200 minutes par jour

La télé ne fait pas l'unanimité, loin de là. Pour certains analystes, elle est carrément néfaste. Elle nuit au développement intellectuel et physiologique des enfants, elle favorise l'adoption de comportements violents, elle engourdit les sens des spectateurs, elle encourage la passivité et la paresse, etc. Certains vont même jusqu'à prétendre qu'elle émet des rayons pouvant causer le cancer! Pour d'autres observateurs, la télévision est un outil fantastique. Elle favorise la circulation de la culture et constitue une fenêtre sur le monde et un remarquable instrument d'apprentissage.

Que l'on fasse partie de l'un ou de l'autre de ces sous-groupes, une chose demeure difficilement contestable. La télévision fait partie intégrante de nos vies.

Dans son discours d'acceptation du doctorat d'honneur en lettres que l'Université lui a accordé en 1989, le regretté écrivain Guy Dufresne racontait cette anecdote pour illustrer jusqu'à quel point tout le monde écoutait la radio dans le Québec des années 1940 : "À 7 h, un soir de mai 1946, en descendant la rue King, je n'ai pas perdu un mot d'Un homme et son péché, une autre des belles histoires des pays d'en haut de Claude-Henri Grignon. Si j'étais tout de suite remonté, je n'aurais par perdu une syllabe de Métropole de Robert Choquette."

Depuis, la télévision a pris la place de la radio dans nos maisons. Au Québec, on évalue qu'un adulte passe une moyenne de 25 heures par semaine devant son téléviseur. Plus de 200 minutes de télé par jour! Ne serait-ce que pour cette raison, la télévision vaut la peine qu'on s'y attarde un peu, surtout si l'on sait que ce même Québécois moyen dispose d'à peine 40 heures par semaine à consacrer à ses loisirs. Il passe donc plus de la moitié de son temps de loisirs devant la télé. Après le sommeil et le travail, l'écoute de la télévision est notre principale activité.

Si Guy Dufresne avait reparcouru la même rue King en 1986, c'est sans doute un épisode de Passe-Partout auquel il aurait eu droit. Dix ans plus tard il y a fort à parier qu'il aurait pu suivre les péripéties des personnages de La petite vie. Auprès de publics différents et pour des raisons presque à l'opposé les unes des autres, ces deux émissions ont établi des records d'audience. Les épisodes les plus populaires de La petite vie ont rejoint près de 2 millions de téléspectatrices et téléspectateurs. Imaginez : plus de 40 p. 100 des adultes francophones du Québec se trouvaient, pendant la même demi-heure, assis devant leur téléviseur à regarder vivre Pôpa et Môman!