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Liaison, 27 octobre 2005
France Jutras, chercheuse en éducation
Former les enseignants qui participent au développement de
la personne comme être social
L'enseignement est au centre de la vie universitaire de France Jutras.
Chercheuse à la Faculté d'éducation, elle consacre une grande partie de ses
recherches à diverses problématiques entourant l'enseignement. Depuis 2004,
elle est également responsable du diplôme de troisième cycle de pédagogie de
l'enseignement supérieur. Puis, comme professeure, elle accorde une grande
importance aux étudiantes et étudiants, les encourageant à poursuivre des
études de haut niveau.
La philosophie de l'éducation
France Jutras est arrivée à l'Université de Sherbrooke en 1990, comme
chargée de cours. Auparavant, elle avait fait un baccalauréat en
enseignement des langues et une maîtrise en philosophie de l'éducation à
l'Université du Québec à Trois-Rivières. Puis elle avait ensuite séjourné en
France pendant cinq ans pour y compléter un diplôme d'études approfondies
(DEA) et un doctorat à l'Université des sciences humaines de Strasbourg,
sous la direction d'un philosophe de l'éducation reconnu mondialement,
Olivier Reboul.
Au départ, la chercheuse a choisi de s'orienter en éducation, car elle
souhaitait enseigner et voyager. Au cours de ses études, elle remarque
cependant qu'elle aime particulièrement participer à la formation des
enseignants. Elle estime que les enseignants sont des personnes très
importantes dans la société puisqu'ils participent au développement social
des citoyens, jeunes et moins jeunes. En ce sens, l'université lui apparaît
un milieu de travail qui peut certainement avoir une influence sur les
pratiques professionnelles.
En 1993, l'Université accorde à France Jutras un poste de professeure
dans son domaine, soit en fondements de l'éducation, lequel englobe la
philosophie et la sociologie de l'éducation de même que l'histoire de
l'éducation.
Le défi de l'éducation à la citoyenneté
France Jutras est actuellement responsable d'un projet sur l'éducation à
la citoyenneté subventionné par le Conseil de recherches en sciences
humaines. Ce projet regroupe des collègues chercheurs du Centre
interuniversitaire de recherche en éthique appliquée, le CIRÉA, Marie-Paule
Desaulniers de l'UQTR, André Duhamel, André Lacroix, Alain Létourneau et
Georges A. Legault, tous de l'Université de Sherbrooke, ainsi qu'un
spécialiste de l'éducation à la citoyenneté, Luc Guay, professeur au
Département de pédagogie.
Leurs travaux sont en lien avec la réforme de l'éducation implantée au
secondaire depuis septembre 2005, qui appelle de nombreuses transformations
des pratiques enseignantes. Parmi les changements mis de l'avant, des
programmes d'histoire, maintenant nommés «histoire et éducation à la
citoyenneté», sont désormais offerts aux cinq niveaux du secondaire.
L'augmentation substantielle du temps d'enseignement permet à cette
discipline de faire partie dorénavant des disciplines importantes au
secondaire, tout comme les mathématiques et les langues. Cependant, dans les
milieux scolaires, plusieurs enseignants ne considèrent pas qu'ils sont
suffisamment outillés pour affronter cette situation. Trois difficultés
majeures sont perçues : des lacunes sur les fondements théoriques, un manque
de matériel didactique et une connaissance insuffisante des stratégies
d'enseignement. C'est d'ailleurs le cas à peu près partout dans le monde.
L'équipe de France Jutras travaille donc de pair avec les enseignants
afin d'analyser leurs nouvelles responsabilités et les nouvelles pratiques
proposées. En fait, les chercheuses et chercheurs tentent d'établir comment
devenir de bons pédagogues d'histoire et d'éducation à la citoyenneté. En
même temps, ils veulent expliciter le savoir et les pratiques nécessaires au
développement professionnel des enseignants en ce sens.
«Nous souhaitons les aider à mieux comprendre leur rôle professionnel par
rapport au développement du citoyen et à mieux jouer ce rôle, souligne
France Jutras. Dans la réforme, la finalité du développement du citoyen est
clairement affirmée.»
Si ce premier volet du projet s'avère axé sur l'intervention, le deuxième
volet est plus conceptuel. Présentement, il y a de grands débats en
philosophie politique, en sciences politiques et en éducation sur la notion
de citoyenneté ainsi que sur les visées de l'éducation à la citoyenneté. Par
conséquent, en lien avec l'étude sur le terrain, soit en classe, les
chercheurs évalueront quels concepts exigent d'être clarifiés pour le
développement du corps de connaissances théoriques et pratiques.
L'innovation en enseignement et en recherche
Une part importante de la vie universitaire de France Jutras consiste à
occuper la responsabilité du diplôme de pédagogie de l'enseignement
supérieur offert au Département de pédagogie.
Le programme est destiné aux chargés de cours et aux professeurs qui
veulent faire une innovation pédagogique dans le cadre de leur pratique,
pour un cours, pour un certain nombre de crédits dans un programme, pour une
dimension particulière d'un programme ou pour un programme en entier. Ces
personnes, qui proviennent de plusieurs domaines universitaires ou
collégiaux, se servent du diplôme pour conceptualiser, mettre en œuvre et
évaluer les bases de leur innovation pédagogique. En d'autres mots, la
formation les aide à s'outiller et à évoluer dans leur enseignement pour le
bénéfice de l'apprentissage de leurs étudiantes et étudiants.
Le domaine de recherche en pédagogie universitaire et en enseignement
supérieur est assez nouveau en Amérique du Nord, et bien plus récent encore
en Europe. Comme l'Université de Sherbrooke valorise grandement les
programmes innovateurs, le Département de pédagogie s'y intéresse depuis
plus de 15 ans. Une collaboration avec l'Université de Liège s'intensifie
d'ailleurs sur ce plan actuellement.
En tant que responsable de ce programme d'études et puisqu'elle enseigne
principalement aux 2e et 3e cycles, France Jutras a
été amenée à s'interroger sur l'encadrement des études supérieures. «En
sciences humaines, l'apprentissage de haut niveau ne se fait pas en
laboratoire; les étudiantes et étudiants travaillent donc chacun de leur
côté et prennent souvent beaucoup de temps à terminer leurs études. Il y a
aussi beaucoup d'abandons.»
Grâce à des subventions du vice-recteur à l'enseignement et du
vice-recteur à la recherche, la professeure s'interroge à savoir comment
réduire la durée des études tout en conservant la qualité. Pour ce faire,
elle traite présentement des données tirées d'un sondage effectué à la
Faculté d'éducation. «Il est intéressant d'étudier les façons d'enseigner
des professeurs et de démystifier les attentes des étudiants quant aux
études de 2e et 3e cycles», souligne-t-elle.
Des recherches en éthique
Si dans l'avenir, France Jutras souhaite de plus en plus axer ses
recherches vers le développement professionnel des professeurs
d'universités, elle participe encore présentement à d'autres projets
traitant de problématiques éthiques. Avec ses collègues du CIRÉA André
Duhamel, Alain Létourneau et Georges A. Legault, sous la direction d'André
Lacroix, vice-doyen à la recherche à la Faculté de théologie, d'éthique et
de philosophie, elle s'intéresse aux fondements de l'éthique appliquée comme
paradigme de recherche. De plus, elle travaille depuis 1993 avec Marie-Paule
Desaulniers, de l'Université du Québec à Trois-Rivières. Toutes deux ont
publié ensemble nombre d'articles sur l'éthique en éducation et leur livre
sur la formation à l'éthique professionnelle va paraître en décembre.
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France Jutras, professeure au Département de pédagogie
Photo Roger Lafontaine
France Jutras reçoit beaucoup d'étudiants étrangers; un cadeau
offert par l'une de ses étudiantes.
Photo Roger Lafontaine |