Liaison, 28 septembre 2006
Le juge Gomery à la Faculté de droit
«Les diplômés en droit seront
plus nécessaires que jamais»
STÉPHANIE RAYMOND
Le droit a énormément changé depuis 50 ans, et il continue d'évoluer à la
vitesse grand V, évolution qui suit celle de la société en général. Selon le
juge John H. Gomery, venu parler aux étudiantes et étudiants de la Faculté
de droit le 15 septembre, les diplômés en droit seront plus nécessaires que
jamais dans ce monde qui change si rapidement et qui doit résoudre des
problèmes de plus en plus complexes.
En 1956, John H. Gomery recevait son diplôme de l'Université McGill avec
40 autres jeunes hommes et seulement deux jeunes femmes. Il se préparait
ainsi à une carrière de touche-à-tout pour 375 $ par mois. «Ma première
cause a été la contestation par une compagnie d'assurance d'une réclamation
de 86 $», a raconté celui qui préside maintenant à la Cour supérieure des
causes impliquant des montants de 70 000 $ minimum.
Le juge Gomery a d'abord travaillé 25 ans chez Martineau Walker, devenu
aujourd'hui Fasken Martineau. «La pratique du droit a changé énormément de
ma première année de pratique à la dernière. Et vous ne pouvez espérer ne
pas être soumis à des changements aussi radicaux que ceux que j'ai eu à
vivre, a affirmé le juge. La transformation du droit ne va pas ralentir en
effet, avec certaines situations inacceptables telles que la dégradation de
l'environnement, l'écart entre riches et pauvres, le trafic de stupéfiants,
etc. Les titulaires d'un diplôme en droit seront plus que jamais nécessaires
à notre monde.»
Imagination et rigueur intellectuelle
Les juristes de demain devront donc faire preuve de flexibilité,
d'imagination et d'ouverture aux nouvelles avenues et idées. «Les
possibilités d'aujourd'hui sont fascinantes; oui, il y a de gros défis, mais
il faut être stimulé par ces défis», a mentionné le juge.
Pour le juge Gomery, si les étudiantes et étudiants les plus doués sont
ceux qui se placent le plus facilement au départ, ce ne sont pas
nécessairement eux qui connaîtront au bout d'un certain temps la carrière la
plus brillante. «La qualité principale du juriste est selon moi la rigueur
intellectuelle. Par exemple, un plaideur qui parle extrêmement bien, mais
qui a peu préparé son dossier au départ, a moins de chance de gagner un
procès qu'un autre qui s'exprime plus difficilement, mais qui a d'abord fait
une préparation complète et honnête à la base.»
Quelques mots sur la commission Gomery
L'assistance ne pouvait se passer de poser quelques questions sur la
fameuse commission Gomery. Si le juge est resté plutôt discret sur le sujet,
il s'est quand même avancé à dire : «Ce qui compte le plus, c'est que nous
ayons pu exposer les faits à la population, qui a ainsi pu former son propre
jugement. Et le jugement de la population pèse sans doute autant sur les
personnes concernées que celui d'un juge.»
Si son rapport est critiqué par certains, le juge Gomery ne regrette pas
de s'être embarqué dans cette aventure, bien qu'il n'ait pas pensé au départ
que la Commission ferait l'objet d'une telle couverture médiatique.
«Présider une commission est un rêve pour tout juge, a-t-il expliqué. Cela
représente un défi très intéressant. De plus, je voyais cela comme une
possibilité de rétablir dans la population une certaine confiance envers nos
institutions publiques. Je ne pouvais pas refuser une telle opportunité.»
John H. Gomery, qui a 74 ans, prendra sa retraite bientôt, puisque la
Cour supérieure oblige les juges à se retirer de leurs fonctions à 75 ans.
Que fera-t-il ensuite? «Je ne sais pas encore. Probablement m'occuper de mon
élevage», a terminé celui qui possède une ferme de 165 acres au sud de
Montréal.
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