Forum universitaire 2005
Un succès sans précédent
Etienne Samson
Quelque 450 personnes ont assisté le 9 novembre au 5e Forum
universitaire, dont le thème était La place du privé à l'Université.
L'événement s'est avéré un immense succès, tant par la qualité des
panélistes que des interventions du public. Pour l'occasion, le niveau
balcon du foyer Mont-Bellevue du Centre culturel était rempli à pleine
capacité, si bien qu'on retransmettait le Forum au niveau parterre, en plus
de le faire au Campus de Longueuil.
C'est le président du comité organisateur et doyen de la Faculté de
droit, Daniel Proulx, qui a ouvert l'événement, lequel était divisé en deux
portions, réunissant chacune quatre panélistes choisis parmi les membres de
la communauté universitaire. Chaque portion était suivie d'une période de
questions. Toute cette mécanique a été menée de main de maître par
l'animateur du Forum, le journaliste Marc Laurendeau, qui a dû plus souvent
qu'autrement freiner l'enthousiasme des nombreux participants, très enclins
à réagir aux propos des panélistes.
Mission et recherche
Les questions de la première portion du Forum portaient sur la mission
fondamentale de l'Université (enseignement et recherche). L'équipe formée de
Pierre Hébert, professeur au Département des lettres et communications, et
Armande St-Jean, directrice du Département, a confronté ses opinions à celle
constituée de Roger Noël, doyen de la Faculté d'administration, et de Gérard
Lachiver, doyen de la Faculté de génie.
La question fondamentale était de déterminer s'il faut se méfier du
financement du secteur privé, qui pourrait éventuellement contraindre
l'Université dans son autonomie au plan de la recherche.
À ce sujet, Pierre Hébert a proposé l'adoption d'une charte de la liberté
et de l'autonomie universitaire, pour établir les conditions des
partenariats entre le secteur privé et les universités, et à plus grande
échelle, l'instauration d'une commission nationale des universités, laquelle
serait permanente, publique, multipartite et chargée de conseiller le
gouvernement dans ces questions.
Par ailleurs, les parties se sont entendues sur le fait que le
financement du secteur public est nettement insuffisant et qu'on assiste à
un retrait progressif de l'État dans ce domaine.
Le débat a entre autres été marqué par une métaphore d'Armande St-Jean,
pour qui la Faculté des lettres et sciences humaines évolue malheureusement
du «côté obscur de l'Université». Elle faisait ainsi référence au «manque
d'intérêt général» des entreprises et des organismes subventionnaires envers
sa faculté : «Notre faculté ne figure pas dans le portrait qu'on donne de la
recherche, a-t-elle lancé. On ne parle jamais d'histoire, de linguistique,
de littérature et de communication parce ce n'est pas payant.»
Elle a ajouté que plusieurs projets de recherche sont mis de côté par
manque de financement. Selon elle, on ne les finance pas parce qu'ils ne
relèvent pas de l'innovation. Roger Noël a quant à lui souligné le fait que
la recherche à la Faculté d'administration est très mal financée par le
secteur public, si bien que les professeurs doivent se «creuser les méninges
pour développer des solutions et devenir plus attractifs» pour dénicher du
financement.
Gestion et financement
La deuxième partie du Forum a réuni les panélistes Julie Dionne,
doctorante en mathématiques impliquée dans divers organismes, notamment pour
la défense de la propriété intellectuelle des étudiants; Marc Dumas, doyen
de la Faculté de théologie, d'éthique et de philosophie; Réjean Hébert,
doyen de la Faculté de médecine et des sciences de la santé; ainsi que
Gérard Laganière, vice-président du groupe S.M. International, partenaire de
trois chaires de recherche industrielle et lauréat du Prix d'excellence du
ministère des Affaires municipales.
On s'est demandé d'entrée de jeu si l'Université gagnerait à adopter le
modèle de gestion du secteur privé. Les panélistes ont admis que
l'Université pourrait emprunter au privé certains éléments de sa gestion lui
permettant d'atteindre ses objectifs, comme des indicateurs de performance
du niveau de qualité.
Au niveau du financement, Réjean Hébert a vivement accusé le secteur
privé de «détourner des cerveaux» en ne payant pas pour les frais indirects
de la recherche. Gérard Laganière a aussi insisté sur le fait que
l'Université doit facturer les honoraires que valent ses services.
En somme, les panélistes ont suggéré de valoriser le financement adéquat
des coûts directs (cerveaux et équipements) et indirects (instances
administratives) des universités, tout en effectuant un lobbying intense
auprès des gouvernements pour que le financement de l'État cesse de
s'amoindrir.
Durant la période de questions, une intervenante du campus de Longueuil a
évoqué qu'il est peut-être normal que les domaines de la médecine, du génie
et des sciences dures reçoivent une plus grande part de financement puisque
les équipements nécessaires à la recherche dans ces secteurs sont beaucoup
plus coûteux qu'en sciences humaines.
Conclusion du recteur et suites
En conclusion au Forum, le recteur Bruno-Marie Béchard s'est tout d'abord
dit très fier de la participation générale. Il a rendu le crédit au comité
organisateur ainsi qu'aux unités qui ont pris part à la préparation du
Forum. Il a souligné la force de la communauté qui forme l'Université,
capable de prendre part à un grand débat d'idées dans le respect, avec
enthousiasme, et de façon constructive.
Enfin, conscient que l'Université doit trouver un équilibre entre son
autonomie et son besoin de financement, il a lancé : «Je pense que
l'Université de Sherbrooke est fière, entrepreneuriale, humaniste et libre.
Il nous reste, à chacun d'entre nous, d'avoir l'audace et le leadership de
relever ce grand et beau défi d'équilibre qui se pose à nous, au bénéfice
des étudiantes et étudiants, au bénéfice de la société que nous avons la
responsabilité d'orienter.»
Du côté du comité organisateur, l'heure est au bilan. Une première
rencontre est déjà prévue avec les «agents de liaison» en poste dans les
facultés et les services afin de décider des suites à lui donner. Le sujet
étant loin d'être épuisé, il se pourrait en effet que le Forum 2005 se
poursuivre dans les mois qui viennent sous une autre forme.
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