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Liaison, 6 juillet 2006
Toujours là et jamais las
JOSÉE BEAUDOIN
Avec toutes les distinctions que Jean Gabin Ntebutse a reçues depuis son
arrivée à Sherbrooke, en 2001, on le croirait habitué aux honneurs. Eh bien
non… À preuve, voici le courriel qu'il a fait parvenir au comité de
sélection lorsqu'il a appris que l'Université souhaitait saluer son
leadership : «Quelle surprise agréable ce matin! Je suis d'autant plus
touché que je ne me suis jamais imaginé que ce que j'ai fait depuis mon
arrivée valait vraiment un tel honneur.» Pour l'avoir rencontré, je peux
vous jurer qu'il était sincère en écrivant cela.
Acteur du changement
Originaire du Burundi, cet étudiant au doctorat à la Faculté d'éducation
explore la dynamique du changement chez les professeurs d'université dans un
contexte d'innovation. Et comment lui-même réagit-il au changement? «La vie
change tout le temps. L'important, c'est de sentir qu'on est acteur du
changement. Ainsi, on est moins déstabilisé.» Celui qui se décrit comme un
citoyen du monde semble effectivement difficile à ébranler parce que bien
ancré dans la réalité et ouvert à tout : mondialisation, éducation, culture,
phénomènes sociaux, etc. Toutes ses journées commencent avec la lecture des
journaux. Tous ses week-ends sont consacrés à sa famille. Lorsqu'il m'a dit
que ses enfants étaient âgés de 5 ans, 2 ans et 7 mois, j'ai jugé inutile de
lui demander s'il faisait du sport dans ses temps libres!
Donner l'heure juste
Cet acteur du changement est avant tout un grand instigateur. Il a mis
sur pied l'Association étudiante burundaise de l'Université de Sherbrooke
(AEBUS) afin d'accueillir ses pairs et de faciliter leur intégration à la
société québécoise, notamment par un système de parrainage. Au-delà des
grands «où, quand, comment», il y a toutes ces petites différences
culturelles à apprivoiser, dont la relativité de la ponctualité. «En
Afrique, on croit que le temps est élastique, alors qu'ici, en Occident, le
temps, c'est de l'argent!» dit-il en riant.
Aller à la rencontre de l'autre
Le dialogue entre les cultures est au cœur de son implication : «À
l'Université de Sherbrooke, il y a une cinquantaine de nationalités et, pour
moi, c'est une grande richesse.» En initiant le premier spectacle
multiculturel de la Fondation FORCE, en novembre dernier, Jean Gabin
Ntebutse a gagné son pari, celui de mettre la diversité culturelle au profit
de l'humanisme, c'est-à-dire des étudiantes et étudiants qui ont des
problèmes financiers. Au cours de cette soirée, des représentants de
16 nationalités y sont allés de numéros de chant, de danse, d'humour, de
théâtre et de conte. Fort de ce succès, l'étudiant travaille déjà à la
deuxième édition.
De surprise en surprise
S'impliquer socialement, ce n'est pas un don de soi pour Jean Gabin
Ntebutse. Ça va de soi, et toute la nuance est là. Sa feuille de route
justifie pleinement son tableau d'honneurs, mais il s'intéresse aux autres
de façon complètement désintéressée. Il était donc surpris lorsqu'on lui a
décerné le prix hommage du Défi étudiant 2006, un prix qui n'a été remis que
huit fois depuis la création du Défi en 1985. Il était surpris aussi
lorsqu'il a reçu une bourse d'implication du Regroupement des étudiantes et
étudiants de maîtrise, de diplôme et de doctorat. Même réaction lorsqu'on
l'a fait récipiendaire de la médaille du cinquantenaire en reconnaissance de
son engagement social et de l'excellence de ses résultats académiques à la
collation des grades d'octobre 2004. Et il n'est pas au bout de ses
surprises…
Comme il est toujours étonné de voir son implication récompensée,
l'Université n'a d'autre choix que de continuer à l'honorer. C'est ce
qu'elle fera d'ailleurs en lui remettant le prestigieux prix Émissaire lors
du Gala du rayonnement qui se tiendra en novembre. On l'aura à l'usure.
Stop!
Notre entrevue était terminée et ma voiture bien embrayée lorsque j'ai vu
Jean Gabin Ntebutse courir dans ma direction en faisant des grands signes.
Il tenait à tout prix à me spécifier qu'il était aussi assistant de
recherche au Centre d'études et de recherche en enseignement supérieur (CERES).
Je me suis dit enfin, il s'enorgueillit un peu! Eh bien non… Il voulait
donner un coup de chapeau à son directeur qui fait un excellent boulot.
Humilité quand tu nous tiens…
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