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Selon quatre chercheurs dont un biologiste de l'Université de Sherbrooke
L'économie et la politique l'emportent sur
la protection des espèces menacées au Canada
ROXANNE MERCIER
Des espèces menacées de poissons et d'animaux nordiques ne sont pas
protégées par la Loi sur les espèces en péril. Leur mise sous protection
par les autorités fédérales fait l'objet d'une obscure discrimination
sur des bases économiques et politiques. C'est le constat que dresse
Marco Festa-Bianchet, professeur au Département de biologie de
l'Université de Sherbrooke, dans un article écrit en collaboration avec
trois autres chercheurs canadiens et publié en avril dans la revue
internationale
Conservation Biology.
Le groupe de chercheurs a établi son analyse d'après les
recommandations du Comité sur la situation des espèces en péril au
Canada (COSEPAC), qui est chargé de dresser la liste des espèces
menacées au pays. Marco Festa-Bianchet et ses collègues constatent
qu'entre 2003 et 2006, le Canada a refusé de protéger sous la Loi sur
les espèces en péril certaines espèces que le COSEPAC considère comme à
risque d'extinction, particulièrement les poissons pêchés
commercialement et les mammifères nordiques. Pourtant, ces deux groupes
d'animaux ont un urgent besoin d'aide. Par exemple, la morue, qui a été
surexploitée au cours des dernières décennies, connaît un déclin de 97 %
depuis 1970, mais le gouvernement refuse toujours de l'ajouter à sa
liste. |
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La protection des ours blancs du Grand Nord est compliquée par des
conflits de juridiction entre différentes instances.
Photo : Pierre Labossièr |
En ce qui concerne la classification d'espèces nordiques comme l'Ours
blanc, le Béluga ou le Caribou de Peary, le gouvernement fédéral fait face à
un problème de juridiction. Les espèces situées au nord du 60e parallèle
sont sous la responsabilité des territoires, des conseils de gestion de la
faune et du gouvernement fédéral. Ces trois instances ne s'entendent tout
simplement pas sur la manière de fonctionner pour protéger les espèces en
voie de disparition.
Selon le professeur et membre du COSEPAC Marco Festa-Bianchet, les
raisons qui se cachent derrière ces exemples de discrimination sont de
nature économique et politique : «Le gouvernement pense d'abord au coût
engendré par la préservation d'une espèce et aux problèmes qu'il peut
rencontrer avec les gens qui sont touchés directement par l'enjeu. Les
décideurs oublient de voir les effets à long terme de leurs jugements sur la
biodiversité.»
L'acceptation ou le refus de protéger certaines espèces est un procédé à
deux étapes instauré en juin 2003 avec la Loi sur les espèces en péril.
D'abord, le COSEPAC, qui est un comité d'experts indépendants, recommande la
classification des espèces selon leur risque d'extinction : en voie de
disparition, menacées ou disparues du pays. Ensuite, le gouvernement prend
la décision d'accepter ou non l'entrée d'une nouvelle espèce sous la Loi.
«Le procédé en tant que tel n'est pas mauvais. Nous aimerions seulement
que le gouvernement évalue de façon objective l'ensemble des coûts reliés à
l'extinction d'une espèce en comparaison des coûts de rétablissement de
cette espèce. Nous croyons aussi que l'opinion de la population canadienne
doit être prise en compte puisque le grand public est de plus en plus
interpelé par les enjeux environnementaux», souligne le professeur
Festa-Bianchet.
L'article du groupe de chercheurs canadiens pourrait servir à améliorer
la Loi sur les espèces en péril puisque celle-ci fera l'objet d'un suivi
parlementaire en juin 2008. Les auteurs espèrent que leurs recommandations
seront entendues par le gouvernement et que des actions concrètes seront
prises pour mettre fin à la discrimination envers certaines espèces en voie
de disparition.
L'article en ligne
L'article source de ce texte, intitulé «Biases in Legal Listing under
Canadian Endangered Species Legislation», est disponible en ligne sur le
site de Conservation Biology :
www.blackwell-synergy.com/toc/cbi/0/0.
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