La culture comme source de motivation pour les élèves
Les expériences culturelles vécues à l’école contribuent à forger l’identité des élèves et à élargir leur vision du monde. Mais ces activités ont-elles une portée significative sur la motivation des élèves pour l’école, et plus particulièrement sur la motivation envers la lecture et l’écriture? Un groupe de chercheurs, dirigé par le professeur Olivier Dezutter de la Faculté d’éducation de l’UdeS et associé au Collectif de recherche sur la continuité des apprentissages en lecture et en écriture, tente de répondre à cette question.
Depuis 2015, l’équipe mène un projet de recherche financé par le Fonds de recherche du Québec – Société et Culture quant à l’impact des activités culturelles sur le rapport à l’écrit des élèves et sur leur motivation en lecture et en écriture. Les premiers résultats de cette recherche qui s’échelonne sur trois ans ont été présentés lors de la journée de réflexion « La culture à l’école », qui se tenait à l'Université de Sherbrooke le 13 octobre dernier.
Un intérêt marqué de la part des enseignants
Dans le cadre de ce projet de recherche auquel collaborent aussi les professeurs Marie-Christine Beaudry (UQAM), Érick Falardeau (ULaval) et Myriam Lemonchois (UdeM), près de 300 enseignants québécois ont répondu à un questionnaire pour brosser le portrait des activités culturelles initiées dans leur milieu scolaire. Parmi les répondants, le trois quart déclare avoir un intérêt marqué pour la culture dans leur vie privée, et plus de 95 % ont organisé au moins une activité culturelle dans leur classe.
Parmi les activités, la participation à un événement culturel tel que la visite d’un musée, d’un salon du livre ou une sortie au théâtre occupe la première place. « Il y a bel et bien au Québec un nombre important d’enseignants fortement impliqués, fortement engagés dans l’organisation d’activités culturelles, qui restent toutefois pour la plupart ponctuelles », souligne le professeur Dezutter. La durée des activités est en effet un facteur décisif pour la réussite des projets et pour la multiplication des impacts sur les élèves.
De fait, d’autres recherches menées aux États-Unis et au Royaume-Uni montrent que lorsque les élèves sont engagées dans une expérience à plus long terme où ils peuvent participer à un processus créatif, leur développement personnel et leurs apprentissages scolaires en bénéficient davantage. Au Québec, le nouveau volet « Une école accueille un artiste » du programme La culture à l’école permet aux écoles de recevoir un artiste en résidence, répondant ainsi au besoin de mettre en place des activités de plus longue durée.
Des impacts notables sur les élèves
Grâce à leurs réponses à des questionnaires et à leur participation à des groupes de discussions, les élèves ont exprimé leur point de vue sur la tenue d’activités culturelles à leur école, plus spécifiquement quant aux rencontres avec des auteurs. Bon nombre témoignent du fait que ces rencontres leur font voir différemment le processus d’écriture, par exemple en leur permettant de comprendre l’importance de retravailler plusieurs fois leurs textes, comme le font les écrivains.
Dans certains cas, la rencontre d’un auteur peut même renforcer l’intérêt des élèves pour l’écriture, et les motiver à poursuivre des projets qu’ils avaient commencés hors du cadre scolaire. C’est le cas de plusieurs garçons, qui ont révélé avoir des pratiques d’écriture à l’extérieur de l’école, et ce, dès le primaire.
De leur côté, les enseignants consultés relèvent aussi des retombées positives de l’organisation d’activités culturelles, particulièrement une motivation accrue des élèves dans les cours de français. La recherche en cours a d’ailleurs démontré que plus les enseignants sont témoin des impacts sur leurs élèves, plus ils ont tendance à se mobiliser pour organiser d’autres activités.
Des activités qui dépendent de plusieurs facteurs
Malgré l’intérêt des élèves et l’engagement des enseignants pour faire de l’école un lieu d’éveil culturel, l’organisation d’activités est fragile et dépend énormément de l’apport financier des gouvernements ainsi que des programmes de soutien. Pour deux enseignants sur cinq, la contrainte budgétaire représente le frein le plus important. À cela s’ajoutent des contraintes personnelles liées au statut précaire de certains pendant les premiers dix ans d’enseignement, et le manque de temps.
La mise sur pied de projets culturels repose donc en grande partie sur les épaules des enseignants. Selon Olivier Dezutter, il doit y avoir une plus grande prise en charge institutionnelle de l’intégration de la culture au programme scolaire : « chaque commission scolaire a officiellement une politique culturelle. C’est la commission scolaire qui devrait avoir l’initiative de dire que les élèves ne sortiront pas de chaque cycle sans avoir eu une expérience culturelle significative. » Ces politiques devraient donc agir comme des leviers pour les enseignants, afin non seulement de leur donner les outils nécessaires à l’organisation d’activités, mais aussi pour que leur mission tienne pleinement compte de leur rôle de passeur culturel.