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Regards sur l'actualité

Favoriser les mains propres à l'hôpital

Sophie Michaud
Sophie Michaud

22 janvier 2009

Robin Renaud

Un article paru dans le quotidien The Gazette en début d'année révélait des résultats étonnants pour plusieurs lecteurs. Une enquête interne tenue dans un centre hospitalier montréalais concluait que trois médecins sur quatre ne se lavent pas les mains entre les consultations de patients. Chez les infirmières, l'étude concluait que seulement 40 à 50 % d'entre elles se lavent les mains. Le directeur médical du contrôle des infections de cet hôpital admettait avoir du mal à persuader les professionnels de la santé à prendre au sérieux l'hygiène des mains. Or, cela constitue un facteur important de prolifération des germes et des infections en milieu hospitalier, et l'article rappelait qu'une recherche a démontré que 30 % de ces infections peuvent être évitées par le lavage des mains. Que penser de ces résultats? Nous avons recueilli le point de vue de la professeure Sophie Michaud, du Département de microbiologie et d'infectiologie de la Faculté de médecine et des sciences de la santé.

Journal UdeS : Êtes vous surprise de voir de telles données sur le lavage des mains des médecins?

Sophie Michaud : Je ne suis pas surprise de ces chiffres, étant donné que dans la littérature médicale, les taux d'observance aux mesures d'hygiène des mains pour l'ensemble des travailleurs de la santé se situent habituellement autour de 40 %.

Journal UdeS : Quel impact un tel comportement a-t-il sur la propagation de bactéries?

S. Michaud : Les microbes causant les infections nosocomiales sont souvent transmis par les mains des travailleurs de la santé lorsqu'ils ne se lavent pas les mains d'un patient à l'autre. L'hygiène des mains est la mesure la plus efficace pour réduire la transmission des infections nosocomiales ainsi que la propagation des bactéries multirésistantes à l'hôpital.

Journal UdeS : Pourquoi selon vous certains médecins semblent peu enclins à prendre au sérieux le lavage des mains?

S. Michaud : Je crois que le problème de la non-observance aux mesures d'hygiène des mains est beaucoup plus complexe qu'une question de mauvaise volonté du personnel. La promotion de l'hygiène des mains nécessite une stratégie multidimensionnelle, comportant l'éducation et la motivation du personnel, l'utilisation du gel antiseptique comme méthode principale d'hygiène des mains, l'évaluation de l'observance aux mesures par des indicateurs de performance, ainsi qu'un engagement important de l'administration et de l'ensemble des travailleurs de la santé pour améliorer l'hygiène des mains. La facilité d'accès aux lavabos ainsi qu'aux distributeurs de gel antiseptique est un autre facteur très important pour faciliter le respect de ces mesures.

Journal UdeS : Quelles mesures devraient être préconisées pour augmenter la fréquence du lavage des mains chez le personnel médical?

S. Michaud : La plupart des mesures mentionnées précédemment ont déjà été implantées dans les hôpitaux, avec des résultats variables. La prochaine étape, à mon avis, est de donner du feedback direct aux travailleurs de la santé immédiatement après qu'ils aient été observés et de diffuser les taux d'observance aux mesures d'hygiène des mains sur les unités de soins, pour que les changements de comportement soient durables et supportés par l'ensemble du personnel.

Journal UdeS : Il y a quelques années, vos travaux sur C. difficile et l'éclosion de plusieurs cas dans les hôpitaux avaient interpelé le milieu de la santé. Croyez-vous qu'il est temps de resserrer à nouveau les moyens de prévention?

S. Michaud : Il est essentiel d'instaurer une culture de prévention et de soins sécuritaires aux patients dans les hôpitaux, afin que les mesures d'hygiène deviennent une norme de pratique pour tous les travailleurs de la santé, que l'on soit en situation de crise ou non. J'invite les médecins à donner l'exemple en matière d'hygiène des mains. Comme le dit le slogan de l'affiche financée par la Fondation du CHUS et le fonds Brigitte-Perreault : Des mains propres pour sauver des vies; faites-le pour la santé de tous, incluant la vôtre!