Mieux évaluer la douleur à l'urgence
Gabrielle Granger
Lors de votre prochaine visite à l'urgence du CHUS, il y a fort à parier
que l'infirmière ou l'infirmier qui évaluera la gravité de votre cas vous
demande de mesurer votre douleur grâce à une échelle visuelle. En effet, au
CHUS, l'évaluation de la douleur des patients sera mesurée avec encore plus
de précision grâce aux recherches de terrain de Patricia Bourgault,
professeure à l'École des sciences infirmières, et Maryse Grégoire,
infirmière et conseillère clinicienne pour le regroupement médecine générale
et urgence. Celles-ci mènent depuis novembre un projet qui vise à
perfectionner l'évaluation de la douleur et à former les infirmières et
infirmiers du centre de triage du CHUS dans le but d'améliorer la qualité et
la sécurité des soins. D'ailleurs, pour les épauler, le fonds
Brigitte-Perreault vient de leur accorder une subvention de 10 000 $ pour la
poursuite de leur recherche.
Évaluation d'une douleur propre à chacun
Comme la douleur constitue la raison de 70 % des gens à se présenter à
l'urgence et qu'elle n'est pas ressentie de la même intensité d'une personne
à l'autre, son évaluation relève donc d'une grande importance. Ainsi, pour
déterminer plus précisément le niveau de douleur ressentie par les patients,
les infirmières et infirmiers peuvent se servir d'une échelle visuelle. Dans
le domaine hospitalier, ces échelles pour évaluer la douleur existent depuis
longtemps, mais chacune d'entre elles présentent des systèmes de gradation
différents. Même au CHUS, chacun des intervenants utilisaient des échelles
différentes selon leur formation ou leurs habitudes.
Ainsi, pour que les cotes d'évaluation de la douleur réfèrent à des
valeurs concrètes pour tous, Maryse Grégoire et Patricia Bourgault ont
proposé une échelle unique, gradée de zéro à dix, qui sera utilisée par tous
les infirmiers et infirmières du CHUS. «À l'aide de l'échelle, on demande au
patient où se situe sa douleur : zéro étant une absence de douleur et dix,
la pire douleur que le patient puisse imaginer, explique Maryse Grégoire.
Cette donnée nous donne donc une valeur de référence sur la douleur du
patient et un indicateur pour le coter selon l'urgence de son cas.»
L'échelle prend la forme d'une petite fiche cartonnée illustrant une
gradation de couleur. Facile à utiliser, cet outil peut être employé auprès
de la grande majorité des patients : «Même un enfant de cinq ans est capable
d'évaluer sa douleur avec l'échelle», précise Patricia Bourgault.
Les cotes dégagées après l'évaluation de la douleur ne sont pas utilisées
que pour le triage à l'urgence. Les infirmières et infirmiers inscrivent au
dossier du patient la cote de la douleur pour que les membres du personnel
hospitalier, à l'extérieur de l'urgence, soient au courant du degré de
douleur du patient et prodiguent les soins appropriés.
Formation de 125 infirmières et infirmiers
En plus d'offrir un nouvel outil d'évaluation aux infirmières et
infirmiers de première ligne, Patricia Bourgault et Maryse Grégoire
préparent une formation qu'elles offriront au mois de septembre à l'Hôtel-Dieu
et à l'Hôpital Fleurimont. «Nous offrirons une formation de deux heures à
tous les infirmiers et infirmières de l'urgence, explique Maryse Grégoire.
Au total, c'est 125 personnes qui seront formées pour mieux évaluer la
douleur.» Ensuite, les deux responsables du projet procéderont à des
évaluations de la qualité et de l'impact de cette formation. Elles seront
faites après trois, six et douze mois, et chaque fois près de 1000 dossiers
seront examinés.
Maryse Grégoire et Patricia Bourgault profiteront aussi de cette
formation pour sensibiliser les infirmières et infirmiers à la douleur
chronique. Comme la douleur chronique est plus méconnue et que souvent
aucune lésion n'est visible, il peut être plus difficile d'en évaluer la
gravité. L'échelle d'évaluation de la douleur sera donc un outil très utile
pour les interventions auprès des personnes souffrant de douleurs
chroniques. «La personne aux prises avec une douleur chronique, par exemple
un mal de dos qui dure depuis deux ans, a autant le droit au soulagement de
sa douleur que la personne qui souffre d'une douleur aiguë, comme une jambe
cassée», conclut Patricia Bourgault.
Le fonds Brigitte-Perreault
Premier projet subventionné par le fonds Brigitte-Perreault, la recherche
de terrain menée par les deux infirmières colle bien à la mission de cette
fondation. «Comme la fondation a été créée par des médecins et qu'ils
choisissent de subventionner comme première recherche un projet
d'infirmières, on le reçoit comme une marque de reconnaissance et de
confiance, explique Maryse Grégoire.» Enfin, Patricia Bourgault confie que
le projet aura probablement une suite l'an prochain. Il serait toutefois axé
sur le soulagement efficace de la douleur des patients.
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