Le défi de Nicolas Galanis
Améliorer l'efficacité énergétique dans l'industrie
MARTY MEUNIER
Afin de maintenir notre qualité de vie et notre compétitivité sur les
marchés internationaux, il faut diminuer la consommation d'énergie,
particulièrement dans le secteur industriel, qui génère le tiers des
émissions de gaz à effet de serre (GES) et utilise environ 40 % de la
consommation énergétique autant au Québec qu'au Canada. De façon plus
générale, au Canada, on consomme environ 1,7 fois plus d'énergie qu'en
France et qu'au Royaume-Uni pour le même PIB. Le professeur Nicolas Galanis,
du Département de génie mécanique, propose une approche nouvelle pour mieux
déployer la recherche, en vue d'améliorer le bilan énergétique du pays.
Une approche systémique
Le professeur Galanis constate que la recherche qui est menée
actuellement au pays touche généralement des applications ou des
technologies particulières, comme par exemple les bâtiments, la géothermie,
les piles à combustible ou les thermopompes. Il propose plutôt une approche
multi-énergie et systémique où plusieurs composantes seraient prises en
compte. «Malgré l'intérêt du public et des gouvernements, et en dépit des
statistiques peu enviables, il n'existe actuellement aucun groupe
universitaire de recherche et développement qui s'intéresse à l'ensemble des
problèmes scientifiques, techniques et environnementaux reliés à
l'utilisation efficace de l'énergie dans l'industrie, dit-il. Il faut
combler cette lacune en adoptant une approche systémique visant
prioritairement les applications industrielles impliquant l'énergie
thermique.»
Le professeur détient une feuille de route colossale et a publié
plusieurs articles sur ses recherches qu'il mène depuis une vingtaine
d'années. Son domaine d'expertise est la thermofluide – comprenant la
thermodynamique, la mécanique des fluides, le transfert de chaleur et de
masse – ainsi que des applications correspondantes dont la conversion
d'énergie, le chauffage et la climatisation, le stockage d'énergie et les
énergies renouvelables.
Améliorer l'efficacité énergétique
Si nos vieilles industries sont moins
compétitives que celles qui se retrouvent dans certains autres pays, c'est
que nous avons tardé à investir pour améliorer leur performance. Il n'est
pas trop tard pour colmater la brèche.
Le professeur Galanis aime faire une analogie entre ce qui se passe dans
nos arénas et dans le secteur agroalimentaire car dans les deux cas, on a
besoin de chauffer et de refroidir. Il explique que le système de
réfrigération de la glace et le système de chauffage ont été conçus
séparément. Leur couplage ferait en sorte que la chaleur produite par
l'appareil de réfrigération pourrait être utilisée pour chauffer l'aire où
les spectateurs s'agglutinent par l'installation de tuyaux qui
achemineraient le fluide caloporteur. Dans le domaine agroalimentaire, le
lait est chauffé pour être pasteurisé avant d'être réfrigéré. La chaleur
rejetée par le condenseur de l'appareil n'est pas recyclée. Si les deux
systèmes étaient couplés, cette énergie pourrait être déployée pour la
pasteurisation. Il ne fait pas l'ombre d'un doute que la réduction des coûts
associés à la consommation d'énergie serait bénéfique pour l'industrie.
Pour diminuer la consommation d'énergie industrielle, Nicolas Galanis a
donc développé un programme de recherche, de développement et de formation
de personnel articulé autour de trois thèmes. Le 1er volet concerne les
technologies de réfrigération avancée, car environ 10 % de la consommation
totale d'énergie au Canada sert à produire du froid, incluant la
climatisation. Le 2e thème touche à la récupération des rejets thermiques
industriels, car ceux-ci représentent environ deux tiers de la consommation
énergétique de toute l'industrie canadienne. Enfin, le 3e thème vise la
diminution de l'intensité énergétique industrielle par l'augmentation de
l'efficacité de procédés tels la distillation, la cuisson et la production
électrolytique d'aluminium.
Transmettre les connaissances
En plus de toutes ses activités de recherche, Nicolas Galanis forme
actuellement du personnel hautement qualifié en efficacité énergétique.
Soucieux de transmettre ses connaissances et son expérience, notamment par
l'entremise de codirections de maîtrise ou de doctorat, il assure le
coaching d'un professeur recrue au Département de génie mécanique, Martin
Désilets. Ce spécialiste en modélisation mathématique de cuve d'électrolyse
a travaillé pendant huit ans pour Alcan, au Centre de recherche et de
développement d'Arvida, afin de développer des équipements plus performants
de transformation de l'alumine en aluminium. Dans l'industrie chimique,
l'électrolyse permet d'utiliser l'électricité pour extraire certains métaux
contenus dans leurs minerais respectifs.
Des outils pour l'industrie
Les professeurs Désilets et Galanis sont unanimes pour affirmer qu'ils
désirent offrir à l'industrie des outils pour réduire leur consommation
d'énergie. Si les industriels bénéficiaient de ressources techniques et
d'une expertise adéquate pour un meilleur contrôle de leurs procédés,
l'effet levier ne tarderait pas à se faire sentir sur la réduction des GES
et sur la qualité de notre environnement. «Si la capitale de l'Islande,
Reykjavik, est chauffée par des sources géothermiques, nous sommes en mesure
d'en faire tout autant en utilisant des rejets thermiques», affirme Nicolas
Galanis. Parions que ces deux chercheurs ne chômeront pas dans les années à
venir si la pression sociale ne s'estompe pas et si le Canada prend les
bouchées doubles pour optimiser l'utilisation de l'énergie et ainsi dépasser
les objectifs de l'accord de Kyoto.
Nicolas Galanis cumule 34 années d'expérience en
enseignement et une vingtaine d'années à titre de
chercheur.
Photo : Roger Lafontaine
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