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Séminaires Tek-No-Logos du Studio K

Quand l’art et le génie font penser autrement

Robbie Kuster et René Lussier, compositeurs et musiciens d'avant-garde
Robbie Kuster et René Lussier, compositeurs et musiciens d'avant-garde

Qu’ont en commun les artistes Yves Desrosiers, Fred Fortin, René Lussier, Robbie Kuster, Myriam Gendron, le Collectif KrRoLe et Hélène Dorion avec les personnes ingénieures qui étudient à l’Université de Sherbrooke? Si vous pensez au prototypage d’une pièce musicale, d’un poème, d’une bande dessinée, d’un respirateur mécanique pour les nouveau-nés ou d’une bouée produisant de l’eau potable, vous avez élucidé l’énigme du point de convergence. Il s’agit du prototype comme objet commun des artistes et des scientifiques. Ainsi, le prototypage est-il le lieu possible de rencontres entre la recherche scientifique et la création artistique, entre la création scientifique et la recherche artistique?

Les musiciens et compositeurs d’avant-garde René Lussier et Robbie Kuster débattront de cette question lors du troisième séminaire Tek-no-Logos du Studio K avec la complicité du professeur Jean-Sébastien Plante (génie mécanique), une cohorte de futures ingénieures et futurs ingénieurs, et des étudiantes et étudiants de l'École de gestion. Cet évènement à la fois académique, ludique, collaboratif et créatif se déroulera le 23 novembre prochain, au Studio de création Fondation Huguette et Jean-Louis Fontaine de l’UdeS.

« Ces séminaires dresseront des parallèles entre la création artistique et scientifique. Ils prendront forme en invitant un artiste et un scientifique avec leurs instruments de création et ou artefacts pour discuter pendant 60 à 120 minutes du processus de création et ou d’innovation dans leurs sphères de conception respectives », annonce Jean-Sébastien Plante, spécialiste en robotique et automatisation, qui ajoute du même souffle que « le nom choisi pour la série de séminaires provient du grec ancien tekhnologia, où le mot technologie se définit comme étant un traité (discours) sur un art ». La dénomination Tek-No-logos est un dérivé de cette appellation.

En valorisant le processus plutôt que le résultat, en mettant en exergue le rôle du prototype comme objet commun aux artistes, aux chercheurs et aux ingénieurs, des projets hybrides dont le statut épistémologique reste à définir peuvent émerger de la collaboration artistes-ingénieurs. Emanuel Kant, un philosophe du 18e siècle, disait que la création artistique est une façon de réussir le produit, ne pouvant être démontrée scientifiquement ni même décrite. L'artiste, pour être artiste, doit faire preuve d'une imagination créatrice. Il a le pouvoir et la puissance de créer, c'est ce que l'on appelle le génie (Kant, 1790).

Une fois la portion du séminaire terminé, les artistes Lussier et Kuster convient la communauté étudiante provenant des domaines du génie, de l’administration, des lettres et des sciences humaines à la Petite salle du Centre culturel de l’UdeS pour leur offrir dès 18 h, un voyage surréaliste. La musique actuelle d’avant-garde qui sera interprétée par ce duo les influencera-t-elle à se lancer dans le prototypage à leur tour?

À propos du duo Lussier-Kuster

En l’an 2000, le batteur et percussionniste d’origine suisse Robbie Kuster adopte Montréal comme lieu de résidence. Reconnu par ses pairs pour l’inventivité de son jeu à la batterie et aux percussions, il se démarque en jouant à la fois avec Patrick Watson, Élisapie, le Large Ensemble, Gros Méné et le Yannick Rieu Non-Acoustic Project, pour ne nommer que ceux-là. Il forme de plus, un duo jazz avant-gardiste avec son comparse René Lussier, où il joue de l’égoïne et de l’orgue à clous en y appliquant soigneusement le feutre de ses baguettes.

Quant au compositeur, improvisateur et interprète de musique actuelle René Lussier, il est sans contredit l’un des multi-instrumentistes les plus éclectiques au Québec, en plus d’être un virtuose à la guitare du même acabit que Frank Zappa. Parmi toutes ses œuvres, dont la musique du Moulin à images, il a signé en 1989, l’un des meilleurs albums d’expression francophone, Le trésor de la langue, un manifeste politique à la fois drôle, douloureux et dérisoire. Gratifié du prix Paul-Gilson accordé par la Communauté des radios publiques de langue française en 1989 pour cet album, il réussit à transcrire instrumentalement la voix parlée au moyen d’orchestrations de styles musicaux variés.

Un discours de Michel Chartrand se transforme aisément en un blues louisianais alors que le discours célèbre du général de Gaulle sur le balcon de l’Hôtel de ville de Montréal se termine en très haute voltige, par des riffs de guitare percutants à la Voivod. Son approche documentaire met de l’avant le débat sur la souveraineté et la question identitaire du Québec dans un voyage qui mène le prolifique compositeur de Montréal à Québec. René Lussier agencera de manière avant-gardiste la documentation collectée pour en faire une œuvre majeure qui marquera l’histoire de la musique francophone. 34 ans plus tard, l’album n’a pas vieilli d’une ride. Si vous ne l’avez pas encore écouté, il n’est pas trop tard, sinon réservez vos billets pour la prestation musicale d’improvisation du 23 novembre prochain.

Objectifs des séminaires

Ces séminaires visent à réunir un petit groupe de personnes étudiantes et membres du personnel de la faculté dans des rencontres centrées chaque fois sur le processus de création et d’innovation. La participation active sera encouragée à partir d’un sujet précis, et permettra de discuter sur les problèmes pratiques qui émergent pendant le travail de recherche et le processus de création pour produire des artefacts et ou ouvrir de nouvelles perspectives. L’artefact se définit ici comme étant ce « qui vient et est produit par l’art (du latin artis facta). Ils sont sans équivoque des manifestations de l’action de l’être humain et de ses transformations du monde. Il n’y a par ailleurs pas d’artefacts sans techniques (Leroi-Gourhan, 1965).

Si l’apprentissage enrichit l’expérience, l’apport des arts au cursus d’études des futures ingénieures et futurs ingénieurs pour tous les cycles fera en sorte que nos personnes diplômées développeront des habiletés pour relier des éléments provenant d’un autre champ disciplinaire et seront à même de penser différemment pour remettre en question les théories valorisées par leur propre paradigme.

Comme le rapportait l’historien des sciences, Thomas Kuhn, dans son ouvrage Structure Scientific Revolutions (1962), de « quelle manière susciter de nouvelles façons de penser dans la science normale? ». En ce sens, les chercheurs doivent remettre en question les théories valorisées par leur paradigme, mais peu le font. Les séminaires organisés par la Faculté de génie faciliteront cette réflexion nécessaire de part et d’autre.

Autres séminaires à venir

Artistes invités :

11 janvier 2024 : Myriam Gendron, auteure-compositrice (musique trad-folk réinventée) et le professeur Sébastien Langlois (co-auteur de l'essai En montant la rivière)

Février 2024 (date à déterminer) : Hélène Dorion, poète et romancière, et le collectif KrRoLe (bande-dessinée)


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