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Liaison, 9 février 2006
Critique invité : JEAN-FRANÇOIS DORÉ
Technicien de laboratoire
Karkwa, Les
tremblements s'immobilisent
Ayant fondé leur groupe en 1998, les membres de Karkwa ont dû
attendre jusqu'en 2001, alors finalistes des Francouvertes, pour connaître
un succès relativement important. Le premier essai, Le pensionnat des
établis, qui valse du jazz au punk, a atteint la tête de plusieurs
palmarès universitaires en plus d'obtenir d'excellentes critiques.
Pour Les tremblements s'immobilisent, le second CD, le quintette
a résolument pris une tangente rock planant avec des atmosphères rappelant
à l'évidence Radiohead ou encore Les Chiens, dans leurs pièces les plus
feutrées. L'ambiance y est définitivement urbaine, comme en témoigne le
son saturé des guitares électriques, en alternance avec le piano ou même
des cordes.
Avec une coréalisation particulièrement bien réussie de Pierre Girard (Mara
Tremblay, Fred Fortin, Les Colocs), l'album peut paraître austère ou même
cacophonique à la première écoute, attribuable sans doute à la présence de
sons à contre-courant de la mélodie. Subséquemment, on se rend compte que
ce n'est pas étranger à l'originalité de l'œuvre. Un petit bémol
cependant, la musique est mise en évidence à tel point que les paroles –
quoique engagées – ressemblent davantage à un ramassis de mots, plutôt
sombres d'ailleurs. Pour en rajouter, certaines pièces sont plus parlées à
la manière rap que chantées, ce qui, personnellement, n'est pas pour me
séduire. On constatera la présence d'invités tel que Olivier Langevin,
jouant du lap steel sur une des trames, et Brigitte Fontaine, qui
prête sa voix sur Red Light.
Somme toute, c'est un album très homogène; si vous aimez les extraits,
vous serez enchantés de son entièreté. Site Web :
www.karkwa.com
Mauvais
Sort, Koru
Le quintette de musique traditionnelle nous présente ici son 3e album,
mélangeant aisément les pièces anciennes et originales. Bien sûr, on
retrouve des signes distinctifs de la musique du terroir comme la
mandoline, le violon et les harmonies vocales, mais également de la
batterie, de la guitare et de la basse électriques, instruments
anachroniques au point d'en faire un pastiche musical.
Se situant entre La Volée de Castors et Mes Aïeux, le groupe a
lourdement altéré le côté folklorique des premiers, mais sans avoir
l'originalité des seconds. Si le morceau Le pont du diable contient
un extrait bien choisi du Prisonnier de Londres, le groupe livre
une décevante version trop électrique – à la limite funk – de la
Ziguezon popularisé par La Bottine souriante. Les instruments modernes
(clavier Rhodes, guitare électrique, batterie…) viennent contrecarrer la
chaleur des instruments traditionnels. Point positif, le choix des pièces
populaires est intéressant et permet de mettre à jour certaines histoires
d'antan (Je n'ai pas de barbe, La brune de Paris…)
Malgré une voix bien posée du chanteur Nicolas Geoffroy et les quelque
300 spectacles que le groupe a cumulés en carrière, ça ne lève pas.
Probablement meilleur en spectacle plein air en se dégourdissant les
jambes. Désolant. Site Web :
www.mauvaissort.com
Pink
Martini, Sympathique
Il se cache sous cette couverture trompeuse – il ne s'agit pas de
chansons françaises pour jeunes en patins à roulettes – un pot-pourri de
rythmes cubains des années 30, de classiques de musique de chambre ou de
trames sonores de films noirs! Originaire de Portland, aux États-Unis,
l'orchestre est formé en 1994 de diplômés de Harvard autour du pianiste
classique Thomas M. Lauderdale. Le groupe, maintenant constitué de 14
personnes, trimbale bongos, violoncelles et trompettes de la France à
Taïwan, de la Suisse à la Turquie, en passant par le Portugal et le Liban.
L'exotisme se reflète dans son répertoire de chansons de langues
différentes, allant de l'anglais à l'espagnol, au français, au grec et
même au japonais!
Maintenant rendu à un second album, Hang on Little Tomato, le
groupe ressort son premier disque Sympathique, paru à l'origine
en 1997 sous sa propre étiquette et vendu à plus de 650 000 exemplaires à
travers le monde. Il en résulte un disque mature, très inspiré et
séduisant. Les sonorités de mambo et de cha-cha-cha rappelant la chaleur
des longues soirées d'été à boire entre amis, on pourrait facilement se
croire dans le Sud à prendre un p'tit Martini… Alors que pour la pièce
titre, on s'inspire librement d'un poème de Guillaume Apollinaire, le
morceau La Soledad prend racine dans une composition de Chopin. Les
plus curieux auront même le loisir d'avoir la traduction anglaise de leurs
propos.
Quelque 48 minutes de dépaysement et on en demande encore! Site Web :
www.pinkmartini.com
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