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Revenir de l'étranger
ALEXANDRE FALLON
Étudiant au baccalauréat en droit
Le 8 janvier, je retrouvais Sherbrooke après cinq mois à Aarhus au
Danemark. Drôle de sensation de revenir à la routine après l'aventure que
représente un échange à l'étranger! Très bizarre le fait d'avoir à nouveau
des responsabilités, des échéances plus strictes et de travailler! Difficile
de croire aussi que cette fin de semaine je n'irai pas faire un petit tour
en Norvège, en Suède ou en Allemagne! Bref, le retour à la vie étudiante
normale, ce n'est pas facile, surtout avec le décalage. Pourtant, je suis
bien content de revenir à la vie normale, car aussi stimulant et
enrichissant que puisse être un échange, c'est quand même une espèce de vide
où l'on n'a pas l'impression d'accomplir des choses utiles pour l'avenir de
notre carrière. Je sais que c'est tout à fait faux – l'université de la vie
est très formatrice – mais c'est quand même l'impression que j'ai en
regardant en arrière. Bref, être en échange, c'est tripant, mais il ne
faudrait pas que ça dure éternellement.
De retour au Québec, je passe mon
temps à comparer la vie d'ici avec la vie danoise. Certaines particularités
du Danemark me manquent énormément, d'autres font naître en moi une
certaine fierté de faire partie de la société québécoise. J'avais parlé dans
mon dernier article du
party à la
danoise et c'est un aspect de la vie dans ce pays qui m'a énormément séduit.
Or, debout derrière le bar du premier 4 à 7 de droit de la session à
Sherbrooke, la nostalgie du Danemark battait son plein. Quelques personnes
seulement étaient dans la salle et peu avaient un verre à la main. Après
deux heures, plus un chat. Tout un contraste avec les centaines de personnes
festoyant bruyamment au Friday bar de l'école de droit de l'Université
d'Aarhus.
Après la fête à Aarhus, un souvenir marquant a été la possibilité
d'effectuer plusieurs voyages. En cinq mois j'ai réussi à visiter 12 pays
comme en témoignent les photos qui accompagnent le texte. Ce qui me déçoit
avec mon retour au Canada, c'est de constater à quel point l'infrastructure
de transport est peu développée. L'essence coûte le double au Danemark, mais
il y a peu de raison de voyager en voiture, le réseau ferroviaire étant très
bien développé et très abordable. On peut voyager sur de longues distances
pour très peu grâce à la panoplie de compagnies aériennes à bas prix. Je
peine à comprendre le retard du Canada dans le développement d'un réseau de
trains pour passagers efficace. Je ne peux pas croire que ce n'est qu'une
question d'argent puisque même des pays peu fortunés de l'Union européenne,
comme la République tchèque, offrent des services de train à haute vitesse.
Qu'il n'existe même pas une telle ligne à grande vitesse entre Montréal et
Toronto est honteux quand on considère qu'en Allemagne certaines villes de
la taille de Sherbrooke sont reliées par des lignes haute vitesse. Bref je
suis bien triste de réaliser à nouveau que sans voiture au Canada, on ne va
pas loin!
Tout n'est pas nostalgie par contre.
En arrivant à l'aéroport Trudeau à Montréal, j'ai été fouillé aux douanes.
En temps normal, je serais bien irrité de présenter ma carte d'arrivée et de
me faire diriger vers les postes d'inspection. Cette fois par contre, j'en
étais très heureux. C'est qu'à peine quelques jours auparavant, je
traversais un contrôle douanier en rentrant au Danemark en provenance de la
Norvège. Les blonds aux yeux bleus comme moi passaient sans question alors
que tous les Asiatiques sur le bateau ont été retenus pour davantage de
questions. J'étais donc soulagé et très content de constater qu'à la
frontière canadienne un tel profilage racial n'est pas pratiqué. Il y avait
au poste de contrôle des gens de toutes origines, et j'ai vu en cela un réel
exemple du succès du multiculturalisme au Canada. Ce n'est pas parfait, mais
après avoir séjourné au Danemark, on se rend compte qu'on réussit beaucoup
mieux au Canada sur cet aspect.
Le Danemark n'est pas le seul à avoir des difficultés avec l'intégration
des minorités. La vaste majorité des pays européens que j'ai visités au
cours de mon échange ont le même probléme. Je suis très fier du fait qu'au
Canada, il n'existe pas de parti politique majeur qui soit ouvertement
hostile à l'immigration et qui en fasse un enjeu principal. Au Danemark, le
Dansk Folkeparti est un excellent exemple de ce type de parti et il détient
la seconde place au sein d'un parlement minoritaire. Son chef, Pia
Kjærsgaard, est d'ailleurs, selon une récente étude, la troisième personne
la plus influente au Danemark, derrière le premier ministre Anders Fogh
Rasmussen et son ministre des finances. Les Pays-Bas, pourtant parmi les
plus libéraux de la planète, ont aussi démontré dans leur histoire récente
que le multiculturalisme et l'intégration des minorités ne sont pas des
sujets très populaires. Rita Verdonk, ministre de l'Immigration pendant
plusieurs années, est un exemple frappant de la xénophobie de plusieurs
Européens. Tristement, elle a été nommée par un sondage comme la meilleure
politicienne de l'année en 2005. Que l'extrême droite puisse exercer autant
d'influence en s'opposant à l'immigration est une tendance extrêmement
inquiétante à mon avis, et je suis très soulagé de voir que ce n'est pas le
cas au Canada.
Bref, aucun pays n'est parfait, chacun ayant des attraits uniques ainsi
que des défauts qui défient la logique. La beauté de voyager dans ce monde,
c'est d'avoir la chance de découvrir ses différences et de voir comment ce
qui se fait ailleurs pourrait peut-être améliorer notre vie ici. J'espère
que vous aussi allez saisir l'extraordinaire occasion de séjourner à
l'étranger. Une immersion dans une autre culture vous en apprendra davantage
sur la vôtre d'une manière que l'université ne pourra jamais vous enseigner.
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