Aller au contenu

Chaire André-Lussier de rhumatologie

Les domaines de la rhumatologie et de l’auto-immunité ont connu, au cours des dernières années, un essor incomparable en termes d’acuité diagnostic et de possibilité thérapeutique. Malgré ces progrès importants, les maladies rhumatologiques restent le motif le plus souvent évoqué pour les demandes d’invalidité permanente et d’arrêts de travail au Canada. En effet, plus de 4,4 millions de canadiens sont affectés, ce qui représente un coût sociétal qui frôle les 33 milliards de dollars canadiens selon une évaluation de l’Alliance de l’arthrite du Canada. Ces coûts sont composés de 12,6 milliards de dollars en coûts sanitaires directs et 20,6 milliards en perte de productivité et de taxes. Ces chiffres déjà impressionnants sont malgré tout voués à augmenter. Au cours des 30 prochaines années, on prévoit que 1 canadien sur 4, soit 10 millions de canadiens, seront affectés par une problématique rhumatismale. Il reste donc un manque important à combler dans notre domaine pour améliorer la qualité de vie de nos patients et optimiser leurs traitements.

            Une des limites à la compréhension du développement des maladies rhumatologiques d’origine auto-immune telles que la polyarthrite rhumatoïde ou le lupus érythémateux disséminé est leur complexité intrinsèque. Il est en effet largement admis que ces maladies rhumatologiques surviennent chez des individus génétiquement prédisposés après l’exposition à un facteur environnemental « déclencheur ». Conséquemment, de multiples facteurs de prédisposition génétique et facteurs déclencheurs ont été identifiés. En revanche, individuellement, ces facteurs ne parviennent à expliquer qu’un faible pourcentage des maladies rhumatologiques et ne contribuent que marginalement au risque global de développer une maladie auto-immune. Bien que décevante, cette observation démontre que les interactions entre les différents marqueurs de prédisposition génétique et environnementaux sont complexes et que de multiples gènes et dommages environnementaux contribuent conjointement au développement de ces maladies. Il est donc difficile de prévenir le développement de ces maladies.

            Au cours des 10 dernières années, le raffinement des techniques diagnostiques a permis d’identifier de nouveaux groupes de maladies immuno-rhumatologiques dont la composante génétique est dominante. Cette « nouvelle » famille de rhumatismes initialement regroupés dans une seule maladie, comporte désormais plus de 350 entités génétiquement distinctes dans le spectre des maladies immuno-rhumatologiques. La résolution, sans précédent, avec laquelle les diagnostics sont posés a le potentiel de changer drastiquement notre compréhension du développement de ces maladies. En effet, l’avancement des techniques de biologie moléculaire et de séquençage a permis l’identification de plusieurs patients qui présentent une combinaison d’immunodéficience, d’auto-immunité (manifestations rhumatismales) et de dysfonction d’un gène unique. Ces patients représentent une mine d’or en informations biologiques en raison de la contribution dominante d’un seul gène. Ces cas permettent d’une part d’identifier les gènes les plus importants dans le développement des maladies immunes et d’autre part de mettre en lumière les voies métaboliques requises pour le maintien du fonctionnement du système immunitaire. L’étude de ces cas a en effet permis de développer des thérapies qui sont déjà sur le marché (abatacept ciblant le CTLA4 et les inhibiteurs de JAK, pour n’en nommer que quelques-uns).

            Le prochain titulaire de la chaire André-Lussier souhaite donc élargir notre compréhension des mécanismes qui compromettent le fonctionnement normal du système immunitaire, menant ainsi à sa dérégulation et ultimement à l’apparition de maladies immuno-rhumatologiques. Pr Allard-Chamard souhaite particulièrement étudier les manifestations rhumatologiques qui accompagnent les immunodéficiences primaires du spectre de la maladie appelée : « immunodéficience commune variable » (ICV). L’étude de cette maladie et de ces patients aux phénotypes extrêmes permettra de mieux comprendre les interactions entre le génome, le système immunitaire et les manifestations cliniques. De telles informations permettront éventuellement d’ajuster le traitement d’autres patients atteints de maladies rhumatologiques qui ont des anomalies immunes similaires.

Présentation du Titulaire

Pr Allard-Chamard est membre du département de médecine de la Faculté de médecine et des sciences de la santé et du Centre de recherche du CHUS. Il a obtenu son statut de clinicien-chercheur en 2019 et a déjà publié 13 articles. Au cours de son perfectionnement post-doctoral au Ragon institute of MGH, MIT and Harvard (07-2016 au 07-2019), Pr Allard-Chamard a développé un intérêt spécifique pour la composante génétique et immunologique des maladies immuno-rhumatologiques qu’il a pu étudier de façon approfondie. Il a étudié les mécanismes par lesquels les défauts géniques observés dans la cohorte d’immunodéficience du Ragon Institute mènent tous à un phénotype d’ICV avec des lymphocytes B incapables de fonctionner. Plusieurs gènes ainsi découverts sont en cours de caractérisation et le détail des maladies associées en train d’être décrit. Ces maladies n’ont pour la plupart pas encore de nom, car leur découverte est trop récente. Une des découvertes les plus importantes, en se basant sur les défauts génétiques observés, a été la découverte d’un mécanisme par lesquels les patients atteints d’ICVs causée par un gain de fonction de la protéine PI3K-delta développent une auto-immunité. Dans un article publié dans la revue Science Signaling (2019), dont Pr Allard-Chamard est co-premier auteur, son équipe et lui ont présenté plusieurs informations capitales pour le programme de recherche proposé pour la Chaire André-Lussier.

 

En faisant un profilage génétique de la cohorte de patients présentant des troubles immuno-rhumatologiques, Pr Allard-Chamard a ainsi pu identifier un patient avec une mutation dans un gène différent codant pour p85, la sous-unité régulatrice de PI3K-delta. Ce patient a la même présentation clinique que les patients avec une mutation du site catalytique de PI3K-delta, démontrant que toute la cascade métabolique est importante pour les manifestations cliniques du syndrome de PI3K-delta. Il a de plus fait le lien entre une perturbation des gènes impliqués dans la voie métabolique PI3K-delta et un nouveau syndrome de perturbation du système immunitaire. Cette perturbation est caractérisée par un arrêt dans la différenciation des lymphocytes B, une baisse de la production d’anticorps et l’apparition d’une immunodéficience chez ces patients. Par contre, malgré leur développement altéré, ces lymphocytes B ne sont pas inactifs et produisent des anticorps qui participent aux manifestations autoimmunes accompagnant cette maladie.

Objectifs Stratégiques

Lors de son mandat 2020-2025, la chaire André-Lussier poursuivra les objectifs suivants :

·       Mieux comprendre par quels mécanismes les immunodéficiences primaires ayant des bases génétiques engendrent des maladies rhumatismales. Ces connaissances seront utilisées afin de raffiner les traitements offerts aux patients et d’identifier de nouvelles cibles thérapeutiques ;

·       Développer une biobanque de patients avec une immunodéficience primaire et une maladie rhumatologique ;

·       Mettre en place des outils pour le dépistage de

Figure 1. Modification des algorithmes de traitements que nous souhaitons instaurer.

 désordres géniques de ces patients afin de pouvoir personnaliser leur traitement ;

·       Former des étudiants universitaires aux 3 cycles, ayant une expertise en rhumatologie;

·       Devenir un centre de référence canadien pour les maladies rhumatologiques causées par une immunodéficience primaire provenant d’un désordre génique sous-jacent.

·       La recherche financée par la chaire servira de fondation pour appliquer aux IRSC afin d’établir un programme de recherche multidisciplinaire (Rhumatologie, immunologie et génétique) visant à comprendre la dualité immunodéficience et auto-immunité présente chez certains patients atteints de maladies rhumatologiques

Recherche proposée

Le programme de recherche proposé vise à étudier les bases moléculaires de l’auto-immunité et des manifestations rhumatologiques qui accompagnent les immunodéficiences primaires causées par gène unique. Dans un premier temps, des patients avec ICVs et atteintes rhumatologiques seront recrutés afin d’identifier les atteintes génétiques et immunitaires qui les caractérisent. Chaque gène dysfonctionnel identifié sera caractérisé en fonction des altérations engendrées dans le système immunitaire. Les cellules qui mènent aux manifestations auto-immunes seront-elles aussi caractérisées avec une attention particulière pour la recherche de cibles thérapeutiques.

Une classification mixte des désordres immuns sera établie en se basant sur les désordres génétiques et les atteintes immunologiques résultantes. Par la suite, ces patients permettront d’établir des profils types de désordre immun avant que leurs signatures immunes ne soient étudiées à travers les maladies rhumatologiques les plus fréquentes (polyarthrite rhumatoïde et lupus érythémateux disséminé), dans le but d’ajuster les traitements en fonction de la signature immuno-génétique de chaque patient.

Impact attendu

Le programme poursuivi permettra de créer une classification mixte de pathologies, avec des traitements associés, afin de proposer aux cliniciens des algorithmes de traitement mieux adaptés aux différents profils cliniques. De plus, la chaire permettra majoritairement de soutenir la formation de personnel hautement qualifié (2 étudiants gradués par années). En lien avec la Chaire André-Lussier, une étude clinique prospective avec les signatures élaborées sera également mise en place pour étudier les possibilités d’ajustement des traitements et permettre une amélioration de la prise en charge des patients. Les résultats escomptés permettront de publier au moins 1 article dans un journal de grand impact par année.

Importance du projet pour linstitution

Le programme de recherche proposé s’'intègre dans l’axe inflammation douleur du Centre de recherche du CHUS, le thème fédérateur Santé : promotion, prévention et approches de précision de l’Université de Sherbrooke, en plus d’être aligné avec les priorités stratégiques du gouvernement du Canada et son volet sur les maladies rhumatismale et arthrite. En outre, le programme proposé s’arrime bien aux intérêts antérieurs du service de rhumatologie et la biobanque déjà mise en place par Dr Boire sur les arthrites inflammatoires. L’offre clinique développée aidera également les cliniciens à traiter leurs patients et participera au rayonnement de l’Université de Sherbrooke. Notre expertise clinique nous vaut en effet des références locales, mais également des références de d’autre province (Alberta et Ontario) et de l’international (États-Unis, Vermont).

Nom de l’étudiant

Programme d’étude

Titre de la thèse, mémoire, rapport de stage

Établissement d’enseignement

Direction

José Kitengue Mateso

Maitrise en immunologie

Impact of IL15 on osteoclastogenesis

Université de Sherbrooke

Dr Hugues Allard-Chamard & Dre Sophie Roux

Jean Vencic

Doctorat en biochimie

Immunophénotypage  par single-cell RNA-Seq de patients avec polyarthrite rhumatoïde

Université de Sherbrooke

Dr Hugues Allard-Chamard & Dre Michelle Scott

Mohammad Mobarak Chowdhury

Doctorat en biologie cellulaire

À déterminer

Université de Sherbrooke

Dr Hugues Allard-Chamard & Dre Sheela Ramanathan

Camille Rollin

Master inBiomedical Sciences

Study of lymphocytic subtypes involved in the production of rankl and in the formation of osteoclasts in inflammatory pathologies

Université de Namur

Dr Hugues Allard-Chamard & Dre Sophie Roux

Zafer Akman

Étudiant en médecine

Coping in early rheumatoid arthritis

 

Dr Hugues Allard-Chamard & Dr Gilles Boire

Camille Giroux-Rives

Étudiante en médecine

Optimisation d’immunophénotypage de PBMCs par cytométrie lavés par flux laminaire

Université de Sherbrooke

Dr Hugues Allard-Chamard

Christian Doucet

Technique de laboratoire volet Biotechnologies

Mise au point de protocole d’immunophénotypage de PMBCs

Collège Ahuntsic

Dr Hugues Allard-Chamard

Félix Lessard

Médecine interne

Analyse de l’immunophénotypage par cytométrie de patient avec polyarthrite rhumatoïde débutante

Université de Sherbrooke

Dr Hugues Allard-Chamard