Chercheuse en écologie forestière
Colette Ansseau s'efforce de préserver
la beauté des paysages estriens
ETIENNE SAMSON
Et si dans quelques années, victime de sa popularité, l'Estrie perdait la
richesse de ses paysages et ne devenait qu'un amalgame de panneaux-réclames,
de centres commerciaux et de vastes parcs de stationnement… Colette Ansseau
garde cette hypothèse en tête et, avec l'organisme qu'elle a cofondé,
Paysages estriens, elle tente d'exercer une influence pour éviter que le
développement de la région ne se fasse au détriment de la verdure des
montagnes, de la splendeur des lacs ni de l'harmonie des villes et des
villages.
Professeure au Département de biologie de l'Université de Sherbrooke et
chercheuse en écologie forestière, Colette Ansseau étudie la façon dont se
font les assemblages de communautés végétales. Autrement dit, elle observe
qu'est-ce qui pousse avec quoi, ce qui lui permet de comprendre les
écosystèmes forestiers et de prévenir une éventuelle dégénérescence des
milieux causée par une surexploitation ou une mauvaise gestion des
ressources.
Paysages estriens
Interpellée par le phénomène d'urbanisation grandissante de son milieu de
vie, Colette Ansseau a cofondé en 2001, avec des collègues de la Commission
environnement du CRD, l'organisme Paysages estriens, voué à proposer des
moyens pour concilier le développement économique, social et humain sans
nuire à la nature, notamment à la forêt. «Sherbrooke est une ville où la
nature est encore très présente, où la forêt occupe encore une place
importante, remarque-t-elle. Il serait déplorable que la rue King soit
l'allégorie de ce que pourrait devenir la région si on ne fait pas attention
à ses paysages.»
Paysages estriens regroupe une douzaine d'organismes et de ministères
composés de personnes ayant à coeur la protection des paysages. Sa mission :
sensibiliser et informer la collectivité régionale afin de promouvoir la
préservation et la valorisation du patrimoine paysager estrien. «Il s'agit
d'un organisme d'éducation, soutient Colette Ansseau. Nous ne voulons pas
nous opposer à des projets de développement ni jouer les chiens de garde.»
L'organisme souhaite plutôt faire connaître aux intervenants et à la
population la valeur économique, sociale, culturelle et esthétique de la
préservation des paysages estriens.
Ce faisant, en janvier, les membres de Paysages estriens ont déposé un
mémoire dans le cadre des audiences publiques du BAPE sur les répercussions
d'un échange de terrains sur la biodiversité et l'intégrité écologique du
parc national du mont Orford. En avril, présentant un mémoire lors de la
consultation publique sur le projet de plan de développement durable du
Québec, ils réclamaient un moratoire sur l'affichage le long des routes.
Un parcours international
Originaire de Belgique, Colette Ansseau a travaillé dans différents pays
avant de choisir l'Estrie comme terre d'accueil. Ayant obtenu un diplôme de
premier cycle de l'Université de Louvain, elle quitte son pays d'origine
en 1964 et s'installe au Congo pour y enseigner. Elle vit par ailleurs son
premier contact avec le Québec l'année suivante alors qu'elle enseigne au
Collège du Bon-Pasteur et au Séminaire de Chicoutimi. Puis, après quelques
années passées aux collèges Saint-Viateur et Jean-de-Brébeuf de Montréal,
elle se rend au Rwanda en 1971 où elle donne des cours à l'Université
nationale. Elle y occupera d'ailleurs le poste de directrice du département
de biologie durant trois ans. Elle quitte le Rwanda en 1974 et se rend au
Maroc où elle enseigne un an.
C'est en 1975 que Colette Ansseau met son pied à terre au Québec. Tombée
amoureuse de la beauté des paysages de l'Estrie et de la situation
géographique enviable de la région sherbrookoise, elle s'installe à
Lennoxville. Elle s'inscrit à l'Université Laval et complète une maîtrise et
un doctorat portant sur la foresterie de l'Estrie. C'est le début de son
étude des paysages estriens.
Fort impliquée
Maintenant bien installée en Estrie, Colette Ansseau ne voit pas l'heure
de s'arrêter. Il y a trop à faire. En plus d'être présidente et cofondatrice
de Paysages estriens, elle occupe le même rôle au sein d'Écologie sans
frontières, elle fait partie du comité-conseil de la Canadian Chemical
Producers Association et elle est cofondatrice la Canadian Society for
Ecological Economics, une branche de son pendant international visant
l'intégration des principes du développement écologiquement viable dans les
structures économiques.
Qui plus est, la professeure se rend parfois à Yokaichi, au Japon, où
elle agit comme consultante sur la préservation de la forêt en milieu
urbain. Plus près de nous, elle est présidente de la Corporation de
conservation du boisé de Johnville et membre du conseil d'administration de
la Fondation estrienne de l'environnement.
Comme quoi ce n'est pas tellement l'endroit qui importe, mais bien son
amour de la nature qui dicte sa voie. «Après toutes ces années à développer
la compréhension du paysage, il est bien normal que je veuille le
préserver», résume-t-elle.
Colette Ansseau est présidente et cofondatrice de l'organisme Paysages
estriens. |
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