Avant de suivre les traces de ses ancêtres et d'exercer à
son tour la profession d'avocat, Johnpeter Weldon a tâté l'enseignement.
Puis à 28 ans, il s'est tourné vers le droit en s'inscrivant à l'Université
de Sherbrooke. Une longue carrière d'avocat a suivi, qui a ensuite fait place
à une troisième carrière en tant que médiateur.
Le droit, une affaire de famille
par Catherine Schlager
Johnpeter Weldon est avocat de quatrième génération. Son grand-père, Richard
Chapman Weldon, est le fondateur de la Faculté de droit de l'Université
Dalhousie à Halifax, tandis que son père a fait carrière en représentant d'importantes
corporations. Cela n'a pas empêché Johnpeter d'entreprendre une première
carrière dans l'enseignement après avoir obtenu un baccalauréat à McGill
et une maîtrise en langue et littérature françaises à l'Université Laval.
« À 28 ans, le destin familial m'a rattrapé et je me suis inscrit en droit
à l'Université de Sherbrooke en 1972 dans le but de promouvoir un idéal de
justice sociale à l'intérieur des cliniques juridiques. »
Même si l'Université de Sherbrooke n'est pas la seule institution qu'il
a fréquentée, Johnpeter Weldon en garde un excellent souvenir. Il se remémore
avec plaisir l'accueil chaleureux du secrétaire de la Faculté de droit,
Jacques Lemay, le paysage composé de lacs et de montagnes qu'il a adoré au
point de s'établir dans la région ainsi que certains cours et stages qui l'ont
particulièrement marqué. « Pendant mes études de droit, j'avais deux
passions : les cours de droit pénal avec le professeur Crépeau et mes
différents stages à la Clinique juridique de Sherbrooke, où un de mes mentors
était un jeune avocat, Yves Bergeron, qui reste un de mes grands amis. Ce qui m'intéressait
dans le droit criminel, c'était le côté humain. Ça me faisait penser aux
romans de Balzac : il y avait toujours une histoire et le plus coupable n'était
pas toujours l'accusé. »
Des causes mémorables
Après avoir obtenu le droit de pratiquer le métier de ces ancêtres,
Johnpeter Weldon souhaite venir en aide aux laissés pour compte ainsi qu'aux
gens ayant peu de pouvoir dans la société. C'est ainsi qu'il accepte le
poste de criminaliste à l'aide juridique où il restera pendant près de dix
ans, avant de devenir juge pour la Régie du logement. En parallèle, il mène
pendant plusieurs années une carrière d'avocat de la défense.
Certaines causes demeurent particulièrement importantes à ses yeux. La
première, qu'il a remportée, est celle d'un jeune homme qui, sous
pression, avait plaidé coupable pour un meurtre qu'il n'avait pas commis,
et pour qui il a pu obtenir de la Cour d'appel le droit à un nouveau procès.
Une autre, qui demeure sa plus importante victoire, est celle d'un père de
famille qui a tiré sur son ex-femme et qui a failli la tuer alors qu'il
souffrait du désordre explosif isolé, un trouble de la personnalité très
rare. Le jury l'a donc acquitté de tentative de meurtre, tout en le trouvant
coupable d'un crime moins grave.
La victoire ou la défaite
Au début des années 1990, après plus de 17 ans de loyaux services,
Johnpeter Weldon commence à se lasser du rôle d'avocat de la défense. Il
évoque de façon fort explicite que le monde dans lequel nous vivons n'est
pas toujours noir ou blanc, tel un verdict de culpabilité ou de
non-culpabilité, mais que la vie est bien plus complexe que cela. « À 49 ans,
je ressentais la nécessité de me repositionner par rapport aux conflits de mes
clients, par rapport à mes propres conflits. Ça me prenait une façon de
travailler qui soit plus en harmonie avec mon cheminement personnel. J'avais
besoin de changer d'air, de changer de clientèle, de changer de domaine et
surtout de changer de mode d'intervention. Il fallait que je sorte du monde
accusatoire du litige qui finit toujours par statuer qu'une personne a raison
et que l'autre a tort. »
Johnpeter Weldon renchérit en affirmant qu'il existe peu de métiers, en
excluant le sport professionnel, dans lesquels une personne doit constamment
faire face à l'éventualité de perdre ou de gagner. « La perspective de la
victoire ou de la défaite marque profondément la vie de l'avocat de litige.
Tout le monde aime gagner; personne ne veut perdre. Dans le domaine des sports,
on peut toujours se reprendre après une défaite, tant que la saison n'est
pas terminée. Mais dans le domaine judiciaire, une fois les appels épuisés, l'un
a gagné et l'autre a perdu, la saison est finie et la pilule pour le client
qui perd et pour son avocat peut être amère à avaler. »
Les bienfaits de la médiation
Las de devoir subir cette pression incessante, Johnpeter Weldon se tourne vers
une nouvelle approche du droit en devenant médiateur accrédité à la suite de
cours de formation qu'il suit à Montréal, Québec, Santa Fe et Washington.
La médiation, cette discipline relativement nouvelle dans laquelle l'avocat
devient médiateur et tente de venir en aide aux deux parties dans le but de
trouver un compromis et de régler le conflit, est vite apparue comme un choix
éclairé pour Johnpeter Weldon.
La médiation est un processus de prise de décision facilité par un tiers
impartial qui aide les parties à communiquer ensemble dans le but de trouver
des solutions qui respectent leurs intérêts mutuels. En 1993, lorsqu'il
commence à offrir les services de médiation familiale à sa clientèle
sherbrookoise, cette façon de régler les différends était peu connue de la
population. À cette époque, ils étaient peu nombreux à avoir acquis cette
formation spécialisée, mi-juridique, mi-psychologique, afin d'aider leurs
clients à voir plus clair dans leurs affaires et à prendre eux-mêmes les
décisions les concernant, et ce dans le respect de l'intérêt commun. «
Aujourd'hui, à peine sept ans plus tard, il est frappant de voir comment la
médiation est devenue une option de choix d'un nombre grandissant de
justiciables au Québec. Que ce soit dans les domaines familial, civil,
commercial, ou en relations du travail, un nouveau réflexe est en train de s'installer
: « Allons voir un médiateur. »
Même si la médiation tend à devenir de plus en plus populaire au Québec
auprès de gens qui vivent un conflit, elle en est encore à ses premiers
balbutiements. « Si l'on compare le système judiciaire québécois aux
systèmes canadien et américain, on tire de l'arrière en ce qui concerne le
développement des modes alternatifs de règlement comme la médiation. Mais
tout cela est en train de changer. À titre d'exemple, la Faculté de droit de
l'Université de Sherbrooke a été la première à offrir un Programme de
prévention et règlement de différends. Il s'agit d'un projet d'avant-garde
qui permet de se positionner dans la pratique du droit de demain. »
Ce programme constitue en quelque sorte un prolongement à la formation offerte
depuis deux ans par le Service de la formation permanente du Barreau du Québec.
Plusieurs avocats, notaires, psychologues, travailleurs sociaux et conseillers
en orientation s'inscrivent à ce séminaire dispensé dans quelques villes
québécoises. Pour former les médiateurs de demain, nul autre que Johnpeter
Weldon, ambassadeur convaincu et fort convaincant de la médiation, qui apporte
aux futurs praticiens une expérience fort concrète de ce métier qui le
passionne et le rend parfaitement serein.