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Prix Recherche et création - Lauréats 2021

Julie Achim

Sciences humaines et sociales

Soutenir les enfants en difficulté et apprendre à leurs parents à « mentaliser »

Bon nombre d’enfants qui consultent en pédopsychiatrie ont du mal à identifier et à exprimer ce qui les habite, leur aptitude à recourir aux mots et au jeu symbolique pour le faire s’avérant limitée. En effet, plusieurs d’entre eux ainsi que leurs parents présentent d’importantes difficultés à « mentaliser ». Cette notion réfère à la capacité d’une personne à tenir compte de son monde interne tout comme celui d’autrui et à s’y appuyer pour penser ses propres comportements, ceux des autres ainsi que la nature des liens qui les unissent.

Comment aider des enfants qui n’ont pas un accès suffisant à la symbolisation et au langage leur permettant de bénéficier d’une psychothérapie dite classique? En réunissant des contributeurs et contributrices d’expérience au sein de l’ouvrage collectif Mentaliser en contexte pédopsychiatrique : interventions thérapeutiques, la professeure Julie Achim propose le premier livre en français, à l’échelle internationale, consacré aux applications thérapeutiques de la mentalisation pour les enfants qui consultent en pédopsychiatrie et leurs familles. Le résultat : une importante publication qui met à profit des expertises diversifiées et complémentaires, qui viendront sans doute en aide à plusieurs enfants souffrant de difficultés affectives et relationnelles sévères ainsi qu’à leurs parents.

Le livre propose une introduction à la notion de mentalisation et à ses applications cliniques en contexte pédopsychiatrique. En plus d’identifier des critères permettant d’évaluer la capacité à mentaliser des enfants et des parents qui consultent en pédopsychiatrie, l’ouvrage présente des manifestations cliniques observables de la mentalisation ainsi que de ses déficits et suggère diverses modalités évaluatives et thérapeutiques. Des adaptations à d’autres contextes et populations cliniques sont possibles et pertinentes, par exemple en protection de l’enfance, auprès d’enfants et d’adolescents présentant des difficultés moins sévères.

Publié en octobre 2020 chez De Boeck Supérieur, dans la collection Carrefour des psychothérapies, l’ouvrage est considéré par les experts comme une contribution incontournable et est voué à une belle diffusion internationale.

François Michel Boisvert et Xavier Roucou

Médecine et sciences de la santé

Une protéine qui en cachait d'autres

La dégradation des protéines fait partie des fonctions cellulaires essentielles à la vie. Elle permet à la cellule de maintenir un équilibre en se débarrassant des protéines superflues ou défectueuses. Le système ubiquitine-protéasome, qui consiste en l’addition d’une petite protéine, l’ubiquitine, à des protéines cibles, est l'un des principaux mécanismes responsables de la dégradation des protéines dans les cellules. Le hic, c’est que, jusqu’à maintenant, les scientifiques pensaient que l’ubiquitine était une seule et unique protéine.

La découverte de plusieurs variants de l’ubiquitine par l’équipe des professeurs François Michel Boisvert et Xavier Roucou vient complètement changer la donne, et ouvre la voie à la découverte de mécanismes de régulation par ces nouvelles ubiquitines, et potentiellement de nouveaux traitements contre le cancer.

En effet les cellules cancéreuses sont fortement dépendantes de la voie ubiquitine-protéasome, qui est donc une cible thérapeutique intéressante. Cependant, les inhibiteurs généraux de la dégradation des protéines sont toxiques et associés à des maladies neurodégénératives. Le développement d’inhibiteurs plus spécifiques basés sur les nouveaux variants d’ubiquitine représente donc une avenue anticancéreuse potentielle.

L’impact de cette découverte est énorme. C’est pourquoi la prestigieuse revue Nature Communications a publié en mars 2020 l’article scientifique de l’équipe des professeurs François Michel Boisvert et Xavier Roucou.

L’Université de Sherbrooke est heureuse de leur remettre le Prix de la recherche et de la création dans la catégorie Médecine et sciences de la santé.

Michel Pioro-Ladrière

Sciences naturelles et génie

Le petit degré qui révolutionne la recherche quantique

Il faut des millions de qubits pour atteindre le plein potentiel de l’ordinateur quantique, cette machine du futur qui promet de réaliser en quelques secondes des calculs qui nécessitent actuellement des années. Et des millions de qubits, ça chauffe!

Le défi constant de la recherche quantique, c’est justement de pouvoir refroidir les dispositifs à des températures de près de 0 kelvin (-273,15 degrés Celsius) pour éviter les erreurs de calcul. Or, le professeur Michel Pioro-Ladrière et son étudiant alors au doctorat Julien Camirand Lemyre, avec le concours de collègues de l’Université New South Wales en Australie, ont mis en commun deux technologies quantiques pour réussir une prouesse époustouflante :  des microaimants et des puces à base de silicium purifié qui rendent possible l’utilisation des qubits à de plus hautes températures, soit 1,5 kelvin.

Ce n’est qu’un petit degré et des poussières en plus, direz-vous. Mais c’est toute la différence du monde puisqu’on peut maintenant envisager de réunir l’électronique de contrôle et le processeur dans le réfrigérateur cryogénique, ce qui n’était pas possible avant puisque l’électronique ne fonctionne pas près du zéro absolu et devait rester à l’extérieur du réfrigérateur et être relié par câbles au processeur. Pour un ordinateur quantique digne de ce nom, cette infrastructure prendrait des proportions gigantesques. La découverte du Pr Pioro-Ladrière et de Julien Camirand Lemyre ouvre enfin la voie à la miniaturisation des installations. Et c’est grâce à une collaboration peu banale entre les équipes de recherche.

Cette découverte a été publiée le 15 avril 2020 dans la prestigieuse revue Nature et comptait parmi les 10 découvertes de l’année 2020 du magazine Québec Science. En avril 2021, elle a même valu un prix Mérite estrien.

L’Université de Sherbrooke est honorée de remettre au professeur Pioro-Ladrière le Prix de la recherche et de la création dans la catégorie Sciences naturelles et génie.

Maxime St-Hilaire

Sciences humaines et sociales 

Le positivisme juridique sous toutes ses coutures

Le positivisme est l’une des traditions les plus riches de la philosophie des sciences, mais aussi de la philosophie du droit. Il s’agit d’une famille de théories qui insiste sur le caractère « factuel » ou « posé » du droit, c’est-à-dire sur autant de tentatives de connaissance du droit voulant se fonder soit sur l’observation des faits, soit sur l’analyse de normes « existantes », identifiées et ordonnancées. Le passage du positivisme scientifique au positivisme juridique n’avait effectivement rien d’évident. Or, si aucune définition du positivisme juridique ne fait l’unanimité, le professeur Maxime St-Hilaire s’est donné pour mission d’en comprendre tous les sens et de nous les expliquer.

Dans son ouvrage Les positivismes juridiques au XXe siècle. Normativismes, sociologismes, réalismes, paru en août 2020 dans la prestigieuse collection Diké des Presses de l’Université Laval, le professeur St-Hilaire réussit en moins de cent pages à transmettre le fruit de plus de dix ans de lectures, de réflexions et de travaux et à ainsi initier le lecteur à l’état du débat sur ce concept en faisant preuve d’une grande érudition. Un tour de force vu l’étonnante pluralité d’œuvres à l’étude.

Le résultat : un outil de compréhension de la philosophie de droit qui permet, en deçà et au-delà de la période particulièrement dense sur laquelle il se focalise, d’à la fois renouer avec les débats d’origine et d’apporter un nouvel éclairage sur de nombreux débats actuels. Il évoque la plupart des grands juristes du siècle dernier et analyse les grands courants ou perspectives du positivisme, en décloisonnant les cultures juridiques et les territoires.

Déjà largement distribué au Canada, en Europe et même en Asie, l’ouvrage a rapidement été intégré aux enseignements sur l’État de droit dans les facultés de droit québécoises.

L’Université de Sherbrooke est ravie d’attribuer au professeur Maxime St-Hilaire le Prix de la recherche et de la création dans la catégorie Sciences humaines et sociales.