Partir en échange, ne plus vouloir revenir!
ALEXANDRE FALLON
Étudiant au baccalauréat en droit
En février, c'était le moment de choisir une destination pour mon échange
à l'étranger. «Pourquoi diable le Danemark?» voilà certainement la question
la plus posée par les étudiants danois que j'ai rencontrés jusqu'à
maintenant. Nous sommes désormais en novembre, la première neige est déjà
tombée et je me surprends moi-même à me demander : «Mais pourquoi pas
Montpellier?» Mon séjour ici a par contre été des plus enrichissants.
Aujourd'hui, ce petit pays nordique sans prétention est devenu l'un des
endroits dans le monde que je préfère et où je n'hésiterais pas à
m'installer si jamais la possibilité se présentait. Laissez-moi vous
expliquer pourquoi.
Le système d'éducation danois
Le Danemark ne compte aucune ressource naturelle d'importance à part la
pêche et ce petit pays de cinq millions de personnes a vite compris qu'il
gagnerait sur la scène mondiale seulement si ses habitants usaient
d'ingéniosité. L'éducation est donc considérée ici comme une grande priorité
d'État. C'est ainsi que l'éducation postsecondaire au Danemark est non
seulement gratuite pour tous, mais chaque étudiant reçoit un salaire mensuel
de 4500 couronnes danoises (environ 900 $). Avec une telle accessibilité aux
études, le Danemark réussit à maintenir une main-d'œuvre des plus qualifiées
et des plus productives. Cette main-d'œuvre fait alors rouler une économie
qui affiche l'un des plus hauts produits intérieurs bruts par habitant dans
le monde.
Au Canada, le niveau de productivité de la main-d'œuvre est quasi
stagnant et pourtant nos universités augmentent les coûts reliés aux études.
N'avons-nous pas compris? Comment pouvons-nous concurrencer, dans un marché
mondial de biens et services spécialisés, un pays comme le Danemark dont la
population est tout simplement plus scolarisée que la nôtre?
Une vraie social-démocratie
Même avec un gouvernement conservateur qui a envoyé des troupes danoises
en Irak et qui est très proche des États-Unis, le Danemark maintient en
place un système social nettement plus solidaire que le système québécois.
Les soins de santé sont évidemment gratuits et les citoyens danois
bénéficient même d'une protection peu importe où ils se trouvent dans le
monde. Les garderies sont aussi gratuites et le succès de cette politique
est clairement visible dans les rues danoises où les poussettes sont
partout! Les étudiantes et étudiants et les personnes à faible revenu
bénéficient également de subventions pour le loyer.
Tout ceci est évidemment très dispendieux pour l'État et le taux
d'imposition danois est l'un des plus élevés au monde. Rares sont les
personnes qui versent moins de la moitié de leur salaire à l'État. Mais
contrairement au Canada où il est sans cesse question de baisses de taxes et
d'impôts, le sujet n'est pas présent dans les débats politiques danois. Le
Danois moyen avec qui on discute dans un bar va expliquer qu'il paye un
énorme compte de taxe. Par contre, il voit ceci comme une contribution au
succès de sa collectivité, ce qui lui sera bénéfique également. Le niveau de
solidarité ici est surprenant et franchement rafraîchissant.
La solidarité n'est pas non plus un mode de vie imposé par le
gouvernement, elle se manifeste dans plusieurs aspects privés de la vie ici.
En faisant le tour du pays, de nombreuses fois j'ai croisé un kiosque
vendant diverses choses sans vendeur avec seulement une petite caisse pour
payer les achats. Sans blague! Et je suis convaincu que le vol doit être un
évènement aussi inhabituel qu'incompréhensible pour le vendeur.
Autre exemple, il existe à Aarhus une maison des étudiants avec un bar
qui opère grâce à une bonne centaine de bénévoles. Des bénévoles organisent
un programme de concerts pour le bar et la vaste majorité des groupes qui y
jouent le font gratuitement, en échange d'un espace pour répéter et de
quelques bières. Les personnes derrière le bar sont également bénévoles.
Mikael, le coordonnateur, n'a jamais de difficulté à trouver des gens pour y
travailler, à un point tel qu'il n'est pas possible de faire plus de trois
quarts par mois. Ce système permet d'offrir aux membres des rabais qui font
de cet espace l'un des endroits les moins chers en ville et l'un des plus
sympathiques. Est-ce que la FEUS serait capable de faire quelque chose de
semblable à Sherbrooke?
Le party
à la danoise!
Parlant de bar… un dernier aspect qui fait du Danemark un pays où il fait
bon vivre, c'est l'esprit festif qui y règne. Il a beau pleuvoir et faire un
froid de canard, c'est certain que quelque part un excellent
party vient
de commencer, même si on est lundi! Dans les résidences universitaires (qui
n'ont rien à voir avec celles de Sherbrooke, je vous assure!), les fameux
tours de chambres semblent se produire chaque semaine quelque part. Le
principe est que tout le monde décore sa chambre avec un thème particulier
et offre aux personnes qui font partie du tour quelque chose à boire en
rapport avec le thème. Alors, le troupeau fait le tour de l'étage comme ça
et rapidement c'est le
party!
Il y a aussi les mardis soir à la maison des étudiants, où ce sont les
étudiants internationaux qui sont à l'honneur. Les mercredis, pourquoi pas
un buffet de curry et un
quiz au pub
anglais, nommé le Golden Lion tout comme à Lennoxville? Le jeudi, c'est le
thursday bar
où certains pubs vendent des pintes à moitié prix et c'est certain qu'il y a
un concert à la maison des étudiants. Le vendredi, c'est l'heure du 4 à 7 à
l'université, mais pas de 4 à 7! Au Danemark, la tradition étudiante va de
14 h à… la fin de semaine? Je ne sais pas, je suis toujours parti en voyage!
Pour ceux qui ont encore la
possibilité de le faire, partez en échange, il n'y a aucune bonne raison de
ne pas le faire. Vous allez peut-être même tomber amoureux d'un pays!
La rue Nyvahn à Copenhague
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Alexandre sur un traversier entre Aeroskobing
et Svendborg
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Dans la ville d'Aeroskobing
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