Sommets Vol. XVII No 2 - Printemps-été 2004


Le professeur au nœud papillon

par Catherine Labrecque

Sa carrière, Étienne LeBel l'a consacrée à la création du Département de médecine nucléaire et radiobiologie et d'une importante unité de recherche. Avec son ambition et sa ténacité légendaires, il a ainsi assuré de solides bases pour la recherche en médecine nucléaire en créant des programmes, en recrutant de jeunes professeurs et en dotant le Département d'équipement de pointe.

 


Étienne LeBel
Professeur
(1968 à 1990)

Faculté de médecine

 

À l'entrée du Centre d'imagerie du Centre de recherche clinique, une plaque commémorative ainsi qu'une caricature d'Étienne LeBel, cheveux en bataille et nœud papillon démesuré,  rendent hommage à l'homme, un pionnier mondial de la médecine nucléaire. Ce bohème extrêmement innovateur possède une cinquantaine de nœuds papillon aussi colorés que sa personnalité. Son passage à la Faculté n'est pas passé inaperçu. «Jeune, j'étais pas mal désinvolte!» admet-il. Avez-vous des exemples? «J'en ai pas mal trop!» répond-il sans toutefois donner de détails.

Et son plus beau souvenir? Qu'on lui promette carte blanche à son arrivée à Sherbrooke. «En 1967, le doyen de la Faculté de médecine, Maurice LeClair, m'a invité à Sherbrooke pour discuter des développements futurs de la recherche en médecine nucléaire et en oncologie. Il m'a assuré une liberté sur le plan des études et son appui inconditionnel. En 1968 et 1969, je me suis consacré à la création et au développement du Département de médecine nucléaire et radiobiologie, à l'époque unique au Canada. J'ai recruté des professeurs, les deux premiers étaient Johan E. Van Lier et Léon Sanche, maintenant titulaires de chaires de recherche.»

Milieu de vie

Durant les premières années de la Faculté, Étienne LeBel a dormi quelques mois dans l'ancienne chapelle des bonnes sœurs. «Un espace avait été aménagé en chambre pour les employés, les médecins visiteurs et les professeurs invités. Par ailleurs, le déplacement sur les chemins de terre était parfois périlleux l'hiver. J'étais réputé pour mes nombreuses sorties de route avec ma Citroën! Je me souviens d'un hiver où j'ai raté la courbe de l'autre côté du ruisseau qu'il y avait à cette époque, pour finalement m'immobiliser à 100 pieds du chemin!»

Entre les années 1968 et 1993, des centaines d'étudiants ont été supervisés par Étienne LeBel. Il en a côtoyé plusieurs dans une atmosphère plutôt décontractée. «Entre 1969 et 1980, plusieurs étudiants ont terminé leurs partys chez moi. Les partys de Noël de la Faculté sont particulièrement mémorables. La Faculté organisait une revue des situations loufoques concernant des professeurs. Après, j'invitais les élèves chez moi. J'en ai accueilli jusqu'à cinquante à la fois!» Les prix qu'Étienne LeBel a reçus dans sa carrière témoignent de deux côtés de sa personnalité : le fêtard et le scientifique. Il a obtenu le prix Michel-Sarazin en 1991 à titre de chercheur et le prix Bacchus en tant que buveur en 1985, deux prix décernés par le Club de recherches cliniques du Québec.

Milieu d'avenir

Dans les 20 dernières années, plusieurs projets d'Étienne LeBel se sont concrétisés. «En 1983, le Conseil de recherche en médecine (CRM) du Canada a reconnu l'expertise sherbrookoise en sciences des radiations et a attribué le titre de groupe CRM à l'équipe de Sherbrooke. Cela a représenté beaucoup pour moi. En plus, cela a permis de créer un programme de doctorat en radiobiologie, unique au Canada. En 1998, le Département a enfin accueilli le premier cyclotron, un accélérateur de particules servant à produire des radio-isotopes. Je le voulais depuis mon arrivée à Sherbrooke.» Son rêve de créer une unité de recherche en médecine nucléaire et radiobiologie se concrétise en 1993. Le Centre de recherche clinique a obtenu des fonds des gouvernements pour construire un bâtiment avec un centre d'imagerie de haute technologie, où s'effectuent des recherches en médecine nucléaire.

Quand on lui parle d'avenir, Étienne LeBel a confiance. «De nouveaux équipements et un agrandissement au Centre d'imagerie sont prévus. Ces réalisations provoqueraient l'envie de la famille nucléaire du Québec.» Il tient à souligner que sa carrière n'est pas tout à fait terminée, puisqu'il passe une journée par semaine à l'Université. «Le contact avec les étudiants est primordial et me permet de rester jeune.»

En 1988, alors qu'il était vice-doyen à la recherche et aux études avancées, Étienne LeBel a reçu une plaque commémorative de la part de ses étudiants. On peut y lire : À notre patron modèle qui, contre vents et marées, nous a fait travailler dans la paix et la sérénité ces cinq dernières années.

 

Grâce à un don de 75 000 $ d'Étienne LeBel, des bourses totalisant 15 000 $ seront remises annuellement, jusqu'en 2006, à des étudiants des 2e et 3e cycles poursuivant leur recherche fondamentale en radiobiologie ou dans les sciences connexes et dont les retombées sont envisageables en radiobiologie.

 


 


Michel Baron
Médecine 1971
Directeur, Agence des services de santé et des services sociaux de l'Estrie

La fac à vaches!

«Quand j'étais résident, j'ai participé à quelques partys d'Étienne LeBel. La tradition voulait que, avant les vacances des fêtes, des partys privés se tiennent chez les professeurs de la Faculté. Plusieurs étudiants faisaient la tournée des partys. C'était connu : le dernier party privé avait lieu chez Étienne LeBel. C'était lui qui veillait le plus tard! Les étudiants quittaient les autres partys et arrivaient chez lui aux petites heures du matin. À 6 h, madame LeBel se levait et cuisinait des œufs et du bacon pour tout le monde! Étienne LeBel adorait ces partys! Il avait toujours l'air frais et dispos! 

«À la fin des années 1960, nous vivions sept jours sur sept à la Faculté. Les chambres, les cuisines et les salles de cours étaient dans le même bâtiment. Le matin, certains étudiants allaient même à leurs cours en pyjama! Située en pleine campagne, la Faculté était entourée de fermes. On l'appelait la fac à vaches! Le loisir le plus commun était la chasse dans le bois derrière le bâtiment. Plusieurs étudiants montaient sur la terrasse en haut de l'aile 1 pour tirer sur des pigeons. Cet endroit constituait le champ de tir des garçons et la plage nudiste des filles!»

 

François Lamoureux
Médecine 1972
Chef du Département de médecine nucléaire, hôpital Santa-Cabrini

Partys sans bon «sang»

«Je faisais partie des organisateurs des partys de la Faculté de médecine. Ces fêtes se préparaient plusieurs mois à l'avance. Nous faisions des coups aux professeurs et les présentions lors des partys. Je me souviens d'une nuit où nous avions appelé un hématologue, le docteur Souadjan, pour lui dire que nous avions un cas spécial, qu'il nous était impossible d'identifier une maladie à la suite d'une prise de sang. Venu sur place d'urgence, le docteur n'avait pas pu identifier la pathologie. C'était normal : nous avions prélevé du sang d'une grenouille! Étienne LeBel raffolait de ces partys, il n'en manquait pas un! J'étais un peu bohème comme lui, je portais et porte toujours des nœuds papillon. C'est un bon vivant, un épicurien accompli!»

 

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