Liaison, 6 juillet 2006
La médiation dans les organisations :
savoir utiliser son plein potentiel
STÉPHANIE RAYMOND
Depuis le resserrement de la Loi sur les normes du travail en
matière de harcèlement psychologique en juin 2004, les entreprises ont
dû adopter des politiques afin de gérer le harcèlement psychologique et un
certain nombre de ces politiques intègrent des processus de médiation.
Pourtant, la médiation organisationnelle semble être encore mal connue et
mal appliquée bien souvent. C'est ce dont a traité le colloque La
médiation organisationnelle, enjeux de la pratique, organisé le 9 juin
au Campus de Longueuil par la Faculté de droit et quelques partenaires.
Le colloque a été dirigé par Louise Lalonde, professeure en droit et
spécialiste de la prévention et du règlement des différends, en
partenariat avec la revue Prévention et règlement des différends de
l'UdeS, l'Association des diplômées et diplômés des programmes de PRD et
la Chambre des notaires du Québec.
«Ou l'on offre des processus de médiation et on s'en sert à leur plein
potentiel, et dans ce cas on peut régler la source du problème sans devoir
recourir au système judiciaire; ou l'on se contente d'utiliser les normes
juridiques déjà existantes, et dans ce cas la justice fait déjà ce
travail», explique Louise Lalonde. En effet, l'adoption de politiques par
les entreprises privées et publiques semble reposer sur des considérations
légales seulement, et les processus d'enquête s'apparentent souvent à une
procédure judiciaire traditionnelle.
Dans sa recherche intitulée La médiation organisationnelle, une
intervention spécifique aux organisations, Louise Lalonde souhaite
décrire cette spécificité de la médiation organisationnelle et évaluer,
par une analyse comparative aux autres types de pratiques de médiation
(commerciale, civile et familiale), les conditions d'efficacité de la
médiation comme nouveau mode de gestion des conflits dans les
organisations.
La médiation a le potentiel de régler le conflit au-delà du litige
qu'appréhende le droit, et cette actualisation de son potentiel nécessite
l'adaptation des processus et des pratiques à la réalité
organisationnelle. En effet, une médiation organisationnelle efficace
devrait notamment tenir compte d'une pluralité de normes et non seulement
des normes juridiques (normes administratives, culturelles, techniques,
scientifiques, morales, etc.) et intégrer l'organisation dans son
processus. Il semble que trop souvent la médiation soit utilisée comme un
processus préjudiciaire et ne devienne alors qu'une étape vers la «judiciarisation»
des litiges.
Pourtant, les recherches de Louise Lalonde ont révélé que plus de 50 %
des employeurs passent par le processus judiciaire. En effet, 44,4 %
d'entre eux mènent une enquête à l'interne pour ensuite faire faire une
enquête juridique officielle. Un autre 11,2 % applique les processus de
médiation seulement après une enquête juridique, ce qui l'exonère de la
responsabilité de régler le conflit à la base. L'autre 44,4 % restant est
plus conscient des pouvoirs de la médiation organisationnelle et
l'applique en tout temps pour s'attaquer à la source du problème.
Cette pratique de la médiation organisationnelle mérite d'être d'abord
nommée afin que puissent être développés des processus qui permettent de
véritablement la rendre efficace pour les personnes et les organisations.
La solution passera sans doute par une meilleure formation des médiateurs
appelés à intervenir dans les milieux organisationnels et par une
meilleure connaissance du potentiel de la médiation par les organisations.
Le rapport final des recherches de Louise Lalonde sur la médiation
organisationnelle sera publié en août 2007.
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