Sommets Vol. XVII No 2 - Printemps-été 2004

 


Adrien Leroux
Génie 1959
Professeur
(1959 à 1997)
Faculté de génie

Bâtir une nouvelle société

Il est d'un naturel plutôt espiègle, le professeur Leroux. Quand on lui demande pourquoi il n'a pas choisi la prêtrise après ses études classiques, il hésite, bafouille un peu et brode enfin une fragile hypothèse selon laquelle il s'intéressait à l'ingénierie étant donné ses origines «minières» de la région d'Asbestos. Puis, dans une confidence d'adolescent, il avoue les raisons de son choix : «L'attrait du fruit défendu!» lance-t-il avec ce rire qui caractérise bien son tempérament bon enfant.

Adrien Leroux avait 22 ans quand il a commencé ses études à la Faculté des sciences de l'Université de Sherbrooke, en 1954. Il venait de passer huit longues années comme pensionnaire au Séminaire Saint-Charles-Borromée quand il s'est retrouvé tout fin seul dans une chambre louée, rue Gillespie. «Je m'ennuyais terriblement. Au bout de deux semaines, pour ne plus être seul, j'ai loué un petit appartement avec un confrère juste en face de l'école Saint-Michel, où se trouvaient les locaux de l'École de génie. Nous étions un peu green à cette époque, mais nous avons vite découvert les activités du centre-ville.»

Et le voilà qui fait revivre une autre époque, décrivant le restaurant Olivier, le Flamingo, la taverne de l'hôtel LaSalle, se rappelant les titres les plus populaires dans les juke-box et dégustant le souvenir de la découverte du rum and coke. Il raconte sa blind date avec celle qui devait devenir son épouse en 1957 et donner naissance à sa première fille, dès 1958, alors qu'il était encore aux études. Il parle également des difficultés financières, du peu de ressources, du régime alimentaire qui s'imposait à la fin des sessions. «Par chance, il y avait des gens qui nous soutenaient. Je me souviens de Paul Lussier, le propriétaire d'un restaurant rue Wellington. Nous l'appelions le père des étudiants, car il nous offrait un bon dîner copieux pour 25 ¢. J'allais souvent le voir.»

Le génie de l'apprentissage

Malgré les tracas du quotidien d'alors, Adrien Leroux se réjouit d'avoir eu la chance de faire ses études universitaires et tient en très haute estime les fondateurs de l'Université de Sherbrooke : «Chapeau! Ils ont été des visionnaires. C'est grâce à eux si nous avons pu bâtir une nouvelle société.»

Quand il pense à l'un des principaux fondateurs de l'École de génie, le frère Théode, il se appelle aussi le professeur. «Il avait énormément de mérite, mais il travaillait beaucoup trop pour son âge! dit-il avec malice. Il nous enseignait le calcul différentiel et intégral, une matière qu'il apprenait quelques jours avant les cours. Un jour, un confrère a eu l'idée de faire disparaître les notes que le frère Théode retranscrivait au tableau, ce qui causa à ce saint homme beaucoup de difficultés.»

Les étudiants avaient plus d'un tour dans leurs sacs. Adrien Leroux se souvient qu'en décembre 1955, durant les vacances de Noël, un confrère lui a demandé de l'aider à solutionner un examen de calcul intégral. «La date sur le document était celle du jour prévu pour l'examen de janvier. Ce confrère m'a alors expliqué qu'il avait volé les questionnaires d'examen en entrant dans la chambre du frère qui les dactylographiait et en récupérant les carbones. Le stratagème fut découvert la veille de l'examen.» Adrien Leroux soutient néanmoins que, malgré toutes ces astuces, les étudiants qui n'avaient pas assez travaillé ne réussissaient pas leur cours.

Le partage du savoir

En 1959, Adrien Leroux a choisi de partager le savoir qu'il venait d'acquérir à l'Université de Sherbrooke en y devenant professeur en électrotechnique au Département de génie électrique et génie informatique. Il y est encore aujourd'hui, toujours avec la même passion. Bien qu'il ait pris officiellement sa retraite, celui qui a piloté de nombreux dossiers chauds et est à l'origine de la fondation de la Société de microélectronique industrielle de Sherbrooke (SMIS) participe bénévolement à différents dossiers en vue d'encore contribuer à l'évolution de notre société. «La société québécoise m'a donné beaucoup; il est tout à fait normal que je le lui remette.»

 

UTILISEZ LES FLÈCHES DE NAVIGATION

OU FERMEZ CETTE FENÊTRE POUR
RETROUVER LE SOMMAIRE