Sommets Vol. XVII No 1 - Hiver 2004

 

Le paradis avant la fin de vos jours

par Sylvie Couture

«Réussir son vieillissement, c'est accepter de s'engager dans un processus de spiritualisation.» Celui qui apporte la bonne nouvelle n'a rien d'un prédicateur; il s'appuie non seulement sur une impressionnante carrière en recherche sur le vieillissement, mais également sur une longue vie, riche en expériences et en émotions. Et s'il prêche, c'est par l'exemple…

 


Gilbert Leclerc
Retraité et chercheur au Centre de recherche sur le vieillissement
Théologie 1953

 

 

 

 

 

 

Gilbert Leclerc est chercheur au Centre de recherche sur le vieillissement. Il est aussi retraité : «La retraite n'est pas la fin du travail, c'est un changement d'activités.» Jeune de cœur, de corps et d'esprit, Gilbert Leclerc n'est pas seulement tombé dans la marmite de jouvence, il y est resté à mariner paisiblement. Il en est presque contagieux! À son contact, les gens risquent de prendre un coup de jeunesse en découvrant un sens à leur vie, le sujet de prédilection des récentes recherches de Gilbert Leclerc : «Mes recherches sur l'actualisation du potentiel des personnes âgées m'ont amené à m'intéresser aux conditions nécessaires à un vieillissement réussi. Trouver un sens à sa vie en est une essentielle.»

Un sens à la vie

Le concept de sens à la vie fait aujourd'hui partie intégrante de la psychologie humaniste. De nombreuses études ont démontré que le sens à la vie influence positivement la santé physique et psychologique de l'individu et lui permet de garder une raison de vivre malgré les bouleversements de son existence. En associant le vieillissement au concept de sens à la vie, Gilbert Leclerc s'interroge sur notre capacité de redonner un sens à notre existence après avoir perdu les traditionnelles sources de sens que sont le travail, le statut social, l'amour d'un conjoint, la santé, l'autonomie…

Pour Gilbert Leclerc, «la réussite de notre vieillissement dépend en grande partie de notre capacité d'adaptation aux nombreuses pertes qui jalonnent le vieillissement». Il soutient qu'il faut donner un sens à notre passé, à notre présent et à notre avenir, tant sur le plan personnel que spirituel : reconnaître nos succès passés, mais aussi nos actions désintéressées, comme le don de soi, la compassion ou la tolérance dont nous avons fait preuve pendant notre vie; continuer à jouer un rôle dans la société, mais en tissant des liens avec d'autres sources de sens, comme la nature, l'entraide ou la paix; nous engager avec optimisme dans des projets de vie pour nous-même, mais également pour les autres ou pour des causes qui nous tiennent à cœur.

«Avec l'âge, nous nous concentrons davantage sur l'essentiel, en mettant progressivement de côté nos désirs matérialistes et égocentriques pour nous tourner vers des valeurs spirituelles qui transcendent notre existence. En fait, nous constatons que la vie ne peut atteindre tout son sens que si elle est centrée sur quelque chose de plus grand et de plus profond que nous-même.» Oui, mais qu'entend-on par spiritualité? «Au-delà des religions et des systèmes de croyances, la spiritualité est fondamentale et universelle. À l'intérieur même de chacun, elle répond aux questions existentielles sur sa propre identité et sur son rôle dans l'univers. Elle englobe toutes les dimensions de l'être, ses relations avec les autres et avec son environnement, de même que ses relations avec le sacré et le transcendant. Dès qu'une personne sort de son égocentrisme, elle entre dans sa spiritualité.»

Un sens au paradis

Gilbert Leclerc considère que les interventions auprès des personnes âgées ne doivent pas se limiter à la santé physique : «Aidez-les à se réaliser pleinement, mais aussi à revoir le positif de leur vie, à recadrer leurs regrets et à se donner de nouvelles raisons de vivre. Elles auront ainsi l'impression de pouvoir mourir en paix.»

Pour lui, il y a deux grandes dimensions au vieillissement : «Celle de la dégradation de nos capacités que nous essayons tous, bien pertinemment, d'arrêter; et celle de la croissance, de l'acceptation des pertes et de la reconstruction du sens à la vie, une dimension intemporelle qui échappe à la dégradation et qui ne cesse de croître.» De là, il n'y a qu'un pas, qu'un souffle, pour traverser l'ultime passage vers une autre vie. C'est peut-être ainsi que Gilbert Leclerc nous souhaite le paradis avant la fin de nos jours!

 

Vox pop

Avez-vous peur de vieillir?

Non. Je m'y prépare au quotidien, mais cela ne m'empêche pas d'appréhender les pertes qui font partie de tout vieillissement, même le plus réussi.

G. Leclerc

 

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