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Liaison, 22 mars 2007
Devenir
adulte, un voyage initiatique
Psychologue invitée : GINETTE CLOUTIER
À Pâques, l'an passé, ma nièce Cynthia me faisait part de ses
difficultés à entrer dans la vie adulte. Mon intérêt s'est immédiatement
mis en éveil. Dans le cadre de mon travail, ces inquiétudes, ce n'est pas
la première fois que je les entends. Qu'est-ce qui se passe dans la
société actuelle pour que tant de jeunes soient désemparés à l'idée
d'entrer dans la vie adulte?
Le voyage initiatique
Cynthia me disait que ce qui la rebute dans cette étape de vie, c'est
la monotonie, le sérieux et ces fichues responsabilités qu'il faut
assumer. Comment expliquer à une jeune de 20 ans que la vie adulte, c'est
merveilleux, douloureux, palpitant, parfois ennuyant, souvent
déstabilisant, et que ce voyage en vaut la peine? La période de transition
vers la vie adulte ne sert-elle pas à cela, remettre en question, essayer
de garder certains privilèges de l'enfance, tâtonner dans les
responsabilités? N'est-ce pas une période qui sert de tremplin à ce saut
périlleux vers la vie adulte? Période nécessaire de remise en question de
tout ce qui, on se l'imagine, était bon avant?
Comment outiller ces jeunes pour que la réception du saut soit faite en
bonne et due forme, pour que l'oisillon s'envole maladroitement, mais
qu'il s'envole tout de même et ne se laisse pas couler vers le bas?
Le rêve doit être à la mesure du rêveur
À trop leur présenter des quêtes inaccessibles, ne submerge-t-on pas
les jeunes d'exigences irréalisables par rapport à eux-mêmes et à la vie?
Cynthia me disait ne pas être capable de s'identifier aux adultes : les
baby-boomers n'ont pas ses valeurs et la génération
X, pas
question! Elle a l'impression d'avoir à se bâtir un modèle, et ce n'est
pas une mince affaire. Maintenant, c'est presque normal qu'un jeune rêve
de devenir astronaute, de gravir l'Himalaya, de sauver la planète.
Pourtant, seul un tout petit nombre de personnes a les qualités requises
et trouvera les conditions favorables pour réaliser de tels rêves. On
dirait parfois que les rêves sont trop grands pour les capacités réelles
de la personne.
Devenir adulte, c'est s'actualiser, c'est réaliser son potentiel, c'est
aller au bout de soi-même. C'est se mettre en marche pour accomplir ce qui
nous tient à coeur, à la mesure de nos capacités. Fonder une famille,
fréquenter un cercle d'amis, exceller dans un sport, relever de nouveaux
défis, rire, s'amuser, s'actualiser dans son travail, faire des choix de
vie selon ses valeurs, tout cela peut être très satisfaisant et donner
l'impression fort agréable de l'accomplissement.
Un adulte flirtant avec les valeurs de l'adolescence
J'ai interrogé un homme d'expérience, quelqu'un qui est rendu au sommet
de la montagne. Quelqu'un qui regarde «sagement» de là-haut comment il a
réussi à traverser le périple de la vie adulte et surtout la période
transitionnelle vers ce sommet. Lui aussi a trouvé difficile ce passage
vers la vie adulte. Il a composé avec cela en ne s'engageant pas tout de
suite, mais en allongeant de quelques années ses études universitaires
pour la période de maîtrise tout en étant chargé de cours (il faut bien
gagner sa vie!). C'est autour de 27 ans que le goût de la vie adulte s'est
imposé. Il commençait à trouver frustrant de ne pas avoir droit de parole
au travail, trouvait difficile le vide de sa vie amoureuse. La vie sans
engagements commençait à lui peser. Il s'est alors engagé dans un travail
régulier à l'université, et il a rencontré une compagne de vie stable. Les
deux premières années de travail ont été difficiles puisqu'il avait
l'impression d'entrer dans le moule, de se fondre dans la vie adulte. Il
avait l'impression de perdre cette liberté si chère à son cœur, son
identité même. Finalement, les bienfaits de l'âge adulte sont apparus, la
satisfaction de pouvoir exprimer son opinion, d'avoir un pouvoir
décisionnel au travail et dans la société. Dans sa vie privée, les
bienfaits d'un amour grandissant et constant l'ont conquis pour les
avantages de la vie adulte. Pour être heureux, il n'a quand même pas tout
abandonné ce qui l'animait, le faisait «vibrer» avant cette période. Il se
considère comme un adulte flirtant avec certaines valeurs de
l'adolescence, valeurs qu'il assume pleinement.
Garder la spontanéité de l'enfance
Cynthia aimerait tellement garder la spontanéité de l'enfance, celle
qui est possible quand on n'a pas à gérer notre vie, mais à la vivre. Elle
voudrait garder la confiance en la nature humaine et l'espoir en l'avenir
qu'elle avait quand elle était petite. C'est une bonne piste, Cynthia,
c'est ce qu'il a fait, lui, le «sage»!
En collaboration avec Le Service de psychologie et d'orientation.
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