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12e colloque international pour étudiant.es du Centre d’études du religieux contemporain de l’Université de Sherbrooke | Le religieux contemporain : un terrain d'étude frontière

Date :
9 au 10 mai 2024
Type :
Colloques et congrès
Lieu :
Campus principal de Sherbrooke

Description : Descriptif du colloque

L’étude du religieux contemporain force une forme d’interdisciplinarité d’une manière inhérente à son champ d’étude. Son analyse convoque un faisceau d’approches de l’objet religieux, comme a su le faire Jean-Marie Brauns (2018). Ainsi, la circonscription de l’objet religieux varie selon le regard et la discipline. D’un côté, on peut le regarder selon une approche fonctionnaliste, comme l’a fait par exemple le sociologue Émile Durkheim (1912). Selon sa perspective, la religion aurait comme fonction première de maintenir une forme de cohésion sociale et d’éviter une certaine anomie dans les sociétés. D’un autre côté, pour un penseur tel que Paul Tillich (1968), l’objet religieux est ontologique. Il constitue le fondement de toutes les dimensions présentes dans l’expérience humaine. Pour ce théologien, la religion est aussi présente dans la culture, sous forme de ce qu’il désigne en tant que « substance religieuse », conférant sa profondeur aux objets culturels et permettant la médiation de l’infini dans une forme finie. L’objet religieux peut aussi être perçu à travers le prisme de la science, de la technologie, de l’art, de l’éthique, du droit, de la psychologie, des sciences politiques, et ce, autant dans ses dimensions essentielles qu’utilitaires. Cette pluralité de perspectives peut parfois rendre difficile l’opérationnalisation des balises qui définissent l’objet religieux (Gisel, 2019). Quoi qu’il en soit, dans le contexte de l’étude du religieux contemporain, nous savons que le religieux est omniprésent dans la société, aussi laïque soit-elle dans ses institutions et sa gouvernance. Nous savons aussi qu’il est impossible d’étudier l’objet religieux sans tenir compte du contexte et de l’époque dans lequel il se situe (Riquier, 2020).

Loin de disparaître (Maffesoli, 2020), le religieux a subi une mutation lors de son interaction avec la modernité (Dumas, 2011; Lenoir, 2003). De nouveaux groupes et de nouvelles appartenances se sont formés. Les quêtes de sens sont devenues plus individualisées. Selon Charles Taylor (2000), la naissance de nouveaux courants, tel que le « Nouvel Âge », a amené les croyants vers un pot-pourri spirituel où chaque personne adhère à ce qui lui convient. Ce contexte rend aussi plus difficile le développement d’un sentiment d’appartenance à un culte ou à une communauté en particulier. Selon Françoise Champion, avec l’émergence des nouveaux mouvements religieux, on observe « une rupture par rapport aux enjeux -en matière de salut, de leadership, d’organisation, de rapport au monde- qui structurent la tradition chrétienne » (2000, p. 225). Ces nouveaux mouvements religieux sont davantage orientés vers le développement personnel, l’expérience individuelle et la guérison. Ainsi, la frontière est floue entre ce qui est du ressort de l’objet religieux ou spirituel et du psychologique. Pierre Gisel (2019) abonde dans le même sens, soulignant combien nous vivons dans des sociétés qui instrumentalisent le religieux dans une visée thérapeutique. Champion renchérit en avançant qu’il y aurait « un débordement fondamental du religieux, à la fois du côté magique et du côté psychologique, chaque groupe ou réseau versant plutôt d’un côté ou de l’autre, les deux tendances pouvant toujours peu ou prou se mélanger, s’entrecroiser » (2000, p. 527). En ce sens, Gisel (2019) propose de repenser le rapport entre l’objet religieux et la société. Dans la société actuelle, le désir d’homogénéité peut amener certains groupes religieux à se radicaliser. On ne cherche plus à comprendre les croyances de l’Autre, ce qui amène Gisel à suggérer de ne pas évider le religieux des questions humaines de fond qui le constituent.

Ainsi, face à ces multiples déclinaisons du religieux contemporain qui se manifestent dans les différentes sphères de l’existence, il paraît nécessaire d’actualiser et de réfléchir au déploiement de l’objet religieux à travers les différentes disciplines où il est présent. Jusqu’où peut-on étirer l’objet religieux sans qu’il se dilue, qu’il ne perde de sa substance ? Afin d’en délimiter les contours et les frontières, est-il possible de sortir le religieux de sa boîte noire afin de le cerner, voire de le critiquer ?

Le programme complet sera bientôt disponible.