Roger Maltais

Un grand seigneur, ce monseigneur!

par Hubert Wallot

Homme religieux sans faire un étalage excessif de ses croyances, Mgr Maltais n'était pas de ces recteurs spectaculaires qui ont l'art éblouissant d'éclipser les étoiles de leur institution. Il n'était pas non plus un recteur gestionnaire à la tape dans le dos et à la vision purement budgétaire. Même si certains en ont contesté la valeur, Roger Maltais avait une vision de l'université, chose qui n'est plus la règle dans le milieu universitaire.

Tel que je l'ai connu - et il n'a sans doute pas changé - Roger Maltais était un homme d'humeur stable, affable tout en étant réservé, respectueux des autres, soucieux de travailler en équipe et sachant laisser les vice-recteurs, les doyens et les chercheurs partager la vedette avec lui. Plût au ciel que tous ses collaborateurs et toutes les vedettes de l'Université eussent de telles qualités humaines et n'aient pas abusé de sa bonne foi!

C'est donc par un travail d'équipe que son passage comme recteur aura été marquant pour l'Université de Sherbrooke. C'est aussi sous son mandat qu'on a pu, selon ses propres mots, <<faire la preuve que des relations d'adultes, même des relations d'affaires, peuvent fonctionner entre administrateurs et étudiants>> à travers la signature des contrats de SADA, compagnie étudiante qui, à l'époque, gérait la cafétéria, la salle à banquet, les distributrices et le casse croûte. (Voir Liaison, volume VII, no 26, p. 5). <<Mais, ajoutait-il , nous avons, chemin faisant, corroboré une vérité déjà bien connue, qu'il est particulièrement malaisé de faire des affaires entre parents, entre membres de la même famille. Mais c'est raison de plus de nous réjouir d'avoir tout de même réussi.>>

De fait, l'Université était à l'époque une grande famille et Mgr Maltais y était pour quelque chose. Le Conseil d'administration était un petit conseil parental. Les performances de l'époque de l'Université de Sherbrooke, qui émergeait alors en plusieurs disciplines, attestent d'une réussite certaine. Roger Maltais ne s'est pas attribué tout le mérite comme d'autres l'auraient fait. Quelques-uns voudront peut-être même enlever le mérite certain de celui qui n'a jamais joué ni la vedette ni l'effacement.

Pourtant, lui comme recteur et moi-même comme président de l'Association étudiante, nous avons bien des fois divergé d'opinion. La question du réengagement des professeurs laïcisés de la Faculté de théologie, alors que l'Université avait comme chancelier l'évêque du diocèse, nous a opposés. La question du statut confessionnel de l'Université, les faits et les enjeux du Département parallèle de service social, la question de la démocratie universitaire ont été des occasions de divergence. Les enjeux de la démission du doyen de génie, Pierre Deschesne, la question de la mission du Centre culturel compte tenu de son mode de financement, etc. ont toutes été des questions à propos desquelles nos opinions se sont opposées.

Mais en tenant compte de ce qui s'est passé dans d'autres institutions universitaires, je crois pouvoir dire qu'il a été le recteur qui a permis à son université de se développer à un rythme rapide et même dans des directions qu'il n'avait pas prévues.. Affirmer de telles choses constitue un compliment. Roger Maltais fut dans l'ensemble un recteur respectueux et respectable, sobre et efficace, qui collait à son époque et qui mérite tout notre respect. D'autres institutions universitaires n'ont pas eu cette chance!

Plusieurs seront étonnés du présent témoignage, y compris Mgr Maltais. Avec le recul et mon expérience comme membre du Conseil d'administration de l'Université de Sherbrooke de 1971 à 1973, du Conseil d'administration de l'Université du Québec à Chicoutimi de 1983 à 1986, et enfin de l'Assemblée des gouverneurs de l'Université du Québec de 1985 à 1989, la figure de Roger Maltais comme recteur a pris de plus en plus de relief.

Étudiant en médecine de 1968 à 1974, Hubert Wallot a été président de la Fédération des étudiants de l'Université de Sherbrooke en 1971 et en 1972. Il a d'ailleurs été le premier étudiant de médecine à présider l'association étudiante. Il est maintenant professeur à la Télé-Université. Hubert Wallot est aussi psychiatre au centre hospitalier Robert-Giffard et médecin-conseil en santé publique.