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Liaison, 23 novembre 2006
La conférence
Marie-Madeleine, des
sources anciennes au Da Vinci Code
Le professeur Rodolfo Felices rétablit les faits
Sandra Boissé
Marie-Madeleine était-elle vraiment l'épouse de Jésus? Ces
2000 dernières années ont-elles été une imposture?» Voilà deux questions
que Rodolfo Felices a soulevées en débutant sa conférence, jeudi dernier,
devant une quarantaine d'intéressés – du plus grand admirateur du
Da Vinci Code
au plus critique d'entre tous. Appuyant ses réponses avec de vieux
manuscrits et des évangiles totalement méconnus par le commun des mortels,
il a su donner une toute autre image à celle des théologiens : une image à
mi-chemin entre l'historien et l'archéologue.
Rodolfo Felices Luna est professeur
associé à la Faculté de théologie, d'éthique et de philosophie. Mieux
encore, il est spécialiste de la Bible! À 37 ans, il lit le grec et
connaît tous les évangiles. Même des évangiles dont nous n'avons jamais
entendu parler : celui de Philippe, de Thomas, et même de Marie. Ces
évangiles dits apocryphes n'ont pas été retenus pour la rédaction du
Nouveau Testament. Pourtant, ils nous en apprennent beaucoup, nous
permettent de teinter certains faits et de défaire des mythes, dont ceux
véhiculés dans le célèbre roman de Dan Brown,
Da Vinci Code.
Loin de s'insurger contre ce roman
(même qu'il l'a beaucoup aimé!), Rodolfo Felices cherche plutôt à
démontrer que les écrits anciens permettent réellement d'apporter des
nuances par rapport à l'histoire de Jésus. Il croit fermement que
plusieurs éléments ont été volontairement écartés des évangiles, écrits
pour la plupart par des hommes. Ceux-ci auraient tenté de diminuer
l'importance du rôle joué par les femmes, entre autres Marie-Madeleine.
Ces faits, avec le temps, avec le cinéma (comme
La dernière tentation du Christ
de Scorsese) ont été amplifiés, romancés, et servent une cause que le
conférencier considère comme totalement noble : celle de rétablir la place
des femmes dans l'histoire. Et c'est à partir d'ouvrages écrits à diverses
époques que le professeur a démontré la progression vers une plus grande
valorisation de la femme. Pour lui, le
Da Vinci Code est nul autre que le porte-étendard des femmes oubliées et opprimées au
cours de l'histoire, et c'est ainsi qu'il explique l'engouement pour le
roman.
Jeune père de famille, Rodolfo Felices est un homme de sa génération.
Il a d'abord fait des études littéraires, puis c'est un peu par hasard
qu'il s'est retrouvé dans un cours à option en théologie. Ce fut le coup
de foudre. Lui qui était alors très critique à l'égard de toutes ces idées
véhiculées par l'Église, il a vu dans ce cheminement d'études un moyen
d'interpréter lui-même les écrits, de faire sa propre idée. «J'ai fouillé
dans les vieux bouquins, dans les manuscrits les plus anciens, et j'y ai
tiré de nouvelles conclusions. C'est absolument passionnant!»
De 1997 à 2001 Rodolfo Felices a
été chargé de cours à la Faculté de théologie, d'éthique et de
philosophhie et il y est maintenant professeur associé. Son champ
d'expertise comprend les écrits du Nouveau Testament, particulièrement la
tradition johannique (Évangile, Épîtres et Apocalypse). Il s'intéresse à
la structure littéraire et aux stratégies narratives et rhétoriques des
récits bibliques.
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