
L’équivalent de cette surveillance à l’échelle moléculaire a été récemment réussi dans une recherche sur le cancer colorectal. Le projet de recherche en question a été mené par le professeur François-Michel Boisvert à l’Université de Sherbrooke. Le groupe de recherche du professeur Boisvert a publié ses conclusions plus tôt cette année. Les observations du groupe détaillent la façon dont les chercheurs ont réussi à localiser des milliers de molécules, appelées protéines, au cœur des cellules cancéreuses colorectales.
Le cancer colorectal est un des types de cancers les plus meurtriers au pays selon la Société canadienne du cancer. Les taux de survie pour les cancers varient généralement en fonction de ce que les scientifiques et les médecins connaissent comme causes des différents types de cancers. En ayant une meilleure compréhension des processus du cancer, ces professionnels pourront efficacement mettre au point et effectuer des traitements.
Changements cellulaires causés par le cancer
Les cellules se mettent à fonctionner différemment lorsque la situation tourne mal dans le comportement des protéines. Les protéines jouent le rôle de petite machine de taille moléculaire et sont responsables de la gestion de nos cellules; normalement, elles les gardent vivantes et en santé, telles de microscopiques usines. Les changements dans la mécanique de ces protéines peuvent souvent mener au cancer par une dégradation des processus normaux. Un peu comme il est possible de connaître les habitudes d’une personne en fonction de l’endroit où elle passe la plupart de son temps, on peut beaucoup en apprendre sur une protéine grâce à son emplacement à l’intérieur de la cellule.
Bulletin de circulation cellulaire
Dans cette étude, les chercheurs ont analysé l’emplacement des protéines de sept types de cellules cancéreuses colorectales de gravité croissante. Pour atteindre leur objectif, les chercheurs ont séparé différents compartiments à l’intérieur des cellules cancéreuses les uns des autres et en ont analysé le contenu individuellement. Cette analyse a pu être effectuée à l’aide d’un instrument de haute précision, un spectromètre de masse, lequel permet de compter, de mesurer et d’identifier chacune des protéines présentes dans un échantillon de cellules. La technique utilisée est couramment appelée analyse protéomique, un mot-valise combinant le mot « protéine » et le suffixe de « génomique », lequel signifie l’étude de quelque chose dans son intégralité.
L’analyse protéomique a permis de révéler que les compartiments de chaque type de cancer colorectal contenaient des protéines anormales en fonction de la gravité du cancer. Cette découverte permet de croire que le mouvement des protéines à l’intérieur de la cellule, entre les cellules, joue un rôle important dans la formation du cancer et qu’il donne donc une bonne idée du processus de progression du cancer. L’équipe a catalogué cette information et l’a rendue accessible en ligne de sorte que tous puissent y avoir accès gratuitement.
Mais qu’est-ce que ça veut dire?
On peut considérer cette étude comme un bulletin de circulation cellulaire pour le cancer colorectal. Ce rapport a été mis en ligne pour que d’autres scientifiques puissent l’interpréter et tirer encore plus d’informations sur le phénomène observé pour peut-être même les utiliser dans leurs propres recherches. Grâce aux informations qui ressortent de cette étude, les médecins devraient avoir encore plus d’informations qui leur sont essentielles pour formuler des recommandations dans certains cas particuliers de cancer colorectal, ce qui ultimement améliore l’issue pour les patients.
L’avenir de la protéomique
Les technologies de pointe comme la protéomique s’approchent de plus en plus d’un médecin près de chez vous. Les praticiens seront bientôt en mesure d’utiliser la protéomique et des technologies semblables pour ouvrir la voie à la « médecine personnalisée ». Par exemple, on pourrait personnaliser la médecine au moyen d’outils de protéomique afin de créer un bulletin de circulation, comme ceux produits dans le cadre de cette étude, des cellules cancéreuses de n’importe quel patient. À partir de ces analyses, on obtiendrait un rapport détaillé du fonctionnement profond des cellules malades. Ce rapport pourrait par la suite être interprété par un médecin qui comprendrait précisément ce qui se passe dans le cancer d’un patient en particulier. Ces découvertes ont l’immense potentiel d’aider les médecins à concevoir des plans de traitement individualisés de façon à optimiser l’issue pour les patients.
À propos de l’auteur
Samuel Wilson a une forte curiosité pour le monde autour de lui, une qualité qui l’a dirigé vers la science. Il a découvert à l’Université Bishop’s sa passion pour la biologie au cours de ses études au baccalauréat, spécialisé en sciences de la santé. Samuel est actuellement étudiant à la maîtrise en biologie cellulaire. Son projet de mémoire concerne les mécanismes moléculaires de la réparation de l’ADN; une avenue qui pourrait mener à des thérapies potentielles pour le cancer colorectal.
Samuel est passionné par tout ce qui a trait aux domaines de la biologie et de la santé. Issu d’une famille d’enseignants, il valorise le partage des connaissances. Naturellement, la vulgarisation scientifique lui tient à cœur ainsi que le partage des découvertes scientifiques. En dehors de ses travaux académiques, il est bénévole depuis quelques années auprès du Service des bénévoles du CHUS. Le jeune scientifique veut poursuivre une carrière en médecine translationnelle.