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Liaison, 27 octobre 2005
Découvertes disques
Critique invité : PHILIP RODRIGUE
Étudiant à la maîtrise en littérature
Philibert
Bélanger, Morceaux et petites pièces
Le Sherbrookois Philibert Bélanger, que nous connaissions déjà comme
guitariste accompagnateur de Vincent Vallières, lançait récemment un
premier album solo intitulé Morceaux et petites pièces.
Enregistrées dans un studio maison, ces «petites pièces» aux mélodies
accrocheuses et aux arrangements riches charment dès la première écoute.
Optant pour une évidente sincérité qui colle bien à son univers musical
onirique, les textes de Philibert sont poétiques sans être hermétiques et
recèlent par moment des petites trouvailles, comme sur la magnifique «La
pluie» ou la touchante «Alice». Très audacieuse pour un disque fait seul
dans son appartement, la réalisation laisse les instruments prendre
beaucoup de place, ce qui donne à Morceaux et petites pièces une
profondeur que n'ont pas beaucoup d'albums pop. En ouverture, la pièce
«Les jours sont à nous» donne le ton avec son rythme rock bien appuyé par
la section rythmique (basse et batterie) et ses moments plus éthérés où le
talent de guitariste de Philibert Bélanger est mis en évidence. Alternant
entre balade folk et morceaux plus rock, les dix chansons qui composent
l'album sont étonnamment matures et achevées pour un jeune artiste qui
n'en est qu'à son premier album.
Avantageusement comparable au travail du regretté Elliott Smith, de U2
(par moment on croirait entendre la guitare de The Edge) ou encore de
Monsieur Mono, les chansons de Morceaux et petites pièces sont
simples sans être simplistes, accrocheuses sans être pour autant faciles.
Blackalicious,
The Craft
Cinquième chapitre dans l'œuvre qu'érige lentement les Blackalicious,
The Craft porte bien son nom : c'est un véritable travail d'orfèvre
par deux des membres les plus créatifs de la scène hip hop états-unienne.
Composé du producteur Chief Xcel (Xavier Mosley) et du M.C. Gift of Gab (Timothy
Parker), Blackalicious redonne ses lettres de noblesse à un genre qui
s'est perdu depuis quelques années dans les méandres du succès. Avec eux,
le hip hop redevient un art, celui du «beat» et des mots. Et sur les deux
plans, le duo excelle. Dès l'ouverture, le mélange de funk, de soul
et d'échantillonnages porte le flot à la fois rapide et précis de Gift of
Gab. La liste des collaborateurs invités à participer à The Craft
est impressionnante : les trop peu connus Lateef The Truth Speaker
et Lyric Born ainsi que la légende du funk George Clinton prêtent leur
talent au duo de la côte Ouest.
À des kilomètres de l'attitude «gangster» des Eminem, Nelly et autres
50 Cents, Blackalicious prône l'élévation par la connaissance et
l'harmonie sur des rythmes qui n'ont pas besoin d'être lourds pour être
groovy. The Craft ne plaira pas à tous, mais si vous êtes à la
recherche d'une musique innovatrice, mature et intelligente, que vous
soyez ou non amateur de hip hop, vous vous devez de jeter une oreille à
l'art poétique de Blackalicious.
John
Vanderslice, Pixel Revolt
Véritable enfant prodige de la scène indie rock, John Vanderslice est
aussi génial d'un côté de la console d'enregistrement que de l'autre. Avec
son cinquième album, Pixel Revolt, il nous présente à la fois ses
compositions les plus achevées et la réalisation la plus solide de sa
carrière. Difficilement classable en termes de style, disons seulement
qu'il est, à sa manière et toute proportion gardée, de la trempe de Dylan
ou de Bowie. Vanderslice nous raconte de petites histoires qui en
apparence n'ont pas de liens entre elles. Pourtant, qu'il soit question
d'un amant nostalgique («Dear Sarah Shu») ou d'un journaliste dans les
bras d'une prostituée afghane («Trance Manual»), presque toutes les pièces
illustrent un désir de fuir vers un sanctuaire. Et que dire de la
magnifique balade au piano «Farewell Transmission», qui débute ainsi : «Hold
on / your dad didn't know the age of the sun / but now we know the hour it
was born / how does that help us now?» Musicalement, la chanson dicte ici
l'arrangement. Certaines pièces plus intimistes et personnelles sont
réduites à un seul instrument d'accompagnement (guitare ou piano) alors
que d'autres s'envolent, portées par divers claviers, un violoncelle et
des éléments de musique électronique.
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